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L’autre Titi de la cage
Depuis une semaine, Thierry Henry avale tout : l’espace, les esprits, les écrits. Pour autant, le Strasbourg-Monaco de samedi soir est surtout un révélateur pour le Racing d'un Thierry Laurey qui ne doit pas être passé au second plan.
Le grand soir ? « Pour dire la vérité, l’arrivée de Thierry Henry ne m’évoque pas grand-chose… » Il n’y aurait finalement pas de grande différence entre Lionel Carole, latéral gauche d’un Racing neuvième de Ligue 1 et aux dents aiguisées par une série de deux succès consécutifs à la Meinau, et Novak Djokovic, récent vainqueur de son trente-deuxième Masters 1000 à Shanghai et proche de redevenir numéro un mondial de sa discipline : mercredi, alors que toute la France du foot avait les yeux tournés vers la présentation officielle de Thierry Henry au Yacht Club de Monaco, le Serbe, lui, a préféré profiter de son début d’après-midi sur le Rocher pour balader ses deux caniches. Un changement d’entraîneur sur le banc d’un club dix-huitième de Ligue 1 mérite-t-il vraiment d’arrêter le temps ? Pas sûr. Cette arrivée doit-elle modifier le ton d’un Strasbourg-Monaco ? Jonas Martin, qui sera suspendu pour la réception de l’ASM, l’affirme : « On joue avant tout contre Monaco, pas contre Thierry Henry. » Ce qu’a également balancé en avant-match l’entraîneur strasbourgeois, Thierry Laurey, avouant que le débarquement du coach puceau ne lui fait « ni chaud ni froid » . Et il faut le comprendre : cette histoire n’est, pour l’instant, qu’un murmure accentué, et un joli nom à ajouter au tableau de la Ligue 1. Pour le reste, on ne sait rien sur le système et les hommes qui composeront l’avenir monégasque, et ce Strasbourg-Monaco est avant tout un plongeon dans l’inconnu pour Henry.
Ce que sait Henry, c’est qu’il ne sait rien
Pour une raison simple : l’AS Monaco se pointe samedi en Alsace avec la tête en vrac, quatre défaites consécutives toutes compétitions confondues dans le sac et une seule victoire cette saison dans le rétro (le 11 août dernier, à Nantes, 1-3). Henry refuse alors de se planquer : « Strasbourg ? J’ai déjà joué à la Meinau et je sais que l’ambiance y est extraordinaire, ce ne sera pas évident. » C’était le 29 avril 1997, un jour où l’ASM était venue s’imposer sans trop trembler (0-2) grâce à Ikpeba et Anderson, et où Jean Tigana avait filé dix minutes de jeu à manger au jeune Thierry Henry. Rien d’incroyable, donc. Ce soir-là, pourtant, il y avait une différence : Monaco avait un gardien titulaire en forme (Barthez), filait tout droit vers son titre de champion de France et possédait une défense bourrée de confiance. Samedi soir, pour sa première, Henry en est là : le néo-technicien doit cuisiner selon mille absences (Geubbels, Lopes, Pellegri, Benaglio, N’Doram, Jemerson, Raggi, Subašić) et cherche avant tout à « soigner les têtes » . Ce que le Français sait donc, c’est qu’il ne sait rien – il ne demande qu’à découvrir – et qu’il doit pour le moment bricoler, point.
La France du savoir-faire
Pourtant, Thierry Henry avale tout : l’espace, les esprits, les écrits. Samedi soir, chacun analysera sa tenue, la moindre de ses prises de parole. Lui dit qu’il va « apprendre à se connaître » et il faut lui laisser le temps. Reste qu’à quelques mètres de l’ancien champion du monde, un homme se connaît parfaitement et connaît, surtout, plus que personne ses hommes : l’autre Titi de la cage, Thierry Laurey, donc. Braquer tous les objectifs sur Monaco, c’est oublier que l’ASM a samedi soir un adversaire de taille : un Racing en forme, flexible tactiquement, capable de faire sauter le moindre adversaire, notamment à la Meinau. Lyon, le PSG et même l’OM ont perdu des points là-bas la saison dernière, les deux premiers ont même perdu tout court. La clé de compréhension de la Laureymania est multiple : ce type sait qu’on ne trouve pas « des solutions en aboyant comme un abruti » , agit à la barre de son club comme un patron, un vrai, et est bien plus que le coach qu’on aime réduire aux petites phrases qu’on pourrait entendre au bord d’un comptoir de PMU. Laurey, c’est le foot à l’essence, celui qui impose un savoir-faire maison et qui s’y tient : ce samedi soir est une occasion parfaite pour que le Racing valide son bon début de saison et qu’il se teste. C’est le sens de l’apprentissage : un dépucelage se joue à deux, non ?
Par Maxime Brigand
Propos de Carole et Martin tirés des DNA.