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L’arbitrage italien sifflé hors jeu
Mardi dernier, un arbitre anonyme a décidé de lâcher une bombe sur la planète Calcio en dénonçant certaines imperfections de l’arbitrage dans le foot italien. Entre erreurs flagrantes, guerre d’ego et utilisation approximative de la VAR, l’arbitrage est au cœur de la tempête.
« Cette saison, il y a eu énormément d’erreurs commises par nous, les arbitres, que ce soit sur le terrain, mais aussi à la VAR. Des erreurs inexplicables. » Invité dans l’émission Le Iene (les hyènes, en VF) sur Italia 1, un arbitre supposément en poste a décidé de vider anonymement son sac. « J’ai décidé de parler pour l’amour du jeu et parce que je crois encore au principe de l’équité sportive », précise-t-il. Le lanceur d’alerte avance que la situation « est devenue intenable et qu’elle affecte la carrière de nombreux arbitres ». Avec au menu des erreurs d’arbitrage flagrantes, des clans et une utilisation de la VAR qui pose question. Dans la foulée de ces révélations, Il Mattino en a rajouté une couche. Lors de la finale de Supercoupe entre l’Inter et le Napoli, le quotidien italien avance que Gianluca Rocchi, actuel responsable de la CAN (Commission arbitrale nationale), se serait rendu dans le vestiaire d’Antonio Rapuano – arbitre de la finale – durant la pause pour lui « faire comprendre que ses décisions n’étaient pas celles attendues ». À l’heure de jeu, Giovanni Simeone est exclu pour un second carton jaune jugé extrêmement sévère. De quoi amplifier la polémique.
Nota dell'Associazione Italiana Arbitri sulle accuse lanciate ieri sera durante una trasmissione televisiva. Leggi il comunicato: https://t.co/r9KxWRgokb pic.twitter.com/naG8fu5tyE
— A.I.A. (@AIA_it) January 24, 2024
Face à ces accusations, l’AIA (l’Association italienne des arbitres) s’est défendue. « Ces accusations sont inacceptables et infondées. Ce sont des allégations qui n’ont aucun fondement concret. Si quelqu’un prétend avoir quelconque preuve concrète, manifestez-vous en passant par les organes officiels », a ainsi déclaré dans le communiqué son président Carlo Pacifici. Concernant le possible échange à la pause de Napoli-Inter entre Rocchi et Rapuano, le président de l’AIA avance que « cette discussion a uniquement porté sur la minute de silence prévue juste avant la reprise de la seconde période pour Gigi Riva. »
Des erreurs en cascade
Alors que la Serie A retrouve ses lettres de noblesse, les nombreuses erreurs d’arbitrage viennent tacher la copie. La faute de Bastoni sur Duda non sanctionnée (Inter-Hellas), le but non accordé de Thorstvedt contre la Viola (Sassuolo-Fiorentina), la main flagrante de Pulisic sur son but non sifflée (Genoa-Milan) ou encore le penalty non sifflé sur N’Doye lors de Juve-Bologna, pour ne citer qu’elles. Forcément, après les matchs, les conférences de presse se transforment en règlement de compte. « L’arbitrage a de nouveau été scandaleux. Nous voulons un arbitrage juste pour toutes les équipes de Serie A. Nos arbitres sont des amateurs dans un monde professionnel », avait lâché en décembre dernier le proprio de la Salernitana Danilo Iervolino après le derby face au Napoli, un match marqué par une faute non sifflée de Demme sur Tchaouna sur l’action du but napolitain.
Iervolino ne s’arrêtera pas en si bon chemin et ajoutera que « l’histoire se souviendra de ces arbitres comme les pires de l’histoire du football transalpin. Nous demandons la démission de Gianluca Rocchi. » Une relation toxique entre les clubs et le corps arbitral palpable chaque week-end, en témoigne l’expulsion de Thiago Motta pour contestation virulente à la suite du penalty accordé à Milan. Des erreurs flagrantes et récurrentes pas véritablement corrigées par la VAR. Et selon l’arbitre anonyme, c’est justement ça le problème. « Quand tu as les images en 4K devant tes yeux et que tu as la possibilité de revoir la séquence à de multiples reprises, comment est-ce possible de ne pas corriger de telle erreur ? »
Coup de pied dans la fourmilière
Outre ces erreurs arbitrales, l’arbitre anonyme pointe également du doigt une guerre d’ego et des clans, à l’approche des prochaines élections de l’AIA prévues en juin prochain où Gianluca Rocchi pourrait bien se présenter et prendre la succession de Carlo Pacifici. Une possible nomination qui ne plaît pas à tout le monde. Forcément, certains pensent que ces révélations ont pour but de décrédibiliser Rocchi. « S’il y a des raisons politiques derrière cette sortie médiatique, c’est quelque chose de très grave », s’est insurgé dans un communiqué ce dernier. Selon le Corriere dello Sport, l’arbitre Daniele Orsato aurait même déclaré lors d’une réunion de crise entre les arbitres que la taupe qui « avance de tels propos de manière anonyme n’est pas un homme et donc n’est pas un arbitre ». Une levée de boucliers pour défendre un système qui, selon le témoin, est défaillant, notamment pour ce qui est de l’évaluation des arbitres. « Beaucoup d’entre nous ont le sentiment que les notations, les évaluations et les éventuelles relégations ou rétrogradations à la fin de l’année ne dépendent pas toujours uniquement de notre performance pendant les matchs. Chaque fois qu’un arbitre est appelé à la VAR, il peut voir sa note être abaissée, avance-t-il. L’évaluation d’un arbitre dépend de sa décision de continuer à arbitrer ou non. Et si ces évaluations sont des décisions politiques, le championnat est alors faussé. »
Par Tristan Pubert