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L’Atlético du Cholo fait sa mue
Réputé, et à raison, comme une équipe défensive, l’Atlético de Madrid entame cette nouvelle campagne avec des envies d’évolution. Résolument plus offensifs, à l’image de leur prestation face à Gijón, les Colchoneros délaissent une part de leur équilibre pour une folie rafraîchissante.
Face à un collège de journalistes prêt à dégainer, Diego Simone se pose en défenseur de ses troupes devant l’éternel : « Je n’ai absolument rien à leur reprocher. Je ne voudrais jamais changer d’équipe, elle est impressionnante(…). Même avec huit joueurs de champ, nous avons su conserver le profil d’équipe que nous formons. Dans le football, on peut perdre, on peut gagner, et moi, je voudrais toujours perdre de cette manière. » Loin d’être inédite, cette scène de janvier dernier dans la salle de presse du Camp Nou révèle l’aveuglement amoureux du Cholo pour l’équipe qu’il battit à son image. À savoir, un onze qui érige la défense en science et qui fait de l’agressivité son trait d’identité non négociable. Pourtant, en ce soir de défaite en championnat, les critiques pleuvent sur le défi imposé, plus que proposé, par un Atlético qui termine ce duel au sommet avec deux expulsés. Depuis, les Colchoneros perdent une nouvelle finale de Ligue des champions et terminent le dernier exercice sans la moindre breloque. Un échec cuisant pour un Diego Simeone qui, après un été de réflexion, se décide à faire évoluer son Atlético.
De l’équilibre au déséquilibre
Lorsque ses troupes fouleront la pelouse du Camp Nou pour ce premier choc de Liga, rien n’indique pourtant que Diego Simone ne mette en place un système résolument offensif. Pour contrer le talent intrinsèque des Blaugrana et étouffer les fulgurances de la MSN, la rigueur tactique s’annonce comme la clé de voûte de la partition des Madrilènes. Loin de ses duels décisifs mais épisodiques face au FC Barcelone et au Real Madrid, l’Atlético doit avant tout se réinventer face aux plus petites cylindrées qui, après quelques années à superviser la philosophie cholesque, délaissent aux seuls Matelassiers le soin de produire du jeu. Si bien qu’après deux matchs nuls inauguraux face aux promus Alavés (1-1) et Leganés (0-0), la sonnette d’alarme est tirée, et les critiques pleuvent sur le manque d’ambition balle au pied des protégés de Diego Simeone. « Nous ne marquons pas, mais surtout nous ne nous créons pas d’occasion » , avertit Saúl, avant d’insister sur les maux rojiblancos : « Nous sommes très solides défensivement, mais dans la zone de vérité, nous devons être plus tranquilles. Nous devons penser notre jeu et pas seulement arriver rapidement devant. »
L’analyse du canterano est juste, mais fait fi des changements estivaux et idéologiques de son chef de meute. Car, désireux de disposer d’armes offensives conséquentes, Diego Simeone impose à sa direction le recrutement d’un avant-centre tueur et d’un ailier peu avare en efforts. Les deux élus, Kevin Gameiro, seconde option derrière l’ancien Colchonero Diego Costa, et Nico Gaitán, Argentin au pied gauche soyeux, cristallisent alors toutes les attentes du changement promis par le Cholo. D’abord délicate, à l’instar des débuts de tous les néophytes rojiblancos, leur intégration prend une autre tournure lors du déplacement à Vigo, mais surtout de la réception du Sporting de Gijón. Des Asturiens contre lesquels l’entraîneur argentin dégaine un onze ultra-offensif : le quatuor Griezmann-Gameiro-Gaitán-Carrasco, soutenu par la doublette de la cantera Koke-Saúl, offre alors l’une des plus belles partitions offensives de l’Atlético depuis l’arrivée de Simeone sur le banc. Pour le gourou argentin, « nous pouvons nous permettre de jouer de cette manière de temps en temps » . Autrement dit, le Calderón devrait vite revoir un tel plan de bataille.
Griezmann, ou le changement vers l’avant
Condition sine qua non de cette évolution offensive, Antoine Griezmann, de par son talent et sa générosité, permet à l’Atlético de se réinventer. Car « seul intouchable de l’effectif » , dixit Diego Simeone, le Français se révèle d’autant plus décisif lorsque le collectif rojiblanco se met au diapason de ses fulgurances. Appelé, de son propre aveu, « à manger à la table de Cristiano Ronaldo et Messi » , il reçoit des louanges sincères et amoureuses d’un entraîneur qui en fait la pierre angulaire de son projet : « L’an passé, il a été le meilleur joueur en Europe, et je n’ai aucun doute là-dessus, car arriver en finale de l’Euro, de la Ligue des champions et terminer troisième de la Liga… J’espère qu’il sera sur le podium du Ballon d’or, il le mérite. Et il aura un futur extraordinaire s’il poursuit sur ce chemin. » Un avenir doré qui, après une prolongation de contrat jusqu’en 2021 et une clause augmentée à cent millions d’euros, devrait continuer à s’écrire du côté de la Peineta, futur antre des Colchoneros. À la différence près que désormais, l’Atlético souhaite évoluer vers un jeu plus aguicheur qu’agressif.
Par Robin Delorme