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L’Atlético voit plus loin que son Cholo
Propriétaire de son nouveau stade depuis peu, l’Atlético de Madrid poursuit son évolution en interne, avec pour objectif de se pérenniser au plus haut niveau. Une volonté qui s’appuie autant sur le développement sportif qu’économique, et qui imagine un futur sans Diego Simeone.
Interdit de mercato par la FIFA, l’Atlético de Madrid dégaine tout de même son plus grand transfert de la saison en ce début mars. Mais cette fois, aucun joueur ne vient rejoindre l’escouade de Diego Simeone. Non, depuis ce lundi, les Colchoneros renforcent leur institution plus que leur effectif en devenant les seuls propriétaires du stade de la Peineta, leur fief à partir du prochain exercice, contre un chèque d’une trentaine de millions d’euros à l’ordre de la mairie de Madrid. En plus de résoudre de nombreux imbroglios concernant les travaux à réaliser autour du futur Wanda Metropolitano, cet achat permet à l’Atlético d’entrer dans le cercle sélect des clubs propriétaires de leur stade. À l’instar des omnipotents Real Madrid et FC Barcelone, le second club de la capitale espagnole espère dégager des bénéfices par millions grâce à cette acquisition. Surtout, l’achat de la Peineta fait partie d’un plan bien plus global de la direction madrilène, désireuse de s’installer définitivement parmi les géants du Vieux Continent. En plus du sportif, l’Atlético s’attelle à tenir la comparaison avec ses illustres concurrents sur le terrain économique.
Géants asiatiques, Bollaert et produit toxique
Depuis l’intronisation de Diego Simeone sur le banc du Vicente-Calderón, l’Atlético ne cesse de progresser. Cette évolution rectiligne permet autant au club de se défaire de son statut de schizophrène, que de remplir son armoire à trophées. De quoi rendre sa fierté au peuple rojiblanco qui ne jure plus que par son prophète argentin, principal responsable de ce retour au premier plan. Plus de cinq ans après cette arrivée du Cholo, la direction emmenée par Enrique Cerezo dresse un bilan reluisant, mais ne souhaite pas s’arrêter en si bon chemin. Car le problème qui se profile est de taille : comment réussir l’après-Simeone ? Alors que le principal intéressé ne cesse d’entretenir le flou sur son avenir – « Je peux très bien partir comme rester des années » –, le club se sait « otage » d’un coach dont l’emprise sur le domaine sportif est totale. Histoire de se préparer à un éventuel départ, l’institution castillane se doit donc de consolider ses flans pour réaliser une transition tout en douceur. Dans ce sens, elle ne cesse de se développer à l’international pour attirer sponsors et partenaires.
Premier pilier du futur des Colchoneros, le groupe Wanda fait une entrée fracassante dans le capital du club depuis deux ans. Dirigé par la première fortune de Chine, ce groupe tentaculaire injecte d’abord 45 millions d’euros dans le capital du club en 2015 avant, l’an passé, de confirmer qu’il donnerait son nom au stade de la Peineta contre quelques millions supplémentaires. L’internationalisation de l’Atlético est en marche et ne se limite pas au marché chinois. Pêle-mêle, Wanda détient également une franchise dans le championnat indien, baptisée Atlético de Kolkata, achète des parts du Racing Club de Lens en France, et est entré à la bourse de Wall Street au travers d’un « fond de titrisation de créances achetées » – une dénomination affreuse pour qualifier un produit financier toxique. Actuellement, il est également en pleine traction pour ouvrir une nouvelle franchise, cette fois au sein du championnat mexicain, et espère conclure un nouveau contrat de sponsoring à plusieurs millions d’euros avec un groupe automobile indien. À défaut de rattraper son retard sur ses ennemis merengue et blaugrana, l’Atlético le comble.
Griezmann pour s’émanciper de Simeone
En chiffres, la stratégie fonctionne : depuis l’arrivée de Diego Simeone sur son banc, l’Atlético enchaîne cinq exercices avec des bénéfices à la clé. Mieux, son plan de développement lui permet actuellement d’afficher un chiffre d’affaires de 230 millions d’euros et est dans les clous pour atteindre la barre des 400 millions lors de l’exercice 2019/20. Quant à la dette du club, elle ne cesse de mincir, exercice après exercice, jusqu’à atteindre aujourd’hui 213 millions – 55 millions de dette fiscale, 158 de dette privée. Entre internationalisation de leur marque et inauguration de leur nouveau stade, les Rojiblancos comblent peu à peu le fossé qui les sépare des mastodontes espagnols et européens, et sont même sur le point de convaincre leur star de ne pas céder aux sirènes anglaises. Ainsi, Antoine Griezmann, convaincu par ses dirigeants, devrait rester l’étendard de cet Atlético en pleine croissance. Reste alors l’épineux cas Simeone à régler. Mais avec cette forte croissance économique et cette nouvelle stabilité institutionnelle, l’émancipation de l’Atlético sans son Cholo pourrait avoir des dégâts minimes sur un club en pleine mutation.
Par Robin Delorme