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Le jour où Francfort a fait descendre Nuremberg

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Le jour où Francfort a fait descendre Nuremberg

Le 29 mai 1999, la Bundesliga connaît l'une des dernières journées de championnat les plus dingues de son histoire. Alors que cinq clubs luttent pour leur survie, le relégué virtuel change à plusieurs reprises en un quart d'heure. Et au final, Francfort se maintient, quand Nuremberg est couillonné.

« Radio, radio, radio, le média le plus rapide du monde. » Günter Koch, au micro de l’ARD – regroupement des radios publiques régionales – et en direct de Nuremberg, peine à reprendre son souffle. Il vient d’apprendre par son collègue que le Hansa Rostock a encaissé deux buts coup sur coup, ce qui change tous les calculs en cours. Il est 17h05 : mené 2-1 par le VfL Bochum, Rostock est pratiquement condamné à la 2. Bundesliga. Le dernier club de l’Est doit dire adieu à l’élite s’il ne parvient pas à reprendre l’avantage. Et tout cela parce que quatre minutes avant, l’Eintracht Francfort vient de marquer et se sort d’une situation impossible. Il reste un gros quart d’heure à jouer. Les matchs et le classement deviennent incontrôlables.

Destins en main

Plus tôt dans la journée, en regardant le classement, la Bundesliga semble pourtant dans les grandes lignes bien en place. Francfort est 16e et mal barré dans un championnat sans barrages, avec seulement 34 points et une différence de buts largement défavorable. Rostock et Stuttgart, à 35 et 36 points, sont menacés, mais peuvent s’en sortir en gagnant leur rencontre. Enfin, Freiburg (36 points) affronte Nuremberg (37 points) et peut se maintenir en gagnant. En fait, le schéma de la dernière journée permet à chacun d’avoir son destin en main. Même pour Francfort, il suffit de s’imposer avec cinq buts d’avance sur le champion en titre Kaiserslautern, qui vise encore une qualif en C1. Les Aigles seraient alors sûrs et certains de s’en sortir. À la pause, la situation est toujours très claire. Le suspense n’a pas duré côté VfB Stuttgart. Le club de Mercedes mène rapidement 1-0 et s’impose sur le Werder. Fribourg mène tranquillement 2-0 sur la pelouse de Nuremberg et surtout, Francfort n’a pas enflammé le match et reste coincé à un triste 0-0 qui les condamne. La deuxième mi-temps va faire bouger toutes les lignes.

« Les Nurembergeois n’ont pas pris la situation au sérieux. Ils ne savaient pas non plus exactement à quoi s’attendre ce jour-là. » Richard Golz, ancien gardien de but du SC Fribourg, revient dans une interview à 11Freunde sur le match et colle un tampon direct au FCN. Dans la meilleure des positions au coup d’envoi, le club manque peut-être de motivation et ne réalise pas ce qui se déroule sous ses yeux, même à la fin. « À un moment donné, cela m’a un peu rappelé Allemagne-Autriche (en 1982, le « match de la honte » de Séville, ndlr). En particulier à la fin du match. Les joueurs de Nuremberg n’ont pas joué avec un pressing de dingue, comme on pourrait s’y attendre quand une équipe veut égaliser. Ils ont surtout été attentifs à ne pas en prendre un de plus. Ils étaient déjà à penser que le score serait suffisant. » Il faut dire qu’ils conservent un sacré avantage : une différence de -11 (contre -13 pour l’Eintracht) et le Hansa qui reste derrière tout le monde avec son match nul. Difficile aussi de savoir à quel point les informations circulent entre les stades, en dehors de la radio, à cette époque. Richard Golz, encore, explique que, pour lui, les autres résultats importaient peu. « Je n’avais pas eu beaucoup d’infos. Pour nous, il y avait seulement besoin d’accomplir notre tâche, et donc ce n’était pas très important de savoir ce que les autres faisaient. » L’attaquant norvégien de Francfort, Fjørtoft, se souvient lui d’une fin de match où « les gens criaient sur le banc qu’il nous fallait encore un but » .

Comme « sauver leTitanic »

Avant cela, il y a d’autres buts qui tombent. Chapuisat marque contre le dernier, Mönchengladbach. Un but tombe à Berlin. Dans le live radio, ces buts sont traités comme il se doit : comme des anecdotes. Plus rien ne compte en dehors des soubresauts de la fin du classement, toujours aussi dingo. Les Adler de Jörg Berger poursuivent leur tout à l’attaque avec succès. Bernd Schneider, pour le dernier match de sa pige d’un an, claque un quatrième but. Si Rostock est toujours derrière, le club est désormais en première ligne si le score change à Bochum… Majak, entré en jeu, sort une tête piquée qui surprend le gardien adverse. Les 7000 supporters de l’Hansa présents exultent. Manni Breuckmann résume la situation à la radio : « Rostock mène 3-2, il est 17h12 » , ils sont sauvés. Le multiplex n’est pas au bout de ses surprises. Au même moment, Nikl réduit la marque à Nuremberg. Koch perd la tête, pris par l’enjeu. « Je n’y crois pas. Ils l’ont fait. Ils ont marqué. Je ne sais pas comment. » C’est une tête imparable qui fait la différence. Koch craque. « Nous étions à Bochum, nous étions à Francfort, nous sommes à Nuremberg. Quoi de neuf à Bochum ? » La radio va trop vite. La radio s’affole. Il est 17h13, le FCN a sauvé sa peau à son tour.

Cependant, les Aigles de Francfort attaquent et veulent forcer le destin, leur destin. Sur une ultime offensive, Fjørtoft prend la profondeur et reçoit le ballon. D’une feinte magnifique, il écarte le gardien de Lautern pour marquer du pied gauche. Francfort vient de gagner son quatrième match consécutif et écrit l’un des plus beaux miracles de la Bundesliga. Le temps additionnel ne change rien à l’affaire. Frank Baumann, la balle du maintien entre les jambes, envoie une molasse dans les bras de Golz. Fjørtoft cède les lauriers à son entraîneur. « Jörg Berger aurait même pu sauver leTitanic. » Touché et pas coulé, Francfort vient de remporter quatre matchs consécutifs et fait sombrer Nuremberg, à distance. Cette fois-ci, les deux clubs jouent directement l’un contre l’autre. Le club n’a pas d’excuse, l’enjeu est connu : le meilleur sur les deux matchs aura sa place en Bundesliga.

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