- Italie
- 10 janvier 1999
- Lazio-Fiorentina (2-0)
Lazio-Fiorentina 1999, ou l’apogée d’une autre Serie A
Ce Lazio-Fiorentina du 10 janvier 1999 est un symbole de ce qu'était la Serie A à l'époque : le meilleur championnat du monde.
Putain, vingt ans. C’est sûrement avec cette première pensée que les tifosi laziali se sont levés ce matin, en repensant à la saison 1998-1999, et à cette double confrontation entre les hommes de Sven-Göran Eriksson et ceux de Giovanni Trapattoni. Lazio-Fiorentina. Le top du top de ce qui se fait à l’époque en Italie et en Europe. Deux sérieux candidats au titre. La première manche a lieu un dimanche 10 janvier, devant près de 55 000 spectateurs surchauffés au stadio Olimpico. En haut du classement, quatre équipes se tirent alors la bourre pour partir au soleil quatre mois plus tard avec la couronne suprême : la Fiorentina de Batistuta, leader depuis le début de la saison, Parme, la Lazio et le Milan.
« Des années sont passées, mais je me rappelle encore très bien que c’était une lutte acharnée avec eux » , souffle Giuseppe Pancaro, le latéral gauche romain de l’époque. « Contrairement à aujourd’hui où la Lazio joue pour se qualifier pour la Ligue des champions, nous, on jouait pour gagner le titre. Deux époques différentes, et deux équipes différentes. » Preuve que le temps est passé par là, et surtout d’un temps où les meilleurs joueurs du monde se répartissaient aux quatre coins de la Botte, de Ronaldo à Del Piero, en passant par Veron, Totti, Crespo, Zidane, Baggio, Weah, Rui Costa, Inzaghi, Maldini, Bierhoff, Montella, Nesta… L’époque des « sept sœurs » : Fiorentina, Lazio, Inter, Milan, Roma, Juventus et Parme.
Vieri, Salas et les autres
« Ah oui, je me rappelle un superbe but de Vieri… sur une talonnade de Salas, je crois ? » Pancaro ne trébuche pas au moment de se remémorer l’ouverture du score du Bison à la 66e minute de jeu, consécutive à un une-deux délicieux de la paire d’attaquants arrivée durant l’été. Ce que l’international italien aux dix-neuf sélections omet alors, c’est que quelques minutes avant l’ouverture du score de Vieri, il est totalement spectateur lorsque le Belge Luis Oliveira, binôme de Batigol, fracasse la transversale de Marchegiani juste devant ses yeux. La seule véritable opportunité qu’aura le leader ce soir-là, impuissant face à ce qui sera la meilleure défense du championnat avec 31 buts encaissés. « Avec Nesta, Mihajlović et Negro, il est vrai que nous formions une défense extrêmement forte. L’une des plus fortes où j’ai pu évoluer, avec celle de Milan composée de Maldini, Cafu et où j’ai retrouvé Alessandro (Nesta) » , rappelle Pancaro.
Le reste de la rencontre, c’est une succession de vagues ciel et blanc qui s’abat sur le rempart florentin qu’est Toldo, qui mettra donc une bonne heure avant de craquer une première fois. Avant d’assister, une minute avant le début du temps additionnel au deuxième jaune synonyme de rouge de Pasquale Padalino. Ainsi qu’au moment tant redouté où Siniša Mihajlović pose le cuir à trente-mètres de ses cages. Quelques semaines plus tôt, le Serbe avait claqué un triplé sur coup franc face à la Sampdoria. « Bon, on n’était pas sûr à 100% que Sinisa marque à chaque fois. Mais on savait qu’il y avait de grandes possibilités qu’il marque. Il en a mis tellement lors de son passage ici qu’on n’était pas surpris s’il la mettait au fond.(Rires.)C’était un grand spécialiste. » Une demi-douzaine de pas d’élan et une lourde de frappe du gauche plus tard feront se propager la liesse dans les travées de l’Olimpico. La Lazio vient d’enchaîner une cinquième victoire de rang, et de revenir à trois points du trône après un début de saison poussif, dû notamment aux absences de Nesta et Vieri.
Époque dorée
Un succès prestigieux, et qui reste dans les mémoires comme étant l’un des points culminants de l’ère Cragotti, l’ambitieux président du club romain. Après la rencontre, le dirigeant biancoceleste se laisse alors guider par ses rêves les plus fous : « Je pense que pour le titre, on a tout. J’y ai toujours cru, et comment ne pas y croire avec la fantastique équipe que nous avons : Vieri est un buteur de niveau mondial, Mancini est un génie, Nesta est le meilleur défenseur du monde, Mihajlović répond sur le terrain à ceux qui ne croyaient pas en lui. Maintenant, on ne doit pas perdre à Parme pour prolonger le rêve. »
Le souhait de Cragnotti sera exaucé, sa Lazio allant même s’imposer en terres parmesanes, ce qui lui permettra d’enchaîner sur une série colossale de dix-sept matchs sans défaite. « On avait conscience de bien jouer, car on avait aussi des joueurs d’excellente facture. Quand on fait un tour rapide du onze de départ ce jour-là, on peut y voir Vieri, Salas, Mihajlović, Mancini, Conceição… Forcément, lorsque tu as des mecs de ce niveau-là à tes côtés, ça te permet d’élever ton niveau de jeu et de faire que, globalement, ton équipe joue un jeu de qualité. » Cette année-là, c’est pourtant au match retour, à l’Artemio Franchi de Florence, que la Lazio laissera échapper le Scudetto, la faute à un match nul lors de l’avant-dernière journée qui enverra Milan au septième ciel. « Je ne saurais pas dire si notre match aller contre la Fiorentina était notre meilleure prestation pendant mes années à la Lazio, car on faisait pas mal de bons matchs. Mais elle fait certainement partie des meilleures. » Suffisamment bonne en tout cas pour que vingt ans après, tous les amateurs de Serie A s’en souviennent encore avec nostalgie.
Par Andrea Chazy
Propos de GP recueillis par AC, ceux de Cragnotti par le Corriere dello Sport.