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Le Golfe sort Leeds de son trou
Loin d’un Lens-Leeds qui sentait la friteuse et la sueur européenne, le Leeds United FC traverse aujourd’hui péniblement la D2 anglaise, avec un stade qui sonne creux, une mise sous administration judiciaire dans le rétro, et un président, Ken Bates, détesté des supporters, adulé par ses banquiers. Sous le sapin de 2012, un nouveau cadeau : venu du Moyen-Orient, un nouveau trio de proprios.
Ken Bates avait préparé son monde dès le 26 juin dernier. Leeds United FC était à vendre. Mais à la fin de l’été, rien de plus, sauf une rumeur avec les mots « Moyen-Orient » . Fin septembre, un soir d’affiche vintage à Elland Road, Leeds-Nottingham Forest, il amuse en loge trois-quatre banquiers de la Gulf Finance House Capital Limited. Domicilié à Dubaï, l’établissement confirmera le secret, par le biais d’une lettre adressée à la bourse de Dubaï, le 26 septembre : « GFH Capital Limited, une filiale à 100% de Gulf Finance House, a signé un accord d’exclusivité dans le processus d’acquisition de la Leeds City Holdings, société parente du Leeds United Football Club » . Depuis, peu d’informations ont filtré. Il faut dire que tous les acteurs engagés dans cette vente connaissent la culture du secret. Ken Bates, au passage ancien patron de Chelsea, réside à Monaco, et détient le Leeds United Football Club via une société enregistrée à St Kitts et Nevis. Ouais, le pays de Kim Collins. Eurofin Capital, une banque privée d’investissement de Lausanne et Londres, diligente la vente et sert d’intermédiaire à GFH Capital Limited, banque de Dubaï et filiale de GFH donc, banque elle-même domiciliée au Bahreïn, « soutenu par un homme très riche proche du gouvernement du Bahreïn » dixit Bates sur les ondes de la Yorshire Radio. « C’est ce que Ken dit. Nous n’avons jamais dit ça » , répond, énigmatique, Salem Patel, un des dirigeants de GFH Capital et nouveau venu dans le board de Leeds. Voilà. Tout ce bazar bancaire pour se payer le club de Leeds. Sans Alan Smith, Lukas Radebe, Mark Viduka ou Éric Cantona. On parle d’une cinquantaine de millions d’euros, sans le stade d’Elland Road ni Thorp Arch, le centre d’entraînement. Ken Bates alourdit ses poches d’une trentaine de millions, lui qui en avait sorties 10 en 2005. Renard. À Chelsea, en 2003, il avait déjà revendu pour 70 millions d’euros à Abramovitch ses parts achetées 1 euro symbolique en 1982.
Un Stéphanois au mercato
Sur le banc, le coach Neil Warnock s’impatiente. Il savait dès juin que le trio de « golfeurs » conditionnait le rachat de Leeds à une prolongation de son contrat. Il n’a pour autant pas vu un penny pour le mercato estival. La vente n’a été actée que ce vendredi 21 décembre. Et Warnock disposerait désormais d’une petite dizaine de millions d’euros pour arroser le marché hivernal. Les Peacocks se bagarrent actuellement en Championship, à près de 10 points déjà des deux premières places qualificatives pour la Premier League, dans un Elland Road qui boude. Mais Leeds n’a plus de dettes. « Nous avons acheté un club qui avait du cash, sans dettes » rassure, dans les colonnes du Yorshire Evening Post, David Haigh, un des boss de GFH Capital, fan de Leeds et nouveau venu dans le board du club. Salem Patel présente sa boîte avec une fierté prudente : « Pour être honnête, nous n’aurions jamais acheté un club de foot si nous n’étions pas préparés à assumer ce genre d’investissements (ndlr : sous-entendu, l’accession en Premier League). Nous n’allons juste pas dépenser un argent fou comme d’autres ont pu faire. On doit rendre tout ça durable » . Loin de faire dans le micro-crédit, GFH Capital veut montrer une image sérieuse, aux coffres profonds sans pour autant trop aiguiser l’appétit des clubs vendeurs en période de transferts. Un travail de funambule. Ken Bates s’en sort très bien. Il garde son fauteuil de président jusqu’à la fin de saison, avant de devenir président d’honneur, soit un titre de meuble à vie, sans pouvoir décisionnaire, mais les poches pleines. « Je vais tâcher de passer le témoin à mon successeur, quel qu’il soit. Ensuite, je prendrais sans doute un peu de recul, à plus profiter de mon temps libre, après huit années de travail très dur ici à Leeds » explique ce cher Ken, toujours sur les ondes. Se la couler douce pour être complètement honnête et s’éviter aussi le désamour des supporters pour ce Leeds made in Ken Bates, avare en promos au rayon billetterie. « Il faut que l’abonné, il ait un réel avantage par rapport aux billets vendus à chaque match » coupe-t-il. Sur le papier journal, David Haigh propose une autre tactique : « Le meilleur moyen de faire revenir les supporters, c’est de gagner plus de matchs. De notre côté, on propose des initiatives. L’une d’entre elles, c’est l’ouverture de notre compte officiel Twitter. Leeds est le dixième nom de club le plus mentionné sur Twitter mais n’avait même pas de compte » . M. Patel préconise lui les abonnements de demi-saisons. Avec Hisham Alrayes, celui qui complète le trio, Salem Patel et David Haigh ont surtout un objectif, plus coûteux encore qu’un transfert, à remplir : acheter Elland Road à une société des Iles Vierges britanniques et le centre d’entraînement de Thorp Arch à un homme d’affaires de Manchester, Jacob Adler. À court-terme, les nouveaux proprios du LUFC vont devoir passer par l’épreuve mercato. Et en ce moment, le premier nom à circuler est celui de Max Gradel, de Saint-Étienne. À Leeds, les supporters prennent ça comme une bonne nouvelle.
Par Ronan Boscher