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Le Honduras et les Misérables français
C'était le sujet qui intéressait tout le monde à Porto Alegre. Tout le monde, sauf les deux équipes. Les journalistes français et honduriens ont beau avoir insisté, ils n'ont pas eu leur déclaration choc. Non, les Honduriens n'entreront pas le couteau entre les dents cet après-midi sur la pelouse de l'Internacional pour se venger du documentaire de Canal +.
Il est environ 15h. La (catastrophique) conférence de presse d’avant-match de l’équipe de France est sur le point de se terminer au stade Beira-Rio de Porto Alegre, et c’est tant mieux. Devant plus d’une centaine de journalistes, Lloris expédie en une petite dizaine de minutes toutes ses réponses bateau. « – Hugo, pensez-vous que l’ambiance détermine les résultats ou l’inverse ? – Euuuh, les deux. » Capitaine charisme. À sa décharge : les questions des journalistes, plus chiantes les unes que les autres. Une fois assurée leur ferme intention de « prendre les trois points » , même s’il faudra « rester vigilants » car le « Honduras est une très bonne équipe » , le portier de Tottenham s’échappe et laisse son coach face à la foule. Deschamps ne comprend pas les questions en anglais, mais refuse de mettre le casque de traduction sur ses oreilles. « Il a dit quoi, là ? J’ai pas tout compris. » La dernière question est pour un journaliste hondurien et concerne le sujet principal de ces derniers jours : le reportage de Canal + sur le Honduras, intitulé Les misérables du Honduras.
DD et la géographie
« Au Honduras, on est étonnés de voir les médias français parler autant de la violence dans notre pays » , explique-t-il. Double D répond très justement qu’une chaîne de télévision ne représente pas toute la France et conclut sur un magnifique : « Les pays sud-américains jouent souvent avec beaucoup d’agressivité, mais pas seulement. » Pas de chance, le Honduras n’est pas un pays d’Amérique du Sud. « C’est vrai que ce reportage a été très mal perçu au pays, nous assure Copan Alvarez, journaliste hondurien présent sur place. Pas pour le contenu, car ce qui est raconté est un bon reflet de la réalité de notre football et de notre société, mais pour le titre. Le mot « misérables » en a blessé certains. J’avais reçu l’équipe de Canal au Honduras et les journalistes m’ont dit qu’ils étaient eux aussi dégoûté par le titre, mais c’est la production qui a eu le dernier mot. » Pas un manque de respect donc, mais plutôt un manque de tact et de maîtrise en géographie.
« Au Honduras, on se plaint trop »
Près de quatre heures après le binôme français, Luis Fernando Suárez (le sélectionneur hondurien) et Andy Najar (le jeune joueur d’Anderlecht à l’histoire folle) font à leur tour leur entrée en salle de conférence de presse. Il fait nuit, il y a beaucoup moins de monde et bien davantage de décompression. Après quelques questions sur les points forts et points faibles de l’équipe de France, le sujet refait rapidement son apparition. Un journaliste hondurien demande d’abord au Profe ce qu’il pense de tout ça. « Je pense qu’au Honduras, on se plaint trop. On se plaint de tout et n’importe quoi : « Ils nous ont traités de misérables, ils nous ont traités de violents. » Parlons plutôt de jeu et du match, c’est nettement plus intéressant. » Clair et net. Un autre journaliste, français cette fois-ci, demande alors à Najar si ça peut les surmotiver. L’ailier de la H fait comme son coach, il éteint un incendie lancé, comme souvent, par les médias eux-mêmes. « On le sait que nos terrains ne sont pas en bon état et qu’il y a de la violence dans nos stades. On n’a pas de quoi être affecté par ce documentaire. On n’y pense pas, en fait. On est tout simplement concentrés sur ce qu’on a à faire sur le terrain. » Et c’est largement suffisant.
Par Léo Ruiz à Porto Alegre