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Le Festival de Cannes du football – Le palmarès
Cannes, c'est la fin. Une période que partage également le football pour clore ses exercices annuels. Les liens entre cinéma et football sont plus tacites qu'on ne le croit : phénomène de starisation, goût certain pour la dramaturgie, souffle épique caractéristique et… même durée moyenne entre un film et un match. So Foot a donc décidé de vous offrir son palmarès du Festival de Cannes du football.
Palme d’Or : Sir Alex Ferguson pour Manchester United
Certes, il ne s’agit pas là de sa meilleure saison en tant que manager de Manchester United. Mais c’est la dernière, après vingt-sept ans de règne sur le banc du théâtre des rêves. Comme Roman Polanski (Le Pianiste) et Terrence Malick (Tree of Life) avant lui, Sir Alex se retrouve palmé pour l’une de ses œuvres les moins emblématiques depuis 1986. Mieux vaut tard que jamais pour une récompense « d’honneur » qui rappelle un palmarès sans égal avec les Red Devils : treize championnats ; cinq FA Cup, quatre League Cup, dix Community Shield sur le plan national ; trois coupes européennes dont deux Ligue des champions, un Supercoupe d’Europe et une Coupe intercontinentale. Mieux, à l’image de Terrence Malick (encore) avec Jeff Nichols, réalisateur de Mud, la passation de pouvoir entre Sir Alex Ferguson et David Moyes s’est faite avec douceur et secret. Entre gentlemen.
Grand Prix : Jürgen Klopp pour Dortmund
À l’image de son compatriote et réalisateur Rainer Werner Fassbinder, Jürgen Klopp fascine en même temps qu’il agace. Addiction à la cigarette (on trouva Fassbinder sur son lit de mort une clope au bec), tempérament volcanique et goût certain pour la provocation caractérisent les deux teutons. Mais lorsque le coach de Dortmund applique les préceptes de son art, il fait taire les critiques en abordant des thèmes similaires à RWF : recherche du romantisme absolu avec un jeu d’une beauté pure dans un club de prolos. À tel point que sa course éperdue vers l’avant a poussé l’ultra-possession barcelonaise du côté des auteurs pantouflards adeptes de la maîtrise sans âme.
Prix d’interprétation : Luis Suárez pour Liverpool
Cette année, Luis Suárez est passé par toutes les émotions, démontrant ainsi au Jury son statut d’acteur à multiples facettes. Outre sa volonté de réaliser ses cascades lui-même, l’Uruguayen a joué l’abandon à merveille lorsque aucun des ses coéquipiers n’est venu célébrer son but contre Chelsea, ou la rage en donnant la réplique à Branislav Ivanović, toujours contre les Blues. Une prestation qui rappelle celle toute en folie d’Isabelle Adjani dans Possession d’Andrzej Zulawski, elle aussi récompensée par le Prix d’Interprétation à Cannes en 1981.
Prix de la mise en scène : Zlatan Ibrahimović pour la Suède
Le match aurait pu être classé hors-compétition, tel un vulgaire Gatsby le Magnifique. Mais devant le travail effectué par Zlatan Ibrahimović, le Festival a décidé in extremis de l’intégrer à la compétition officielle. Auteur d’un quadruplé, soit l’intégralité des buts suédois de la rencontre, Ibra a infligé à l’Angleterre une défaite digne des plus grandes batailles filmées, façon Hommes en guerre de Sergei Vasilyev, Prix de la mise en scène en 1955. Nanti d’un certain sens de l’esthétique, en guise de climax, Zlatan sort un but de nulle part : un retourné acrobatique de trente-cinq mètres qui part se loger dans le petit filet de Joe Hart. Score final : 4-2. Générique de fin.
Prix du scénario : Dortmund pour Dortmund-Málaga – ¼ de finale retour de Ligue des champions
Après le 0-0 obtenu à l’aller à Málaga, Dortmund avait pour obligation de faire un résultat chez eux. Pourtant, c’est bien Joaquín qui ouvre le score pour les Boquerones, condamnant les Schwarz-Gelben à l’exploit. Lewandowski égalise pour Dortmund puis Eliseu redonne à nouveau l’avantage à Málaga. À la fin du temps réglementaire, le club de la Ruhr est techniquement éliminé de la Ligue des champions. 91e minute : Reus égalise, suivi deux minutes plus tard par Felipe Santana, qui joue ici le rôle d’un salaud lumineux assassinant les espoirs andalous d’un but entaché d’une position de hors-jeu. Un suspense haletant jusqu’à la toute dernière minute, assorti d’un twist digne de M. Night Shyamalan. Sauf que là, c’est pas Bruce Willis qui est mort mais bien le Málaga CF.
Prix du Jury : Michu pour Swansea City
Lorsqu’il arrive au pays de Galles, Miguel Pérez Cuesta aka Michu est un véritable inconnu. Arraché 2,5 millions d’euros au Rayo Vallecano, Michu jure à côté des 30 millions de Van Persie à Manchester United ou les 40 millions de Hazard à Chelsea. Pourtant, sur le terrain, le milieu offensif espagnol reconverti avant-centre n’a rien à leur envier. Une fin de saison plus tard, Michu a planté 18 buts, tous marqués dans le jeu, permettant à Swansea d’obtenir une honorable neuvième place en Premier League. Apothéose de la saison des Swans ? Avec l’aide de l’espagnol, le club gallois glane le premier trophée majeur de toute son histoire : une League Cup face à Bradford, écrasé 5-0. Et puis bon, ce blaze, quoi, on en parle ?
Palme d’Or du meilleur court-métrage : Romain Alessandrini pour Rennes
Avant de signer à Rennes, Alessandrini venait de passe deux saisons au Clermont Foot. Le club de la ville qui organise le Festival International du Court-Métrage. Le petit Romain était donc prédisposé à recevoir cette Palme d’Or du meilleur court-métrage. Espoir confirmé lors d’une première partie de saison durant laquelle Alessandrini mettait un point d’honneur à ne marquer que des buts spectaculaires. Il a même réussi à nous faire à nouveau croire au potentiel du Stade rennais, avec son compère Féret… Mais le plaisir était de courte durée : en février, quinze jours après sa première convocation en équipe de France, le mec se fait les croisés du genou droit. Saison terminée. On attend le long-métrage avec impatience l’année prochaine.
Caméra d’Or : Isco pour Málaga
À seulement 21 ans, à coups de fabuleux dribbles et de caresses portées au ballon, Isco a mis les défenses d’Espagne et d’Europe à ses pieds. Del Bosque lui a même offert sa première sélection avec L’Équipe d’Espagne en février dernier, lors d’un amical contre l’Uruguay. Sans doute le sélectionneur de la Roja avait encore en mémoire le superbe doublé du Malaguène face au Zénith Saint-Pétersbourg en Ligue des champions. En cette fin de saison, le Real Madrid et Manchester City ont déjà montré des signes d’intérêt pour la pépite. Reste à savoir si la suite de la carrière d’Isco ressemblera plus à celle de Jim Jarmusch, lauréat en 1984 avec Stranger than Paradise devenu grand réalisateur, ou celle de Steve McQueen, récompensé en 2008 pourHunger dont on se demande comment il a pu pondre son Shamesans honte.
par Mathieu Rostac