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Le CNOSF préfère le Bordeaux
Le CNOSF aimerait donc que la descente aux enfers des Girondins de Bordeaux s'arrête pour le moment en Ligue 2. Du moins à en croire les nombreuses fuites provenant du club et qui alimentent les médias aujourd'hui. Si le monde du football gardera le dernier mot, cette prise de positon va forcément peser et pourrait faire office de précédent périlleux pour la DNCG et la FFF lorsque des cas de figure similaires se représenteront inévitablement.
La direction des Girondins a-t-elle finalement eu raison de pousser jusqu’au bout toutes les procédures à sa disposition ? La présentation devant le CNOSF (Comité national olympique et sportif français) d’un dossier « renforcé » (réduction de 75% de la dette, 24 millions d’euros sous séquestres, etc.) constituait malgré tout la dernière carte crédible, y compris en matière de calendrier, pour sauver l’essentiel, c’est-à-dire une place en Ligue 2. Certes, ce recours arrive après l’homologation par le tribunal de commerce de la ville d’un nouvel accord avec les créanciers, une validation juridique qui avait redonné un peu d’espoir à Gérard Lopez. L’avis favorable du CNOSF n’est évidemment que consultatif, mais il sera difficile pour le Comex (comité exécutif) de la FFF de l’ignorer, surtout qu’il arrive accompagné d’une mobilisation populaire et des élus. Ces derniers ont même interpellé directement Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports qui a préféré jouer la montre : « L’État n’est pas légitime à intervenir dans le traitement de ce dossier, qui répond à un cadre juridique précis. Je serai vigilante au respect des procédures, confiante dans la faculté des instances sportives et en particulier ici de la Conférence des conciliateurs du CNOSF de permettre une conciliation, dès sa saisine, dans les plus brefs délais. » Tout reposait finalement sur les épaules du CNOSF. Il n’a apparemment pas choisi la facilité.
Pression politique ?
Personne ne veut douter naturellement de l’indépendance de l’institution hautement respectable qu’est le CNOSF. Par sa fonction représentative, elle s’avère toutefois forcément sensible aux préoccupations du champ politique, y compris au sein de l’Agence nationale du sport. De fait, ses fédérations membres composent sans cesse avec des collectivités territoriales et leurs élus, principaux financeurs. L’union sacrée, sauf des exceptions tel Philippe Poutou, autour de la sauvegarde d’un patrimoine, y compris économique, résonne donc différemment et plus fortement entre les murs du siège olympique tricolore collé au stade Charléty.
Contrairement à une idée reçue, le CNOSF se retrouve régulièrement sollicité pour arbitrer ou du moins fournir un avis sur les petits problèmes du foot français, des modalités d’élection au sein de la Ligue de La Réunion en 2016 au point de retrait infligé à l’OM après le match contre Angers. Il lui arrive très rarement de contredire les décisions de la fédération, comme doivent s’en souvenir les Bastiais lors de leur relégation en National 1 en 2017. De même, Luzenac n’avait pas pu vraiment compter sur le soutien du CNOSF pour imposer sa montée en Ligue 2 pourtant gagné sur le terrain. Parmi les exceptions qui devraient éclairer celle en faveur des Girondins, la stratégie payante du RC Lens qui avait réussi, grâce a un avis en sa faveur du CNOSF, à retourner la décision initiale de la DNCG le privant de Ligue 1 en 2014.
Il s’agissait cependant d’un pari en positif sur le retour dans l’élite d’un club phare et historique. L’affaire bordelaise marquerait une petite rupture. L’esprit comptable du gendarme financier du foot pro aurait en quelque sorte cédé devant des logiques « extérieures » . Le principal danger demeure de voire naître un sentiment d’injustice, une sorte de « deux poids deux mesure » plus ou moins assumé de la justice sportive, qui sera parfois difficile à justifier, hormis à créer une catégorie de clubs intouchables… Pour mémoire, en 2011, la FFF n’avait pas écouté l’appel à l’indulgence du CNOSF pour le Racing Club de Strasbourg, qui s’était retrouvé en CFA2.
Par Nicolas Kssis-Martov