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Le football sur l’île Maurice, entre le marteau et L’Enclume
La sélection nationale de l'île Maurice affronte ce mardi soir la Namibie, dans le cadre de la COSAFA Cup. Une compétition capitale pour préparer au mieux les Jeux des îles de l'océan Indien, qui auront lieu dans quelques semaines à La Réunion. Oui, même ces petites sélections préparent des compétitions internationales.
Contrairement à l’oiseau qui les représente, le dodo, les joueurs de l’île Maurice n’ont pas encore disparu. Ils évoluent simplement loin des regards des experts du football mondial. Pourtant, la sélection mauricienne n’est pas toute jeune. Fondée en juillet 1947, alors que l’île était encore une colonie britannique, la sélection est affiliée à la FIFA depuis 1964. Le « Club M » , surnom donné à la sélection sur l’île, compte même une participation à la phase finale d’une Coupe d’Afrique des nations. C’était en 1974, et les Dodos étaient repartis à la maison après trois défaites infligées par les pensionnaires du groupe B : l’Égypte, le Zaïre et le Congo. Depuis, la 190e équipe au classement FIFA bataille en quête de reconnaissance et de victoires retentissantes, comme celle obtenu aux Jeux des îles de l’océan Indien, en 1985 et en 2003. Passage obligatoire pour Christopher l’Enclume et le nouveau sélectionneur, Didier Six, la COSAFA Cup, en Afrique du Sud.
La COSAFA Cup avant les Jeux
Organisé chaque année par le Conseil des associations de football en Afrique australe, la COSAFA Cup réunit quatorze équipes. Six entrent en lice directement en quarts de finale, tandis que les huit autres s’affrontent au sein de deux poules de quatre. Ce dimanche, les Dodos ont perdu leur premier match face au Zimbabwe (2-0). Une défaite polémique, puisque le Club M a été privé de deux de ses titulaires pour des histoires de passeport. « Le Zimbabwe a très bien joué et nous savons que c’est une très bonne équipe. Toutefois je déplore le fait que nous n’avons pas joué avec toutes nos forces » , a déclaré Didier Six, très en colère après le match. Sans Francis Rasolofonirina et Jonathan Edouard, le technicien français a dû faire confiance à Christopher L’Enclume, 24 ans, et joueur du Cercle de Joachim. Si le nom de L’Enclume ne vous dit peut-être rien, il évoque sur l’île Maurice de beaux souvenirs aux amateurs de football.
Désiré L’Enclume, véritable héros national, a remporté les jeux de l’océan Indien en tant que joueur en 1985, puis en tant qu’entraîneur, en 2003. Aujourd’hui dans le staff de l’équipe nationale, où il entraîne les gardiens de but, il prend plaisir à voir évoluer son neveu, Christopher. Ce soir, face à la Namibie, ce dernier aura d’ailleurs fort à faire. Le Club M n’a déjà plus le choix, puisque dans l’autre match du groupe A, les Seychelles et la Namibie se sont neutralisés (1-1). Une victoire ou une élimination, le choix est vite fait, mais ne fait pas peur à Christopher, qui nourrit des rêves de succès et de gloire. « Je joue avec l’équipe depuis 2012. Je rêve de faire un très beau parcours avec mon équipe nationale tout au long de ma carrière. Je veux réaliser de grands exploits, faire rêver nos supporters » , confie-t-il à quelques heures de cette rencontre cruciale. À 24 ans, il le sait, il doit se donner à 100% s’il souhaite rejoindre un club européen.
C’est en forgeant qu’on devient forgeron
Comme il l’explique lui-même, le football coule dans le sang de la famille L’Enclume. Son parcours, Christopher le connaît par cœur : « Mon oncle était un ancien international mauricien. Mon père était aussi footballeur. J’ai emboîté le pas. J’ai commencé a l’école de football de cité Vallijee à l’île Maurice. Pour ensuite rejoindre le centre technique régional nord. J’ai fait les sélections jeunes moins de 13 ans, puis moins de 15 ans, moins de 17 ans et moins de 20 ans. » Son goût pour le football anglais, il l’explique assez facilement. D’abord, « les gens aiment surtout le football anglais » sur l’île Maurice. Logique, puisque la République fait aujourd’hui partie du Commonwealth. Alors forcément, les connexions se font plus facilement. « J’ai ensuite rejoint le centre de formation François Blaquart. Et je suis passé aussi par l’académie de Didier Agathe où j’ai eu l’occasion de faire plusieurs stages en Angleterre et de jouer contre des équipes tel que Wigan, Huddersfield, Morecambe et Barnsley » , raconte Christopher.
Son parcours en professionnel est plus qu’exemplaire. « J’ai rejoint le club de ASPL 2000 à l’île Maurice. La première saison, j’ai été champion. Et ensuite j’ai rejoint mon club actuel, le cercle de Joachim, avec qui on a terminé champion la saison dernière » , et avec qui il est actuellement leader du championnat mauricien. Forcément, à force de tout gagner sur l’île, Christopher a des envies d’ailleurs. « Je veux pouvoir poursuivre ma carrière à l’étranger. Certains clubs en Angleterre étaient intéressés, mais on n’a pas pu conclure de contrats à cause du manque de professionnalisme de certaines personnes. Peu importe que ce soit en France, en Suisse, même en Belgique, je m’en fiche. Je sais que je peux évoluer à ce niveau-là, ce sont juste les contacts que je n’ai pas » , regrette-t-il. Fort de ses convictions et de son ambition, Christopher veut faire découvrir son nom de famille à l’Europe. Mais avant de s’envoler pour la Premier League ou la Ligue 1, un petit tour chez les grands-parents s’impose. « Ah, malheureusement, je ne connais pas bien l’origine de mon nom. Il va falloir que je demande aux grands-parents. L’Enclume, ça vous intrigue ? » Un peu, oui.
Par Gabriel Cnudde