Lampard, Mourinho : keep in douche

La scène d’ouverture est un classique des scénarios de pornos. Frank Lampard, sous la douche, nu comme un ver après entraînement intensif à l’été 2004, et Mourinho, en costume-cravate, qui arrive à l’improviste. Celui qui vient alors de remporter sa première Ligue des champions, avec le FC Porto, prend l’international anglais à froid, sans aucun préliminaire : « Tu es le meilleur joueur du monde » … avant de repartir comme il était venu. Dans sa biographie Totally Frank, l’ex box-to-box des Blues explique qu’il était autant embarrassé par l’absence de serviette à portée de main pour cacher sa virilité, que par le mensonge éhonté de son nouvel entraîneur. « Je savais que je n’étais pas le meilleur joueur du monde, mais je comprenais ce qu’il voulait dire. Je voulais sortir de la douche et mettre fin à cette conversation aussi vite que possible. Il venait de m’élever à un nouveau niveau. J’ai senti la confiance affluer, j’ai marché sur l’eau tout le reste de la journée. » Et même un peu plus.

Lampard, deuxième meilleur joueur d’Europe 2005

Les faits et les chiffres parlent d’eux-mêmes. À partir de cette saison 2004-2005, Chelsea domine la Premier League, et Lampard devient un milieu de terrain ultra décisif. Minimum 15 buts par saison, au moins le même ratio de passes décisives. Un excellent milieu devenu un joueur d’exception grâce à un ressort psychologique subtilement – ou pas – activé par le Special One. Deux titres en Premier League avec le Mou, une seconde place au Ballon d’or 2005, le titre de joueur anglais de l’année 2004 et 2005 serviront, parmi d’autres distinctions, à immortaliser cette réussite.

« Il a été(Mourinho, N.D.L.R.)celui qui m’a donné beaucoup de confiance dans la période de ma carrière où mes performances et ma mentalité ont passé un cap » , admet sans hésiter Lampard aujourd’hui dans sa nouvelle fonction de coach. Et les méthodes du Portugais, même s’il n’envisage pas de devenir « un clone » , pourraient inspirer son management. Notamment l’affaire de la douche. « J’essaie d’avoir une relation personnelle avec mes joueurs, cela peut les pousser à être meilleurs chaque jour, les aider à avoir confiance et à comprendre qu’ils doivent toujours chercher à progresser. »

Petites piques entre amis

La lune de miel entre Lampard et son ancien mentor est officiellement terminée depuis septembre 2014, et un match nul Chelsea-Manchester City durant lequel le milieu avait égalisé pour les Citizens. Alors entraîneur des Blues pour la seconde fois de sa carrière, Mourinho avait coupé le cordon en conférence de presse. « Dès lors qu’il a choisi de rejoindre un concurrent direct, l’histoire d’amour est terminée. » Depuis, les deux hommes se sont retrouvés une seule fois comme rivaux, pour un match de League Cup Manchester United-Derby County, remporté par l’équipe de Championship.

Et Mourinho n’a pas manqué, en début de saison, alors qu’il était consultant pour Sky Sports, de critiquer les choix de son ancien capitaine. « Cette équipe n’a même pas les bases, elle ne défend pas en bloc, elle manque d’agressivité et d’expérience… » , expliquait le Portugais après une déroute de Chelsea sur la pelouse de Manchester United (0-4). Depuis, Lampard a pris sa revanche dans un style très mourinhesque, en rappelant que le Special One avait promis, il y a plusieurs années de cela, qu’il ne poserait jamais ses fesses sur le banc des Spurs. Mais contrairement à ses habitudes de la grande époque, le Portugais n’a allumé aucun incendie pour déstabiliser son ancien joueur, se contentant de souligner son bon travail comme coach des Blues. Ira-t-il jusqu’à lui dire, après le match de dimanche, que son ancien protégé est potentiellement le meilleur entraîneur du monde ?