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Le danger du numéro 9 bis à l’OM
Véritable dilemme pour Bielsa, qui n'a pas de place pour deux avants-centres dans son système, Batshuayi doit faire avec un Gignac qui est indispensable et une réputation de « Monsieur efficace » à garder coûte que coûte.
Alors que c’est dans ses habitudes, Marcelo Bielsa n’a pas donné la veille son onze pour le match contre Lorient. Avec trois matchs en 10 jours (Nantes, Lorient, Metz) et les forfaits déjà entérinés d’André Ayew et Alessandrini, il ne mettra sûrement pas le même onze trois fois d’affilée. Pour autant, certains joueurs peuvent déjà se projeter sans mal sur le coup d’envoi au stade du Moustoir. La colonne vertébrale, composée de Mandanda, Nkoulou, Imbula, Payet et bien sûr Gignac. Vendredi soir contre Nantes, l’avant-centre n’a pas marqué. Mais son remplaçant attitré, Batshuayi, n’a pas joué une minute pour autant. Ce n’était pas une sanction, mais le coach argentin n’avait droit qu’à 3 changements et il a préféré récompenser Alessandrini, Romao et Aloé, sorti « malgré eux » du onze de départ.
Bielsa : « La difficulté ? Trouver une commodité pour celui qui fait des concessions et qui abandonnne son poste »
Batshuayi a pourtant marqué pour le seul match où il a été titulaire. Il a planté une nouvelle fois en fin de partie contre Bordeaux. Avant la réception des Canaris, de nombreux supporters se sont mis à espérer une association du Belge avec le buteur maison. Après tout, dans le domaine offensif, Alessandrini et Ayew étaient incertains, et Thauvin pas au top de sa forme. Mais Bielsa ne voit en cette solution que du bricolage en cours de match, alors pourtant qu’il avait estimé que la défaite à Lyon était de sa faute, parce que, justement, il n’avait pas su comment les associer tôt dans la partie. Pour l’Argentin, leur association n’est pas satisfaisante : « La difficulté, c’est qu’il faudrait faire sortir un des deux de sa position naturelle. Celui que j’enlèverai de sa position naturelle jouera moins bien que lorsqu’il le fait dans sa position naturelle. Quand deux numéros neuf jouent ensemble, un des deux descend ou va sur les côtés pour ne pas être de trop au même endroit, donc celui qui va descendre ou aller sur le côté va moins bien jouer, parce que sa meilleure position, c’est au centre de l’attaque et près du but adverse. Mais dans certaines occasions, même si l’un des deux joue moins bien, la somme des deux peut améliorer le rendement de l’équipe. La difficulté, c’est de trouver une certaine commodité pour celui qui fait des concessions et qui abandonne son poste. » Un problème que Bielsa prend très au sérieux. Car il l’a concédé d’ailleurs dans la foulée. Cette fameuse concurrence entre deux numéros 9 a amené le plus grand échec de sa carrière : l’échec au Mondial 2002 avec la sélection albiceleste. Car Bielsa a un système, un seul. Ce fameux 3-3-1-3. À l’époque, il régale la planète foot et place la sélection de Veron comme ultra-favorite du Mondial avec la France, et ce, même s’ils sont dans le groupe de la mort avec le Nigeria, la Suède et l’Angleterre. Mais Batistuta, son numéro 9, est jugé vieillissant, alors qu’Hernán Crespo s’est montré excellent quand il a eu sa chance. Pour le dernier match de poule, alors qu’il faut absolument gagner contre la Suède, il remplace les deux hommes au lieu de les associer, se faisant descendre en flèche dans le pays avant d’aller se cloîtrer dans un monastère…
De Balotelli à Jordan Ayew
À Marseille, il voit bien que Batshuayi n’a pas un super moral. Alors il fait tout pour que la situation ne dégénère pas. Le jeune attaquant a droit à des ateliers spécifiques, des oppositions les lendemains de match… Alors qu’il était décrit comme le Balotelli flamand à son arrivée, Michy gère étonnamment bien la situation. Il faut dire que le temps joue pour lui : Gignac en fin de contrat en 2015, il pourra prendre sa succession à la pointe de l’attaque avec la fameuse année d’apprentissage marseillaise déjà digérée. Mais le Belge est lucide, il sait que c’est tout sauf une situation de confort : s’il ne répond pas aux attentes au moment où on fait appel à lui, dans une équipe comme l’OM où l’exigence avec le numéro 9 est une règle d’or, il va vite entrer dans une spirale négative où la crise de confiance relaie celle de l’inefficacité. Le match à Lorient sera pour lui une formidable occasion de s’en convaincre : en attaque, en face, se trouve Jordan Ayew, la précédente victime de ce poste de « numéro 9 bis » .
Par Romain Canuti