ACTU MERCATO
L’affaire Gregory
Gregory van der Wiel, la dernière recrue en date du PSG, est un pur produit de la formation ajacide. Et comme nombre de jeunes issus de l’école Ajax, la gamin est doué, mais peut-être aussi un peu trop conscient de l’être. La première aventure du latéral droit à l’étranger, au sein d’un effectif ultraconcurrentiel qui plus est, doit lui permettre de gagner encore en maturité.
« Je n’ai jamais quitté Amsterdam, je ne sais pas comment est la vie ailleurs. » Interrogé par le site de la Fifa en avril 2011, Gregory van der Wiel expliquait n’avoir jamais vraiment mis les pieds hors de la capitale hollandaise, où il est né, où il a grandi et où il vit à quelques minutes seulement du domicile de ses parents. Doué très tôt pour le football, le gamin n’a pas le temps de chausser ses premiers crampons pour le club de son quartier qu’il est déjà repéré par l’Ajax, l’institution de la ville, qui possède des scouts guettant les génies de la balle jusqu’aux sorties des écoles.
Dès l’âge de 8 ans, le petit Gregory intègre De Toekomst (Le Futur), l’académie de formation ultramoderne du plus grand club du pays. Comme avant lui Sneijder, Van der Vaart, Nigel de Jong, Stekelenburg, Babel, Vermaelen ou Vertonghen, pour ne citer que les plus récents. Quand vous franchissez les portes de ce centre aux impressionnantes infrastructures entièrement dédiées à la pratique du foot, vous avez beau ne pas encore avoir un poil sur le caillou, tout est fait pour que vous vous considériez déjà comme l’élite de demain. Les gamins sont chouchoutés, conditionnés à l’extrême, préparés à être (et à se savoir être) les meilleurs. À l’Ajax, on fait pousser des génies et on récolte le melon depuis des générations. Au-dessus, c’est le soleil.
« J’étais une grande gueule »
Notre gars Van der Wiel pète d’ailleurs une pile à sa sixième année au sein de l’académie. Arrogant, imbuvable, il est sanctionné d’un exil dans un obscur club de banlieue, le HCF Haarlem, qui n’existe plus aujourd’hui. Là, il prend conscience de sa condition de pourri-gâté. La cure qu’il passe de 14 à 17 ans va lui permettre de dégonfler sérieusement chevilles et caboche. En 2005, ses formateurs de l’Ajax récupèrent un mioche plus mûr, plus posé, moins enclin à se la raconter et auquel ils confient le brassard de capitaine. « Avec du recul, ils ont eu raison, reconnaissait le joueur il y a un an. Je jouais au dur, j’étais une grande gueule et je l’ai mérité. »
Lesté d’un peu de plomb dans la cervelle, Gregory van der Wiel se stabilise, avant d’entreprendre l’ascension vers le haut niveau. Il termine d’abord sa formation, enchaîne avec un premier match de championnat pro en 2007, puis patiente sur le banc le temps d’une saison d’apprentissage, avant de figurer enfin parmi les titulaires dans le 11 mis en place par l’entraîneur Marco van Basten à son arrivée en 2008. 2008/2009 est la saison de la révélation, 2009/2010 celle de la confirmation. Élu meilleur jeune de l’Eredivise (succédant notamment à Robben, Sneijder, Huntelaar et Afellay), le latéral droit est titulaire au printemps pour sa première grande compétition internationale : la Coupe du monde 2010.
Ronaldo, l’affreux cauchemar
Plein de fraîcheur et d’insouciance, il étonne en Afrique du Sud par sa rapidité, son endurance et sa capacité à apporter le surnombre en attaque, contribuant aux bonnes performances de la sélection oranje qui se hisse jusqu’en finale. À l’intersaison, le Bayern le veut, mais il reste à Amsterdam, signant une nouvelle grosse, très grosse saison, avec un total de 65 matchs officiels au compteur ! La dernière saison est en revanche moins impressionnante, la faute notamment à une blessure à l’aine contractée en janvier et qui va l’éloigner des terrains jusque début avril. Deux mois plus tard, l’Euro polono-ukrainien vire au cauchemar, collectivement comme individuellement. Le bilan est vraiment moche, avec trois défaites à la clé, une élimination dès le premier tour et une ambiance délétère. À titre personnel, l’affreuse dernière prestation face au Portugal fait tache, avec une grosse bourde qui aurait pu coûter un but sans la maladresse d’Hélder Postiga et un long calvaire face aux accélérations multiples de Ronaldo (bien mal aidé aussi par le non-replacement défensif de Robben…).
Peut-être pas suffisamment remis physiquement, Gregory van der Wiel se révèle à l’occasion sous son plus mauvais profil. Celui d’un joueur avec encore de grosses lacunes défensives dans le replacement, la lecture du jeu et la discipline tactique. En clair, la nouvelle recrue parisienne a encore une marge de progression et il n’est pas dit qu’il mette immédiatement Jallet sur la touche. Le Hollandais va encore devoir gagner en maturité, apprendre à vivre dans un effectif concurrentiel, loin de sa ville, loin de sa famille. Reste qu’à 6 millions d’euros la transaction (il ne lui restait qu’un an de contrat), c’est tout de même une sacrée bonne affaire que vient de réaliser le PSG.
Par Régis Delanoë