ACTU MERCATO
Le jour où David Jemmali aurait pu signer à l’Inter
Dans les derniers instants du mercato de l'été 2005, David Jemmali aurait pu faire ses valises, direction Milan. Un rendez-vous manqué que l'ancien défenseur attribue à la malchance, tandis que son agent parle d'un refus du joueur. Retour sur une histoire dingue, faite de coups de téléphones ratés et d'histoire d'amour.
C’est par une sacrée tuile que la saison 2005-2006 de l’Inter démarre. En ouverture de la Serie A, le 28 août, les joueurs de Roberto Mancini atomisent Trévise à San Siro, grâce à un triplé d’Adriano, mais perdent Javier Zanetti, blessé aux adducteurs et out pour trois mois. En galère de doublure crédible au poste d’arrière droit, les Nerazzurri ont trois jours pour trouver un joueur opérationnel tout de suite, capable de remplacer le défenseur latéral le plus classe du monde dès la prochaine journée, sur la pelouse de Palerme. Dans l’esprit de Mancini, un nom sonne comme une évidence : celui de David Jemmali, tant le Franco-Tunisien a fait forte impression un mois plus tôt, lors d’un match de préparation entre l’Inter et les Girondins de Bordeaux. Mais malheureusement pour les futurs champions d’Italie (sur tapis vert, ndlr), l’histoire ne va pas se dérouler comme prévu. Et c’est le Camerounais Pierre Womé qui viendra jouer les pompiers.
Une douche trop longue
À l’époque, les raisons pour lesquelles David Jemmali rempilera pour une septième saison avec les Girondins, plutôt que de découvrir Milan, semblent rocambolesques. Dans L’Équipe du 1er septembre 2005, celui qui a alors trente ans explique que tout s’est joué sur une histoire de messages téléphoniques écoutés trop tard : « Tout à l’heure, après l’entraînement, vers 19h, j’ai eu mon agent au téléphone, qui m’a dit que l’Inter Milan l’avait appelé pendant la séance, en se montrant très intéressé par ma venue. Malheureusement, comme je m’entraînais, nous n’avons pas pu discuter. C’est une histoire incroyable ! Ce n’est pas Saint-Aubin-du-Médoc qui m’a contacté, c’est l’Inter, un grand club ! » Manque de pot, en Italie, cette année-là, le mercato clôt à 19h. Et comme le joueur l’explique à nouveau en 2008, s’il n’avait pas traîné sous la douche, c’est un doublé coupe-championnat d’Italie qui s’afficherait sur son CV. « Le mercredi, on s’entraîne toujours le matin, à 10h, c’est immuable. Sauf ce jour-là, où la séance est à 16 heures. À la fin, je traîne, je me douche, je discute. Je n’écoute mes messages qu’avant de partir, il est 19h passées. Il y en a quatorze ! Mon agent me dit de le rappeler de toute urgence. Et il m’annonce qu’à dix minutes près je signais à l’Inter ! » L’histoire paraît tellement dingue, que pour en avoir le cœur net, il est plus prudent de se la faire confirmer une nouvelle fois par l’intéressé.
En 2015, pour avoir le plaisir d’écouter la voix de David Jemmali, le plus simple est d’appeler le Métropolis, le complexe de loisirs que le Toulousain a ouvert en banlieue bordelaise, après sa retraite sportive. Sur le répondeur de l’établissement, qui propose pistes de bowling, salle d’arcade et laser blade, l’homme invite à rappeler ultérieurement. Et si, par chance, il décroche, directement, c’est poliment qu’il refuse toute discussion sans rapport avec une réservation dans son terrain de jeu. « Moins je parle aux journalistes, mieux je me porte » , pose le quadragénaire dans un sourire, avant d’ajouter, au sujet du transfert avorté à l’Inter, que « le passé, c’est le passé. Appelez Jean-Francois Larios, mon agent de l’époque. Il pourra vous en parler. » Et effectivement, Jean-François Larios peut parler de cet épisode, dont il se souvient parfaitement. Et sa version n’a pas grand-chose à voir avec celle que David Jemmali a raconté dans les journaux.
La future femme de Mexès entre en jeu
Jeff Larios n’est pas un homme de beaucoup de mots. Lorsqu’il décroche son portable, c’est d’abord pour annoncer que « Jean-François Larios n’a jamais parlé, et ne parlera jamais ! » Mais lorsqu’il s’agit d’évoquer ce 31 août 2005, la langue de l’ancien agent se délie. « Cette histoire de message écoutés trop tard n’est pas vraie ! J’ai tout fait pour que Jemmali aille à l’Inter, ou à Séville, qui était également intéressé. Je suis allé voir Jean-Louis Triaud, j’ai même demandé à son frère de le convaincre. Pour moi, c’était l’un des tout meilleurs arrières droit du monde, à l’époque. Donc j’ai tout fait pour qu’il parte. Mais il ne voulait pas quitter Bordeaux, pour des raisons familiales dont je ne vous donnerai pas les détails. »
Effectivement, pas grand-chose à voir avec un répondeur consulté en dilettante. Mais alors, qu’est-ce qui a pu pousser le défenseur bordelais à préférer la compagnie de Ramé, Jurietti, Afanou, Faubert, Fernando, Laslandes ou Denilson, à celle de Veron, Figo, Adriano, Mihajlović, Cambiasso, Recoba ou Walter Samuel ? D’après une source très proche du joueur à l’époque, la raison se trouve essentiellement dans un problème de… phobie aérienne : « Si David Jemmali n’est pas allé à l’Inter, c’est parce qu’à l’époque, il était en couple avec une femme qui avait la phobie de l’avion. Et elle refusait donc catégoriquement de prendre l’avion. Le comble, c’est que cette femme est aujourd’hui marié à Philippe Mexès, qui joue à Milan. » Entre refus d’écouter son répondeur, et refus de voler, la véritable raison de ce transfert raté à l’Inter est tout sauf claire. D’autant qu’un trajet Bordeaux-Milan, c’est 9 heures en voiture, hein. Ce qui est certain, en revanche, c’est qu’à la fin de la saison 2005/06, David Jemmali sera sacré meilleur arrière droit de Ligue 1 par l’UNFP. Pas rien, comme lot de consolation.
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Par Mathias Edwards