- C1
- 8es
- Juventus-Atlético (3-0)
L’Atlético, ce si long refrain
Alors qu’il rêvait de disputer une finale de C1 à la maison, l’Atlético s’est fait détrousser mardi soir à Turin (3-0) et s’est, une nouvelle fois, fait balayer par Cristiano Ronaldo. Putain de refrain.
Et, d’un coup, la deuxième partie du spectacle commence. Tout apparaît sous nos yeux : la tension, l’inquiétude, la stupéfaction. En quittant la manche aller à Madrid, Diego Simeone avait prévenu son monde : « Rien n’est fait. N’oubliez pas que c’est la Juve en face ! Le retour à Turin sera extrêmement compliqué… » L’Argentin n’a que trop bien appris à souffrir pour ne pas se couvrir au moment de pousser ses hommes dans la tempête. De sa zone technique, Simeone comprend rapidement : si l’Atlético est capable de ramasser des vagues en regardant l’adversaire comme un gangster en lui répétant qu’il peut toujours venir et que rien ne peut l’atteindre, le cadrage tactique de ce huitième de finale retour retourne rapidement l’estomac du Cholo. Car, du bord du terrain, Diego Simeone voit le monstre grandir et la Vieille Dame s’élever, il voit ses hommes trembler et le destin lui revenir en pleine bille. Le football est un chien de l’enfer, un drôle d’univers qui trompe les illusions et où l’espoir enfantin se transforme souvent en chagrin adulte. Puis, mercredi soir, à Turin, Simeone a surtout vu revenir son détraqueur : Cristiano Ronaldo, encore et toujours Cristiano Ronaldo.
Oui, le même Cristiano Ronaldo qui était venu marcher sur ses espoirs au printemps 2017 lors d’une demi-finale aller de C1 disputée au Bernabéu et largement perdue par l’Atlético (3-0). Ce soir-là, le Portugais avait claqué un triplé, déjà. Ce n’était pas nouveau, puisque Ronaldo en avait déjà claqué deux sous les yeux de Diego Simeone, en Liga. Cette fois, CR7 a récidivé, sous le maillot de la Juventus, pour un résultat copié-collé : le Portugais a plié l’Atlético en trois et laisse Simeone suspendu au-dessus de la fugue d’un énième rêve. On s’interroge depuis toujours sur l’histoire d’amour qui lie l’Argentin à l’Atlético et ce soir peut-être plus que jamais : quelle peut être la suite de l’aventure ? Combien de saisons s’écouleront avant que le Cholo ait envie de changer de veste ? Lui répète à chaque entretien qu’il se verrait bien un jour à l’Inter ou à la Lazio, mais lors de la dernière Saint-Valentin, Diego Simeone a décidé de prolonger de deux ans son contrat avec les Colchoneros. Cet homme avait alors un rêve : disputer une troisième finale de C1 avec l’Atlético et en remporter une, qui plus est celle-ci, à la maison, au Wanda Metropolitano. Perdu Diego.
La fin d’un cycle
Que restait-il de l’Atlético vainqueur de la Juventus à l’aller (2-0) mercredi soir ? À l’Allianz Stadium, où étaient passés les « frères » vantés par Simeone ? L’Argentin avait demandé à ses gars « tranquillité et humilité » , ces derniers ont découvert une nouvelle destruction sentimentale au bout de leur route et n’auront offert qu’une occasion et demie de rébellion : une tête de Morata avant la pause, une frappe non cadrée de Correa en seconde période. C’est tout. Sinon, l’Atlético s’est replié sur lui-même d’une façon diamétralement opposée à celle d’un match aller d’où la Juventus était ressortie avec quelque 63% de possession de balle. Cette fois, avec un taux de possession identique, la Vieille Dame a étouffé les Madrilènes sur les moindres relances durant une majorité de la rencontre grâce à un trio Matuidi-Pjanić-Can excellent au rouleau et à des croqueurs d’espaces (Cancelo-Bernardeschi d’un côté, Ronaldo-Spinazzola de l’autre) brillants.
Sur ce point, Simeone a vu son objectif de « profiter des espaces offerts » pour « jouer le meilleur match possible afin que Morata puisse donner le meilleur de lui-même » fondre sans avoir vraiment la possibilité de lever le petit doigt. L’Atlético est tombé mardi soir sans avoir été lui-même et c’est peut-être le plus difficile à digérer pour Diego Simeone, dont certains choix tactiques (la titularisation de Lemar notamment) seront discutés demain. Cette défaite marque aussi la fin d’un cycle : cet été, Godín quittera certainement ses potes, tout comme peut-être Antoine Griezmann, mais l’Atlético reviendra, c’est une certitude. Turin laisse une nouvelle cicatrice, ouvre une nouvelle blessure : le monstre a de nouveau attrapé ce club. Pouvait-il en être autrement ? Un match de football exige une performance coordonnée de tous ses acteurs : à Turin, l’Atlético a avancé désarticulé et s’y est évaporé.
Par Maxime Brigand