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Le boulet des stades de l’Euro 2016

Par Nicolas Kssis-Martov
Le boulet des stades de l’Euro 2016

Après le naufrage sud-africain des Bleus, le bus de Knysna, la déprime du foot amateur et les remous autour du maintien de Laurent Blanc à la tête de la sélection nationale, voici que les futurs -ou avortés- stades de l'Euro ne cessent d'alimenter l'actualité, de Lens à Lille, en passant par Lyon et Bordeaux, de batailles politiques en affaires judiciaires. Et si les infrastructures de 2016 devenaient le nouveau cauchemar du foot français?

Le maire de Décines vient de signer le permis de construire d’OL Land, malgré la résistance de nombre de ses administrés – l’association « Carton Rouge » promet un déluge de recours -, et pour le plus grand bonheur de Jean-Michel Aulas, qui commence à voir la fin de son tunnel de procédures administratives et de lobbiying législatif. Pourtant, bien qu’officiellement entièrement pris en charge par le privé, ce « chef d’œuvre architectural » impliquera malgré tout, au bas mot, 168 millions d’euros en cadeaux de la part des collectivités (le député UMP Philippe Meunier évoque de son coté de près de 300 millions). Ce sont justement ces dépenses ne profitant, quoi qu’on en dise, qu’aux pros, qui commencent à faire grincer des dents dans les conseils municipaux et généraux. Qu’importe les couleurs politiques d’ailleurs : ainsi, la ville de Nancy -droite- s’étant retirée, son maire André Rossinot, agacé par les exigences des partenaires du BTP, ce fut Dijon, dirigé par François Rebsamen, le Monsieur sécurité de François Hollande, qui s’était précipité pour prendre la relève, en vain… L’électeur est donc de la sorte passé du simple rôle d’ « amoureux du ballon » à celui, plus complexe, de contribuable anxieux. De quoi ressortir la calculette à quelques mois des échéances électorales.

En effet, après la douloureuse réforme territoriale, dont les conséquences négatives sur les finances des villes et des départements, voire des régions, sont dopées par la crise, ces centaines de millions d’euros déversés dans le gazon et le béton (et les tribunes VIP) s’avèrent de plus en durs à défendre. Au passage, au nom de l’État, qui a dépouillé de 168 millions le CNDS, sensé aider le sport de masse, David Douillet a également fini par se livrer à un surprenant méa culpa : « Le monde du football perçoit des droits TV très élevés et l’état n’aurait pas dû avoir besoin de participer à la construction et à la rénovation des stades. Ce milieu aurait dû être plus mature et avoir ce bon sens d’investir dans son outil de travail » . Des regrets bien tardifs et sans conséquence, après le vote par la majorité d’une loi ad hoc dérogative pour les collectivités.

A Marseille, la facture explose

A Bordeaux, de nombreux élus d’opposition s’interrogent surtout sur le coût exact du stade, et remettent en cause les projections optimistes de la mairie (en tout 184,4 millions contre 551 pour l’association Trans-Club). De son coté, la ville (à droite) s’en prend au Conseil Général de Gironde, de gauche, qui a refusé de débourser le moindre sous, arguant qu’il subventionne au niveau des taxes qu’il va toucher avec les travaux. Il faut dire que la municipalité, de son coté, refile déjà par contrat à Vinci—Fayat les taxes dues par le constrcuteur-exploitant; environ 80 millions sur trente ans. A Marseille, la facture a sauté de 150 à 273 millions (dont 173 millions d’euros pour la ville seule).

Une envolée désagréable dans une métropole qui manque cruellement d’infrastructures scolaires et autres équipements du sport de masse. Ce qui n’en finit pas d’alimenter les rumeurs et les aigreurs… Le lissage sur une longue durée, avec des prêts sur 30 a 40 ans, ne suffit plus à cacher le poids sur les finances publiques. Car dans le PPP (Partenariat Privé Public), le privé se contente souvent d’emprunter à la place d’une collectivité qui rembourse à des taux supérieurs à ce qu’elle aurait pu obtenir (sans compter les petits frais de dossiers rajoutés). Soit 6,5% au lieu de 3,5% dans le cas du Vélodrome, pour le plus grand bonheur de Bouygues.

Deux tiers, un tiers

Traditionnellement, en France, les stades relèvent de la puissance publique – les clubs français, contrairement à certains de nos voisins, s’endettent rarement pour pour les acquérir, ce qui explique au passage l’apparente sagesse de la L1 -, au point que comme à Nantes, son retrait est vécu comme une rupture de contrat méritant un procès. En gros, pour l’Euro, nous sommes toujours à une répartition d’un tiers pour le privé et deux tiers pour le public. Or la signification de cet héritage historique prend désormais une toute autre valeur stratégique. Il s’agit du seul espace dans lequel les élus et les politiques peuvent encore peser véritablement sur la vie du foot français, ce qui s’avère autrement plus décisif qu’en adoptant des lois sur l’éthique sportive vides de sens. De quoi aiguiser tous les appétits dans les groupes d’opposition. La relation entre le BTP et les partis n’étant pas la moindre des zones d’ombres planant sur les coupoles toutes neuves…

Les démêlés judiciaires de Gervais Martel ou les possibles ramifications de l’affaire du Carlton de Lille laissent supposer qu’il ne faut pas seulement pister les risques de corruption du coté des mafias de l’Est ou d’Asie. Reste à savoir ce que vont en dire les candidats de gauche en campagne présidentielle et dont les « orgas » gèrent la plupart des collectivité territoriales et des mairies concernées. Les Verts se sont souvent fait une spécialité de tacler leur propre majorité sur le sujet alors que la droite reste sans surprise très discrète à ce sujet. Le camp de Mélenchon tient ce soir une conférence de presse pour lancer son Front de Gauche du Sport et François Hollande est attendu à Créteil le 11 pour rencontrer l’ensemble des acteurs du sport français. Un peu de réconfort, même si le mal est déjà fait ?

Olise, Mbappé, Konaté, mais aussi Théophile-Catherine : les Français sur tous les fronts

Par Nicolas Kssis-Martov

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