- Euro 2012
- Groupe A
- Pologne/Grèce
L’aigle Lewandowski
L’Euro va bientôt démarrer et avec lui les espérances de tout un peuple placées dans son guide, Robert Lewandowski, attaquant racé qui pourrait bien se révéler un peu plus aux yeux de l’Europe, un continent qui commence à lui faire la cour. Portrait d’un aigle blanc au sang-froid manifeste, à la vie comme à la scène.
Et si c’était lui le futur meilleur buteur de l’Euro ? Robert Lewandowski est un attaquant qui ne doute pas. Et à la vue du groupe dont a hérité sa sélection, il peut entrevoir quelques pions dès le premier tour. Des confrontations face à la Grèce, la Russie et au voisin tchèque où le « Torres polonais » , comme il est surnommé dans son pays, pourrait briller de mille feux. Car cette saison, Lewandowski a régalé le championnat allemand. S’il s’est signalé en étant sacré champion avec le Borussia, il a également remporté le titre de « Meilleur joueur de la Bundesliga » . Une distinction qui le place devant Mario Gómez, son principal concurrent au classement des buteurs. Attaquant moderne par excellence, le Polonais sait aussi bien marquer que faire marquer. En témoignent ses 33 buts en 54 matches toutes compétitions confondues, ponctués de 13 passes décisives. N’en déplaise à son coéquipier Shinji Kagawa, le pensionnaire de Biale Orly (l’Aigle Blanc, en VF) peut aussi se montrer altruiste avec ses coéquipiers. Le Japonais avait pourtant décrit le buteur en série comme quelqu’un d’égoïste : « Lewandowski n’a que faire du jeu d’équipe, tout ce qu’il veut, c’est tirer lui-même en direction du but adverse. […] Sur le terrain, il ne fait jamais attention au joueur qui pourrait être mieux placé que lui, c’est pourquoi je ne reçois jamais de ballons de sa part. Mais on n’y peut rien, c’est un joueur de ce genre. »
Le bémol à apporter à une éventuelle réussite du Robert à l’Euro est peut-être caché dans cette phrase de Kagawa. C’est un fait, la Pologne ne possède pas de pourvoyeur de ballons à la hauteur du petit meneur de jeu du Borussia. Hormis Obraniak dans une moindre mesure, les Polonais n’ont pas de véritable « 10 » , à l’ancienne, capable de distribuer le jeu autant que les bonnes passes. Mais Lewandowski n’en a que faire. Il a prouvé cette saison, d’abord en envoyant Barrios se faire voir chez les Chinois, que le patron de l’attaque, c’est lui. Pouvant se dépêtrer de n’importe quelle situation, comme dans le tendu Dortmund-Bayern du 11 avril dernier, l’attaquant de 23 ans aime particulièrement les grandes rencontres. Et que dire de son triplé en finale de la Coupe d’Allemagne…
Une femme karatéka
Pourtant, quand on se penche sur le parcours du natif de Varsovie, on s’aperçoit que tout n’a pas toujours été aussi simple. Une carrière commencée dans le club phare de sa ville, le Legia. Où Lewandowski ne s’imposera pas. Seul le Znicz Pruszków, alors en troisième division polonaise, croit en lui et l’achète pour une bouchée de zlotys (5000€). L’aiglon commence alors sa transformation, terminant successivement meilleur buteur de D3 (15 buts) puis de D2 (21 buts). Suffisant pour que le Lech Poznań s’intéresse au prodige, et le signe pour quatre ans contre 350 000€. C’est le début de la révélation. Le limier pointe d’abord le bout de son nez en Europa League, où il participe à la jolie campagne du club phare de Poznań. Le jeune loup ne laisse rien au hasard non plus en championnat où il caracole en tête du classement des buteurs. Le Shakhtar Donetsk y va de ses 8 millions d’euros pour convaincre les Bleus du Lech. Qui répondent par la négative. Lewandowski attend l’année suivante pour partir. Anecdote significative, sa femme est karatéka et répond au doux nom d’Anna Stachurska, médaillée d’or en Coupe du monde de karaté 2008. Ce qui explique peut-être son caractère calme, placide. Comme devant les buts où son sang est le plus froid. Le « Polak » préfère donc rejoindre la communauté polonaise de Dortmund. Cette fois, 4,5 « petits » millions d’euros suffisent à arracher l’aigle de sa patrie natale.
C’est en Allemagne que le néo-Bomber va dévaster toutes les défenses sur son passage. Barré dans un premier temps par l’Argentino-Paraguayen Lucas Barrios, qui enfile perle sur perle, Lewandowski attend son heure. Jusqu’au succès que l’on connaît. Désormais, la question reste de savoir où il va s’arrêter. Les quotidiens sportifs polonais ont évoqué ces derniers temps une possible somme de 25 à 30 millions pour inciter les Jaune et Noir de Dortmund à laisser partir leur joyau. Une invitation à voyager vers… l’Angleterre. Son coéquipier Kagawa transféré à Manchester United, le joueur à la conduite de balle qui n’est pas sans rappeler Dimitar Berbatov pourrait donc rejoindre les bords de la Mersey. Mais avant cela, la Pologne, qui a des airs de République Tchèque période 2004, devra réaliser un beau parcours dans la compétition qu’elle organise. Avec Lewandowski dans le rôle de Milan Baroš (meilleur buteur de l’Euro 2004 avec 5 buts) ? On en saura plus ce soir, dès 18 heures…
Par Dimitri Laurent