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Le Chili contre vents et marées
8 novembre 2011, alors que le Chili se prépare à affronter l’Uruguay en éliminatoires de la Coupe du monde 2014, 5 joueurs rentrent bourrés comme des cartables au centre Pinto Durán, lieu de rassemblement de la sélection. En cause, le baptême trop arrosé de la fille du mago Valdivia, milieu offensif de la Roja. Les autres coupables se nomment Arturo Vidal, Jean Beausejour, Gonzalo Jara et Carlos Carmona. Esclandre au pays, d’autant que la télévision locale, grosse consommatrice de scandales, fait tourner en boucle une vidéo amateur où l’on voit Valdivia, habitué de la rubrique faits divers, chuter sur la piste de danse visiblement saoul comme toute la Pologne.
Amende honorable
Les sanctions seront lourdes, les joueurs condamnés à 10 matchs de suspension sous la tunique nationale. L’escapade éthylique rapidement baptisée Bautizazo (scandale du baptême) coutera également cher à la sélection, puisque les hommes de Claudio Borghi encaisseront un très lourd 4-0 à Montevideo. La pire des doubles peines, en somme. Pour autant, malgré sa déroute uruguayenne, la sélection se relève et tape le Paraguay 2-0, avant d’obtenir 2 victoires probantes en Bolivie et au Venezuela. Des performances méritantes qui permettent au Chili de choper le bon wagon et d’occuper les premières places du classement en compagnie des bons élèves argentins et uruguayens. Tant pis pour les mutins.
10 mois plus tard, les coupables ont fait amende honorable et se sont largement expliqués en conférence de presse, à l’image de Jean Beausejour : « C’est une erreur extrêmement grave, ceux qui me connaissent savent à quel point j’ai honte et je regrette. » Un mea culpa public qui leur a permis d’obtenir une réduction de leur sanction. Seul le délicieux Valdivia, sans doute passé à côté d’une grande carrière à cause de son penchant pour les nuits folles, ne revêtira plus le maillot rouge. Pour le reste, Gonzalo Jara et l’indispensable Arturo Vidal effectueront leur retour face à la Colombie, et seule une blessure a empêché Beausejour d’en faire de même.
Le Bedonnant
Pourtant, la sélection continue de trimbaler son lot de scandales. Quelques jours avant le match contre le Venezuela, en mai dernier, Gary Medel et le Napolitain Vargas sont surpris à l’aube à la sortie d’une discothèque de Santiago. Les deux joueurs sont immédiatement mis à l’écart de la sélection sans toutefois recevoir de sanction à long terme. Sans doute parce que le Sévillan Medel est l’aboyeur indispensable de la sélection et que Borghi a voulu s’épargner un nouveau casse-tête au moment de poser le nom de ses titulaires sur le tableau noir.
Malgré tout, l’ancien entraîneur de Colo-Colo ne dispose pas forcément des meilleures conditions pour composer son équipe. Dernière affaire en date, le conflit opposant l’Argentin à son compatriote Sampaoli qui entraîne la U de Chile. Depuis deux ans, l’équipe universitaire survole le football chilien et fournit le gros du contingent local de la Roja. Une position dominante dont la formation de Santiago use et abuse en libérant ses joueurs alors que la sélection est déjà rassemblée. Sauf que le guaton (bedonnant, en VF) Borghi, excédé par la situation, a voulu taper du poing sur la table en excluant les joueurs de la U de sa liste. Une décision qui a eu le mérite de faire revenir le club azul sur sa décision initiale. Une tempête dans un verre d’eau donc, mais une tempête symptomatique de l’état mi-figue mi-raisin du football chilien.
La fine bouche
Au vrai, Santiago est mélancolique du règne de Marcelo Bielsa. En 3 ans passés à la tête de la Roja, le Loco avait su redonné du souffle à la sélection tout en lui imposant une vraie discipline de jeu. À la clé, la première qualification du pays en Coupe du monde depuis 1998 et la gloire éternelle pour San Marcelo. Difficile de succéder à une telle icône. Avant Bielsa, avec un bilan de 4 victoires et 2 défaites en 6 matchs, Borghi aurait été considéré comme un génie, désormais le Chili fait la fine bouche et considère à peine le guaton comme un technicien valable.
L’Argentin doit également faire face aux critiques de Sampaoli et de Manuel Pellegrini, qui se verrait bien un jour calife à la place du calife. Même les joueurs ont du mal à suivre leur sélectionneur. Arturo Vidal, qui jouera en défense centrale demain, a confié son incompréhension face à la décision de son coach de le faire jouer à ce poste alors qu’il excelle en tant que milieu de terrain avec la Juventus. Pourtant, le football chilien ne va pas si mal. La génération dorée des Vidal, Medel, Fernandez ou Sanchez arrive à maturité et, en cas de victoire face à la Colombie, le Chili pourrait s’envoler en compagnie de l’Argentine en tête de la zone Amsud. Et si, finalement, l’essentiel n’était pas là ?
Par Arthur Jeanne