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Lacazette est-il taillé pour la Premier League ?
Il a quitté son cocon lyonnais pour Arsenal en juillet. S'il claquait ses vingt buts minimum chaque saison depuis trois ans, Alexandre Lacazette débarque à Londres sans garantie. Et dans une aventure qui pourrait le replacer chez les Bleus, l'avant-centre est au cœur d'une énigme en Angleterre : a-t-il les épaules pour être le grand attaquant que les Gunners attendent depuis le départ de Robin van Persie en 2012 ?
L’info a été reprise par quelques journaux réputés, The Guardian et The Evening Standard notamment. Vraie révélation ou simple intox, la question n’a pas été creusée, mais, insidieusement, a fait son chemin : au moment de choisir son nouvel avant-centre, José Mourinho aurait préféré Romelu Lukaku à quatre-vingt-dix millions d’euros, plutôt qu’un Alexandre Lacazette à soixante. Parce que le Lyonnais, malgré trois saisons consécutives à plus de vingt buts en Ligue 1, n’aurait pas la carrure pour l’élite anglaise selon plusieurs rapports de scouts mancuniens. Pas assez physique et, surtout, pas assez décisif dans les grands matchs… Il n’en fallait pas beaucoup plus pour qu’en Angleterre naisse quelques interrogations sur le bien-fondé du transfert de l’international français à Arsenal. À la recherche d’un buteur de classe mondiale, Arsène Wenger a fait péter le record de transfert des Gunners pour un joueur qui peine à exister en équipe de France. Derrière un Olivier Giroud qui n’a jamais totalement satisfait l’Alsacien ou les fans d’Arsenal. Wenger aurait-il pris Lacazette par défaut et dépit ? « Je pense que cette pseudo-fuite des rapports de recruteurs mancuniens, c’est simplement de l’intox » , estime Franck Queudrue. Désormais agent sur le marché anglais, l’ancien défenseur de Middlesbrough croit dur comme fer que le mariage entre Lacazette et Arsenal va être heureux : « il arrive dans un club francophile avec un manager français, pour l’adaptation, il ne pouvait pas trouver mieux » . Ancien d’Everton et Leeds, Olivier Dacourt est tout aussi optimiste car « il a la confiance de Wenger et l’intelligence nécessaire pour s’adapter au football anglais. »
« Wenger l’a pris pour combiner avec Özil et Sánchez » , Franck Queudrue
Dans The Guardian début juillet, le journaliste David Hytner décrivait ainsi le Français comme un joueur complet, dont la principale lacune pour la Premier League, tenait dans son jeu aérien assez limité. « Mais Arsenal a un jeu européen, au sol, Wenger l’a pris pour combiner avec Özil et Sánchez » , croit savoir Queudrue, quand Dacourt pense que le réel enjeu se situe dans la capacité de Lacazette à « être prêt à aller au combat. » Car les joutes anglaises sont autrement plus « engagées » qu’en Ligue 1. « Déjà, il doit s’attendre à ce que certaines fautes qui étaient sifflées en France ne le soient plus en Angleterre. Et, surtout, en matière d’intensité, cela ne retombe jamais, c’est épuisant. » L’ancien milieu défensif de l’équipe de France se souvient qu’à Everton, il devait dormir après les matchs, même ceux de milieu d’après-midi car « je ressortais totalement vidé » . Cet engagement de tous les instants, le Lyonnais va devoir s’y résoudre – si ce n’est pas déjà fait – à chaque entraînement : « à Everton, l’entraînement était plus intense que pendant les matchs, il pouvait même y avoir des blessures car les mecs se battaient pour leur place le week-end. » Avec ses 1,75m, Alexandre Lacazette ne va clairement pas effrayer les défenseurs de Premier League par son impact, mais Dacourt comme Queudrue pensent qu’il ne va pas manquer d’arguments pour leur faire mal. « Beaucoup de défenseurs de Premier League sont expérimentés et puissants, mais assez lents, alors que Lacazette est très mobile » , souligne Dacourt. « S’il parvient à éviter les duels frontaux, il sera efficace » . Ses gardes du corps n’ont donc pas intérêt à le lâcher au marquage, « parce que dans un tel cas, ils ne le reverront pas » , assure Queudrue.
Conquérir la Premier League pour séduire Didier Deschamps ?
Pour Lacazette, la différence entre une saison réussie et un échec pourrait se jouer non pas sur les pelouses de Stoke City, Burnley ou Tottenham, mais plus dans son aptitude à se fondre dans le moule des Gunners. « À Lyon, il était assuré de jouer chaque week-end, alors que là, il arrive dans un grand club sans garantie. Il va devoir se battre pour sa place chaque semaine, cela peut être dur » , estime Dacourt. Vu d’Angleterre, ce recrutement a l’avantage d’offrir à Arsène Wenger un plus large panel de solutions offensives, entre une association avec Alexis Sánchez et Mezut Özil, ou une doublette avec Olivier Giroud. La situation croisée des deux attaquants français aura d’ailleurs son importance en vue du Mondial en Russie. Olivier Dacourt : « Si l’on considère que Lacazette arrive pour être titulaire et que Giroud devient remplaçant, la logique voudrait que les cartes soient rebattues aussi en équipe de France. Après, on l’a vu avec Moussa Sissoko, Didier Deschamps a des idées bien arrêtées et une grosse confiance en certains joueurs, dont fait partie Giroud. Mais bon, si Lacazette claque une saison à trente buts en Premier League, la question se posera malgré tout. » À bon entendeur…
Par Nicolas Jucha
Propos recueillis par Nicolas Jucha