- Euro 2020
- Conférences de presse
Le jeu de la bouteille
Ce fut le mini-événement des conférences de presse, généralement plutôt lisses. Cristiano Ronaldo d’abord qui dégage rageusement deux bouteilles de Coca-Cola posées devant lui (l'Italien Manuel Locatelli l'imitera plus tard). Puis Paul Pogba qui en fait de même avec une Heineken (sans alcool, mais il ne le savait apparemment pas). Il n’empêche, cette attitude soulève la question des rapports des joueurs avec leurs sponsors - pardon « partenaires » -, notamment quand ils évoluent en sélection nationale, puisque que pour le coup, ils ne les choisissent pas. Bienvenue en Hypocrisie.
Voici le dernier point Godwin en date du capitalisme. Après avoir ostensiblement retiré une bouteille de Coca-Cola de son pupitre, Cristiano Ronaldo aurait, par son poids médiatique, sa popularité et le nombre de ses followers sur les réseaux sociaux (quelque 500 millions en tout), provoqué un dévissage du cours de l’action de l’entreprise américaine, qui aurait chuté de 56,10 dollars à 55,22 dollars, soit une perte de 4 milliards de dollars. De ce point de vue, la comparaison avec l’attitude de Paul Pogba est peu flatteuse pour le joueur français puisque au contraire, Heineken aurait progressé après sa réaction. Naturellement, estimer que ces variations économiques aient pu résulter du saut d’humeur d’un footballeur lors de l’Euro laisse songeur et mérite d’être examiné sur la durée.
Hypocrisie et amnésie
Il est certes tout à fait possible de souligner l’hypocrisie des joueurs. Ils se transforment d’ailleurs habituellement facilement en panneau publicitaire ambulant, démarche qui leur apporte une partie non négligeable de leurs revenus. De même, Ronaldo semble souffrir d’amnésie puisqu’il a participé à des spots de pub de Coca-Cola par le passé. Cette séquence démontre toutefois que la relation toxique entre foot et sponsors peut dériver vers le grand n’importe quoi. Et difficile de penser que le football va changer le monde en clamant « De l’eau ! Pas du Coca-Cola ! » Pas d’évasion fiscale non plus s’il vous plaît…
Il reste encore purement spéculatif d’évoquer les raisons (le culte de l’hygiène de vie chez Ronaldo, la religion chez Paul Pogba, converti à l’islam) qui ont provoqué cet affront aux marques, qui paient cher leur présence lors de ces moments. L’UEFA a décidé de ne pas « sanctionner » les fautifs : « Chacun est libre de boire les boissons qu’il préfère(…). Aucune procédure disciplinaire ne sera ouverte contre Cristiano Ronaldo. » Du moment que les panneaux autour du stade ne sont pas détruits pas un kamikaze de Greenpeace et que les logos sont bien visibles jusque sur les tickets des places, il n’y a effectivement pas de raison de s’alarmer. Tout roule et tout le monde paie.
Coca vs Huawei ?
Néanmoins, la gêne peut s’emparer des coéquipiers, coincés entre leur besoin de donner la meilleure image possible et la reconnaissance envers la main qui les nourrit. Raphaël Varane, interrogé à ce sujet en conférence de presse des Bleus, notamment à propos de la surprésence des sponsors, a ainsi dû dégainer sa fameuse langue de bois. « Chacun est libre d’analyser la situation à sa façon.(…)Je pense qu’il y a aussi la partie business dans notre métier. Les sponsors sont présents. Chaque joueur a son opinion. Il y a des sponsors et des partenaires qui vont nous plaire plus ou moins. Il faut respecter les partenaires et il faut respecter l’opinion de chaque joueur. » Il convient néanmoins de préciser que lors d’un Euro par exemple, c’est l’UEFA qui décide des contrats de partenariat et en engrange les bénéficies (idem pour les Bleus, pour lesquels la FFF a la mainmise sur sa commercialisation). Cette manne finance en partie les dotations que vont récupérer les sélections selon leurs performances, et donc indirectement les primes des capés. Pour le reste du temps, les joueurs composent avec les sponsors du club – maillot notamment – et leurs propres « partenaires » , essayant de faire grimper les enchères en fonction de leur statut. Les cas de clash s’avèrent fort rares, sauf récemment par exemple avec Antoine Griezmann rejetant Huawei au nom de la répression que subissent les Ouïghours en Chine populaire. Mais pour tout avouer, puisque personne n’est aveugle sur le gavage commercial actuel du foot pro, ce n’est guère sur ce terrain qu’on les attend en toute « sincérité » . Surtout quand d’autre part, on renonce à un genou à terre ou qu’on se tait sur la Coupe du monde au Qatar.
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