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Le destin tragique de Zaki Anwari, mort en voulant quitter l’Afghanistan
Les images, hélas, ont déjà été vues par tous. Alors qu’un Boeing C-17 décolle de Kaboul, deux corps tombent en plein vol. Zaki Anwari fait partie de ceux qui sont morts en voulant quitter l’Afghanistan. Depuis ses douze ans, il portait les couleurs de l’équipe nationale, et voulait à tout prix continuer de jouer au football.
Continuer à rêver peu importe les conséquences, c’est tout ce que souhaitait Zaki Anwari. Mais pour ce jeune footballeur afghan, l’histoire s’est conclue de manière tragique. Ce lundi 16 août, alors que les foules de Kaboul se ruaient sur le tarmac pour suivre les avions militaires des États-Unis sur le départ, il s’est accroché. Par tous les moyens, il voulait quitter son pays. Un ami proche qui vit en Angleterre nous confie : « Il m’avait demandé de parler à mon père pour qu’il me rejoigne en Angleterre, mais c’était impossible. Après il voulait aller aux États-Unis. Il voulait partir. » Mais il a logiquement et malheureusement fini par céder, avant de s’échouer sur le sol de la capitale afghane, laissant tous ses proches et le monde du sport en deuil.
Numéro 10 des U12 aux U16 Afghans
La Direction générale de l’éducation physique et sportive du pays parle d’un jeune parmi « des centaines d’autres qui voulaient quitter le pays ». Lui qui portait le maillot de l’équipe afghane depuis ses douze ans a tout de suite compris que la carrière dont il rêvait allait partir en fumée. Lorsque les Talibans étaient au pouvoir entre 1994 et 2001, la pratique du football de haut niveau était interdite, et l’équipe nationale ne jouait pas. Inimaginable pour lui, dont la fierté était de porter le maillot national. « On jouait ensemble dans la même équipe il y a cinq ans, en U12 de l’Afghanistan, poursuit son ami. Il jouait pour l’équipe nationale depuis longtemps, jusqu’aux U16. » Attaquant floqué du numéro dix, Zaki Anwari n’a pas joué pour les U20 Afghans comme on a pu le lire ici et là. Né en 2004, il avait en réalité dix-sept ans, non pas dix-neuf.
Fan du Barça, il étudiait le français
En parallèle de la pratique de sa passion et du suivi du FC Barcelone, son club favori, il étudiait à Kaboul, au lycée Esteghlal. Un lycée où il apprenait le français. Logique vu l’histoire de l’établissement, qui a toujours été un trait d’union symbolique entre Afghanistan et France. Quand Georges Pompidou, alors Premier ministre, est venu poser la première pierre du chantier en 1968 lors d’un voyage à Kaboul, c’était un des premiers lycées français de la ville. Détruit entre temps par les Talibans, il a pu renaître dès 2002, en gardant son héritage français. Contacté par le New York Times, Aref Peyman, chef des relations médias des fédérations sportives afghanes et du comité olympique local, dépeint un garçon « gentil et patient. Il venait d’une famille pauvre de Kaboul et a travaillé pour atteindre son rêve de jouer pour l’équipe nationale tout en étant étudiant. Il n’avait aucun espoir et voulait une meilleure vie. »
D’autres, comme Kamia Yousufi, sprinteur et porte-drapeau afghan lors des Jeux Olympiques de Tokyo, ont eu la chance de s’en sortir. Par peur, l’athlète a pris la direction de l’Iran. Zaki, lui, n’a pu atterrir au Qatar, où se dirigeait le Boeing C-17 auquel il avait tenté de s’accrocher. « Que son âme repose en paix et que l’on se souvienne de lui », espère l’entraîneur adjoint de la sélection Ali Askar Lali, d’après les propos relayés par le quotidien espagnol AS. « Celui que tu es en train de devenir est bien plus important que celui que tu étais », écrivait Zaki Anwari le 24 juin sur son compte Instagram. Le triste symbole qu’il est devenu permettra au jeune homme qu’il était de demeurer à tout jamais.
Par Emile Gillet