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Le football chinois lui aussi en quarantaine
Jeudi, la Fédération chinoise de football a annoncé la suspension jusqu’à nouvel ordre de son championnat, la Chinese Super League, ainsi que toute autre compétition de quelques niveaux que ce soit. Parce que l’épidémie liée au coronavirus de Wuhan n’épargne personne dans l’Empire du Milieu. On en a parlé avec un Français qui bosse dans le foot pro en Chine.
Richairo Živković peut avoir le sourire. Prêté par son club de Changchun Yatai à Sheffield United pour six mois, le jeune attaquant néerlandais fait coup double, ou triple : il retrouve l’Europe et son championnat le plus attractif, et va s’éloigner, tout du moins provisoirement, de l’atmosphère post-apocalyptique qui est en train de s’emparer de la Chine continentale. D’autres anciens « noms » du football européen ont réussi une opération similaire : Yannick Ferreira Carrasco prêté six mois à son ancien employeur l’Atlético de Madrid, ou encore Odion Ighalo, qui va faire une pige à Manchester United. D’autres comme Marouane Fellaïni sont restés à quai et vont devoir composer avec une Chinese Super League suspendue jusqu’à nouvel ordre depuis jeudi. Officiellement, la Chinese Football Association a mis en avant des impératifs de sécurité à l’égard des joueurs, encadrements, mais aussi des supporters, les regroupements dans les stades étant une activité particulièrement à risque dans le pays d’origine du coronavirus.
« Tout le monde est confiné chez soi »
Steven* n’est pas joueur de football professionnel, mais éducateur pour « le centre de formation d’un grand club au nord du pays » . Pour lui, pas de fin de mercato et donc « une possibilité que je reparte chez moi (dans un pays d’Europe du Nord, N.D.L.R.), cela va être discuté avec le club » . Autant pour des raisons de moral et de sécurité que d’utilité pour son employeur. « Pour le moment, tout est à l’arrêt au club. La santé des joueurs, notamment de nos jeunes joueurs, est prioritaire. Alors tout le monde est confiné chez soi. Il n’y a aucun entraînement, aucune activité collective pour nous. » D’autant que ses jeunes joueurs sont en période de vacances scolaires jusqu’au 17 février. « On a donné des instructions d’entraînement individuel, on ne peut pas faire mieux jusqu’à ce que le gouvernement chinois décide d’autoriser à nouveau les compétitions sportives. » Pour le moment, toutes les compétitions, de tout niveau – des championnats du monde d’athlétisme indoor prévus initialement en mars jusqu’aux compétitions de quartier – sont suspendues.
« Dans la vie quotidienne, cela donne une ville au ralenti, quasiment tout est fermé, souligne Steven. Mais les supermarchés sont ouverts, il n’y a pas de pénurie de nourriture, donc aucun sentiment d’insécurité pour le moment. » Surtout qu’il est plus simple d’affronter le coronavirus en étant un occidental qu’un local. Steven le confirme : « Je suis dans une résidence avec des gardes qui filtrent les entrées 24 heures sur 24. Je suis à 1000 km de Wuhan, j’ai le sentiment que le gouvernement chinois a pris les mesures qui s’imposaient, donc je suis confiant. » D’autant que le trentenaire n’a pas fait le voyage en Chine avec femme et enfants, un paramètre qui aurait « probablement accéléré la réflexion pour un retour » .
« Insistez bien sur le fait que je ne me sens absolument pas en danger »
Pour tout dire, Steven a un autre problème et s’inquiète de voir son nom sortir dans un article. « S’il vous plaît, gardez mon identité secrète, car au club, c’est une grosse structure où l’on veut tout contrôler. Ils ne vont pas apprécier le fait que j’ai pu vous parler. Insistez bien sur le fait que je vous ai dit que tout était bien géré, d’accord ? Insistez bien sur le fait que je ne me sens absolument pas en danger. On m’a dit de rester tranquille dans mon appartement, je le ferai tant qu’on me le dira. » Mais si on lui dit de quitter la Chine, cela l’arrangerait bien.
*le prénom a été modifié
Par Nicolas Jucha
Propos recueillis par NJ