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Mapi hour
Déjà quadruple championne d'Espagne avec le FC Barcelone, Mapi León vise un deuxième sacre en Ligue des champions ce samedi. La défenseure aragonaise s'est imposée comme une figure incontournable de l'autre côté des Pyrénées, pour ses qualités comme pour sa personnalité, autoritaire tout en restant solaire.
Se retrouver devant Mapi León, c’est avoir l’œil irrémédiablement aimanté vers quatre mots tatoués sur sa gorge. Looks can be deceiving – les apparences peuvent être trompeuses. L’Espagnole n’a pas choisi cette expression au hasard. « Les gens qui ne me connaissent pas peuvent se dire “cette fille est une imbécile”. Je peux donner cette image, confiait-elle à Sport. Mais si tu me connais, tu ne penses pas cela. Ou peut-être que si. Tu peux donner une impression ou une autre, et parfois c’est tout le contraire. » Sur le terrain, elle apparaît surtout comme une leader et une pièce maîtresse du FC Barcelone, qui écrit les plus belles heures de son histoire avec une quatrième finale de Ligue des champions en l’espace de cinq éditions. Tout sauf une imbécile. Et ce n’est pas qu’une impression.
Commandante
Le Barça n’a encaissé que 19 buts en 43 matchs cette saison, pour un total de 29 clean sheets. La charnière formée par Mapi León et Irene Paredes n’y est évidemment pas pour rien. L’engagement, la vision du jeu et la qualité technique de la gauchère, élue pour la première fois dans l’équipe type The Best en février, font des merveilles. D’autant plus dans une équipe basée sur la possession. Omniprésente dans la construction, elle est de loin la joueuse qui réussit le plus de passes en Ligue des champions cette saison – 862 contre 739 pour sa dauphine Dominique Janssen. « J’aime distribuer le ballon et au poste de latéral, je me sens un peu coincée, expliquait-elle à Panenka. Dans l’axe, je peux avancer… Et je peux donner plus de consignes, parce que je parle beaucoup ! » Un leadership qu’elle exprimait déjà à l’époque où elle amenait son ballon pour jouer avec ses copains d’école, parce que « celui qui avait la balle était celui qui commandait ». En plus de diriger et d’organiser, l’Aragonaise excelle quand il s’agit de frapper. Son pied gauche soyeux lui a permis de marquer trois buts sur coup franc direct cette saison contre Villarreal, l’Atlético et Rosengård. Elle est aussi capable de sortir le lance-roquettes, comme pour réduire à néant les derniers espoirs romains en quarts de finale. Tout ça avec un degré de décontraction déconcertant. Le fruit d’un gros travail sur elle-même.
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— DAZN Football (@DAZNFootball) March 29, 2023
Carrefour, aiguille et scorpion
Inscrite dans un club de futsal, où elle jouait ailière, León a vu son destin prendre une tournure particulière dans un supermarché Carrefour, où elle a rencontré le directeur sportif du Club Deportivo Transportes Alcaine. « J’avais 12 ans. Mes parents faisaient des courses et je jouais dans une allée avec mon frère autour d’un chariot, retraçait-elle pour le quotidien Heraldo. David Magaña s’est approché de nous. Il nous a parlé, à mes parents et à moi, et nous a dit que je pouvais faire un essai avec eux si je le voulais. » Banco. La petite Mapi fait ses classes à Saragosse, jusqu’à débuter en première division à l’âge de 16 ans, face au Barça, avec des crampons qui n’étaient pas les siens. « J’avais laissé mes chaussures à la maison ! Mon Dieu… Sara Sanaú m’en a prêté. Imaginez à quel point j’étais nerveuse ! » La gestion de ses émotions reste d’ailleurs un gros chantier quand elle passe à l’Espanyol, puis à l’Atlético de Madrid, où elle pleurait parfois à la mi-temps : « C’était de la frustration parce que je ne savais pas comment faire si je manquais quatre contrôles, cela me rendait anxieuse. J’ai commis des erreurs, j’ai pleuré et j’ai appris. Maintenant, quand je rate, je redemande le ballon. C’est un travail que l’on fait au fil des ans, avec l’expérience. »
Et en trouvant une échappatoire, dans le dessin. Elle a d’ailleurs refusé une école d’art pour se concentrer sur le football. Parmi les nombreux tatouages qui ornent son corps figure ainsi un crayon à papier, mais aussi un lion, une clé anglaise (car son père est mécanicien), un scorpion (le signe astrologique de sa mère), une boussole, une tasse de café, etc. Elle pratique elle-même, dans le salon de tatouage d’une amie. Parfois directement sur sa propre peau. « Le premier tatouage que je me suis fait, c’est une rose. Je ne l’ai pas très bien réussi, mais peu importe, confiait à El Pais celle qui a refusé une école d’art pour se concentrer sur le football. Beaucoup de gens me disent de m’entraîner sur une peau de porc… On dit que c’est similaire à cause de l’épaisseur de la peau, mais quand on enfonce l’aiguille, on ne sait pas si ça fait mal ou si on va trop loin. C’est pour ça que de temps en temps, je m’entraîne sur ma main. » Elle songe d’ailleurs à consacrer sa prochaine vie aux tattoos, en témoigne son entretien avec Panenka il y a deux ans : « J’adorerais avoir un studio et être la patronne ! » Comme sur le terrain.
Par Quentin Ballue