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L’Atlético, simple antithèse barcelonaise ?
Dans l’imaginaire commun, les Colchoneros sont avant tout des défenseurs et contre-attaquants. Loin d’être fausse, cette affirmation n’en reste pas moins caricaturale. Car depuis le début de saison, l’Atlético de Simeone a su renouveler son jeu et ses idées.
« Le plus souvent, l’antidote consiste à neutraliser une ou plusieurs formes données d’empoisonnement. » Ramenez cette définition au quart de finale 100% espagnol de cette Ligue des champions, et vous obtiendrez une caricature vendeuse. Ce FC Barcelone – Atlético Madrid ne serait alors réduit qu’à un affrontement entre technique catalane et physique madrilène, possession gargantuesque et rigueur tactique, « Jugones » contre « Guerreros » dixit Sport. Soit. Les trois duels de cette saison entre Blaugrana et Colchoneros ont en effet annoncé la couleur. Les systèmes de Tata Martino et de Diego Simeone se sont annihilés et les occasions ont fait grève (trois matchs nuls, deux petits buts). Mais les enseignements ont été riches. Depuis, des crises, des victoires, des défaites et des retournements de situation ont fait leur apparition à Barcelone. L’Atlético du Cholo s’est, lui, forgé sa propre identité, loin des clichés qui veulent que les Matelassiers ne se limitent qu’à une bonne défense, une sortie de balle rapide et des cachous de Diego Costa.
La destruction puis la construction
Depuis son arrivée sous la guérite du Vicente-Calderón, Diego Simeone a réussi à enlever l’étiquette de loser légendaire de l’Atlético. À une Europa League, une Supercoupe d’Europe, et une Copa del Rey face à l’ennemi du Real, le Cholo a bien failli ajouter une dernière Supercopa. C’était l’été dernier. Le Barça, son changement d’entraîneur et ses joueurs lessivés, s’était cassé les dents face au mur madrilène. En 180 minutes, la seule réalisation de Neymar au Calderón avait pourtant suffi aux Blaugrana pour soulever le premier trophée de la saison espagnole. Mais que ce fut dur. Le retour au Camp Nou (0-0) avait laissé entrapercevoir tout le potentiel destructeur de ces Colchoneros. Un très grand Víctor Valdés avait évité le pire. Il ne sera pas là ce mardi. Cette double confrontation avait permis à l’Atlético d’étaler tous ses progrès. Solide sur ses bases, son milieu avait étouffé les Blaugrana. Prompts dans le harcèlement, rapides et précis dans la relance, Gabi et Mario Suárez, bien épaulés par les excentrés Arda et Koke pas avares en effort, s’étaient mués en antithèse barcelonaise. Le secret ? Des lignes toujours très proches, très basses s’il le faut. Un Real Madrid mourinhesque, les sales coups en moins.
Les présentations faites, l’Atlético Madrid s’est ensuite occupé des tâches quotidiennes. Des débuts en fanfare ont illico fait changer de statut la bande à Simeone. De troisième roue du carrosse à troisième homme, elle a été contrainte de réinventer son football. Face à elle, les équipes de Liga ont commencé à bétonner. Une tactique jusqu’ici réservée au FC Barcelone et au Real Madrid. Face à de telles situations, le Cholo a montré qu’il n’était pas qu’un simple rabroueur mais également un subtil tacticien. Moins spectaculaire que ses deux concurrents, l’Atlético n’en demeure pas moins incisif et décisif. Friand de contre-attaques, il sait également placer ses offensives. Comment ? Il applique dès la récupération un pressing intense qui rappellerait presque celui de Barcelone. Si l’adversaire est déjà regroupé, Gabi et compagnie savent également patienter. Pour ce, les latéraux Juanfran et Luis Filipe ont un rôle offensif primordial. D’autant plus que ces deux faux ailiers, Koke et Arda, aiment rentrer plein axe pour tricoter.
L’Atlético a également ses ‘Jugones’
Justement, Arda Turan et Koke sont deux joueurs clés de ce changement. Sans eux, difficile d’imaginer l’Atlético disposer d’une telle palette en attaque. Le Turc, en un été, a presque gommé ce qui lui faisait défaut : son physique. L’an dernier, il était le plus bel intermittent de Liga. Désormais, il sait enchaîner efforts défensifs et rushs offensifs. Le tout avec une technique délicate et délicieuse. Quant à Jorge Ressurrecion, alias Koke, il est le facteur déterminant de l’Atlético. Avec déjà 17 passes au compteur (l’un des meilleurs d’Europe), ce « joueur du présent et du futur (…) est appelé à être le cerveau de la sélection espagnole pour les dix prochaines années » , dixit Xavi. Un hommage mérité. Mais celui qui met de l’ordre dans la maison du Calderón est son capitaine. Gabi, désormais trentenaire et âme du « Cholismo » , est le liant de l’équipe – plus que son binome Suárez. Toujours au pressing, à l’œil affûté, il imprime le tempo et apporte de la variété (cf. ses frappes lointaines). Face à Barcelone, ce mercredi, ces trois « Jugones » ne seront pas de trop pour se frayer un chemin jusqu’aux cages de Pinto. Car l’Atlético s’attend tout de même à défendre, et à reprendre le temps de 180 minutes son costume d’anti-Barça. Il s’agirait de ne pas en faire une généralité.
Par Robin Delorme, à Madrid