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- Levante-Betis (2-4)
Le Betis séduit
Vainqueur de Levante ce dimanche (2-4), le Betis poursuit sa folle course en haut de tableau. Confortablement installés au troisième rang d’une Liga extrêmement serrée, les Verdiblancos entrevoient doucement le rêve d’une qualification en Ligue des champions. Retour sur un club en pleine forme, guidé par Manuel Pellegrini et Nabil Fekir.
Qui aurait pu imaginer cela, à peine deux ans en arrière ? À l’orée de l’année 2020, le Betis arrachait un maintien poussif au terme d’une campagne achevée en quinzième position l’ayant vu griller deux entraîneurs : Rubi et Alexis Trujillo, alors intérimaire. Quelques mois plus tard, voilà les Vert et Blanc tout en haut de la pyramide Liga. Grâce à l’honorable Manuel Pellegrini, au beau jeu, à certains hommes de base et à un Nabil Fekir retrouvé.
La marche du Fekir
S’imposer comme un élément essentiel, quand le niveau supposé du club ne joue pas en sa faveur et que les blessures à répétition pourrissent une belle progression : Nabil Fekir y est parvenu. Double buteur ce dimanche après-midi sur la pelouse de Levante (2-4), l’international français a une nouvelle fois apposé sa patte sur le succès du Betis. Auteur de neuf buts et sept passes décisives en championnat, l’ex de Ligue 1 n’a jamais semblé aussi prépondérant depuis son départ de l’OL. Et pour cause : totalement libre dans sa position de meneur de jeu, le numéro 8 s’est mué en véritable chef d’orchestre au service d’une formation dont il a appris à maîtriser les rouages et aboutir à une résultante vite simplifiée. Sur ses 29 parties disputées cette saison, Fekir en aura effectivement démarré l’intégralité dans ce rôle d’électron libre. Mieux : en élargissant la focale et depuis l’arrivée de Manuel Pellegrini (67 matchs), l’ancien Lyonnais n’a été aligné qu’à six reprises dans un rôle de joueur de couloir ou d’avant-centre.
Des chiffres bruts et théoriques, qui traduisent néanmoins la liberté laissée au joueur de 28 ans tacitement « autorisé » à ne pas faire les efforts défensifs et soutenu jusqu’en conférence de presse par son entraîneur-protecteur : « C’est une honte de voir comment les arbitres traitent Nabil, s’émouvait en effet Pellegrini au sortir d’une défaite à Bilbao (3-2), le 19 décembre dernier. Il subit dix, quinze fautes par match ! Ce type de joueur doit être protégé par tout le monde, il n’est pas traité de la même manière que les autres ! » Un avis tranché, mettant en lumière la dimension prise et assumée par Fekir, longtemps jugé pour son choix de carrière et dont beaucoup enterraient sa capacité à revenir au plus haut niveau. Patient, ce dernier a donc su faire du temps son allié. Une donnée favorable pour faire fi des nombreuses critiques, rencontrer le technicien adéquat, s’associer à un joyau longtemps méprisé en la personne de Sergio Canales, et trouver son rythme de croisière au sein d’une institution qui ne demandait qu’à retrouver les sommets. Cent une rencontres et une prolongation de contrat plus tard, voilà Nabil Fekir définitivement installé dans les cœurs beticos et dans les fondations du Benito Villamarín.
Comme un air de 2005 ?
L’envergure « fekirienne » , si elle est indéniable, ne saurait malgré tout se dissocier du savoir-faire de Manuel Pellegrini. Car la rencontre liant le technicien au Betis a tout du destin croisé. Celui qui a vu un bâtisseur transformer en château le moindre grain de sable croisé sur sa route. Ce même destin qui avait permis au technicien chilien de faire entrer Villarreal, club de village, dans le panthéon du football européen. C’était en 2005, et l’ancien de River Plate remettait alors sur pied un effectif en manque de confiance où se bousculait pléthore de talents déconsidérés ou revanchards : Juan Román Riquelme, Diego Forlán, Pepe Reina, Juan Pablo Sorín, Marcos Senna, Luciano Figueroa, José Mari et le jeune Santiago Cazorla. Bousculant la hiérarchie, le Submarino Amarillo accrochera la troisième place du classement, découvrira la Ligue des champions dès la saison suivante et y atteindra les demi-finales. Rien que ça. Dix-sept ans plus tard, et après être également parvenu à emmener Málaga en quarts de C1, force est ainsi de constater qu’El Inginiero est reparti à la quête d’une nouvelle success story. Débarqué en Andalousie à l’été 2020 et chargé de redresser une équipe en berne, ce dernier a rapidement entamé sa rénovation.
Spécificité du maître d’œuvre, le 4-2-3-1 n’a pas tardé à prendre forme et à séduire, porté par un quatuor de joueurs résolument et exclusivement tourné vers l’offensive. Une volonté de poursuivre le chantier préalablement lancé par Quique Setién, appuyé par une rotation toujours plus ouverte et des joueurs à la relance. Longtemps boudés, des éléments tels que Juanmi (actuel deuxième meilleur buteur de Liga, avec douze réalisations), William Carvalho, Cristian Tello ou le « Panda » Borja Iglesias (facturant déjà treize pions, toutes compétitions confondues) ont regagné une confiance absolue. Pas étonnant, finalement, pour une formation n’ayant que très peu changé depuis deux saisons. Favorisée par l’implication du club sur trois tableaux (Liga, Coupe du Roi et Ligue Europa), cette projection place donc les curseurs très haut. De quoi remettre le Betis sous les feux des projecteurs et voir Joaquín renouer avec la musique de la Ligue des champions, chez lui. La dernière fois, c’était en… 2005.
Par Adel Bentaha