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Le cimetière des Éléphants

Par Florian Cadu
4 minutes
Le cimetière des Éléphants

Alors qu’ils faisaient figure de grands favoris, les Ivoiriens ont chuté dès le premier tour d’une Coupe d'Afrique des nations dont ils étaient les champions en titre. Une sortie prématurée qu’ils ne doivent qu’à eux-mêmes et leur mental défaillant. Et qui devrait les faire grandir

Il y eut d’abord le Gabon de Pierre-Emerick Aubameyang, organisateur de l’épreuve. Puis l’Algérie de Riyad Mahrez, hypedu football africain. Et enfin, la Côte d’Ivoire de Serge Aurier, championne en titre. Le point commun entre ces trois équipes ? Elles étaient censées faire partie des prétendants à la victoire finale de la Coupe d’Afrique des nations 2017 et n’ont finalement même pas passé le premier tour, incapables d’obtenir ne serait-ce qu’une petite victoire. Au sein du trio, ce sont sans doute les Éléphants qui ont le plus surpris. Dans le mauvais sens du terme.

Car avec un effectif de qualité, abandonné par Yaya Touré, mais censé savoir résister à la pression, les Ivoiriens auraient dû faire mieux. Beaucoup mieux. Muni d’Aurier, Éric Bailly, Wilfried Bony, Wilfried Zaha ou encore Salomon Kalou, qui ont tous connu les intimidations présentes dans les grands clubs mondiaux (Paris Saint-Germain, Manchester United, Manchester City, Chelsea…), le double vainqueur de la CAN a craqué dans sa tête. Qu’on ne vienne pas dire que cette équipe était intrinsèquement inférieure au Togo, au Maroc ou au Congo. Non : le talent, elle l’avait, et elle le possède toujours. Seulement, elle n’a jamais réussi à s’en servir.

Tremblements marocains

La dernière bataille contre le Maroc, justement, offre une bonne image de l’état psychologique des Ivoiriens. Après avoir manqué d’audace et de folie lors de la première journée face au Togo, après s’être montrés trop naïfs et trop inefficaces face au Congo lors de la deuxième, les hommes de Michel Dussuyer se sont encore tiré une balle dans le pied. Bien conscients que ce duel constituait leur dernière chance, trop sans doute, ils ont toujours paru jouer avec un boulet accroché à leurs jambes. « N’ayons pas peur d’attaquer ! » avait imploré Kalou (peut-être le seul au niveau et d’ailleurs élu homme du match) avant la rencontre dans les colonnes de L’Équipe.

Résultat : trois malheureux tirs cadrés, une possession totalement stérile (67%), un poteau concédé et un but encaissé. Oh, les Lions de l’Atlas ne sont pas fous, eux qui ont parfaitement joué le coup. Sachant pertinemment qu’un match nul les qualifiait presque à coup sûr, ils ont eu la bonne idée de jouer sur les nerfs de leurs adversaires. Chaque minute s’écoulait en leur faveur, et chaque seconde supplémentaire rendait le concurrent plus friable. Pas un hasard si les Marocains ont marqué sur leur seul tir cadré, peu avant l’heure de jeu.

Les fleurs de demain

Si tout le monde s’étonne aujourd’hui de la sortie de piste soudaine des Ivoiriens, cela pouvait pourtant s’anticiper. C’est en effet peu dire que le groupe n’a pas bien appréhendé les efforts que nécessitait une CAN. Souvent très homogènes entre elles, les nations gagnent sur des détails, plus que dans un autre tournoi, comme le montre le nombre incroyable de finales achevées aux tirs au but (huit sur les dix-huit précédentes éditions, cinq sur les neufs dernières !). « Nous avons un groupe jeune qui n’avait pas compris les réalités d’une CAN, a carrément balancé Kalou, lucide, avant même l’élimination. Les gars ont pensé que ce serait des matchs comme les autres, mais ce n’est pas le cas. Ils ont vu la difficulté de cette compétition, les conditions sont différentes, les hôtels, les pelouses… Dans une CAN, ce ne sont pas nécessairement les meilleurs qui gagnent. En 2008, nous étions bien supérieurs à l’équipe de 2015 et on a fini quatrièmes. »

Dégoûté, ce même Kalou a d’ailleurs officialisé sa retraite internationale dans la foulée de la déception. « J’ai fait une finale et j’en ai gagné une autre. Là, cela ne s’est pas bien passé, a-t-il indiqué à la presse.Il y a des jeunes comme Kessié, Zaha… Je pense qu’ils sont le futur du football ivoirien. Je leur souhaite bonne chance. » Ce futur, le sélectionneur Dussuyer ne devrait pas en faire partie. Mais là n’est pas l’important, au fond. L’essentiel reste que les Éléphants présents au Gabon, ceux-là même qu’on reverra encore de nombreuses années, aient appris dans l’échec. Parce que tous les cimetières sont destinés à faire des jardins.

Dans cet article :
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