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La vie après Totti
Voilà c'est fait. Ce dimanche, la Roma dira au revoir à Francesco Totti lors de la dernière sortie de la saison face au Genoa. Et tourne ainsi une page de plus de vingt ans d'histoire commune. La fin d'une époque, qui en ouvre une autre. Avec son lot de promesses et d'incertitudes.
Pour sa dernière représentation, le gladiateur affiche complet. À 40 ans, Francesco Totti continue de fasciner Rome. En atteste ce communiqué de la Roma, qui annonçait dès le 12 mai que l’intégralité des billets pour le dernier match du Capitano face au Genoa avaient été vendus. Tout sauf anodin, dans un stade souvent à moitié plein depuis plusieurs saisons. Les tifosi le savent : après le départ de Francesco, plus rien ne sera jamais pareil. Car la fin de la romance de Totti avec la Roma amorce et accompagne d’autres mutations majeures au sein du club de la capitale.
D’une Bandiera à l’autre
D’abord, en matière d’image et d’identité. Depuis deux décennies, la Louve n’a été irrémédiablement associée qu’à un seul joueur : Francesco Totti. Il Capitano a tout dévoré, à coups de contrôles, buts et passes décisives, devenant « l’âme de la Roma » . La Roma est ainsi devenue le prototype même du club incarné, représenté par un homme avec valeur d’icône, Totti, un peu comme Maradona au temps de ses années napolitaines. Une caractéristique qui a été un atout remarquable pour la Louve, qui a pu prospérer sur les exploits de son numéro 10 pour conquérir un scudetto, deux Coppa et squatter à de nombreuses reprises les podium de la Serie A. Mais aussi pour bénéficier d’une exposition médiatique conséquente, la romance de Totti avec la ville éternelle participant à construire la légende moderne du club du Latium.
Le revers de la médaille existe, bien sûr. La retraite sportive du Gladiatore pourrait créer une forme de vide identitaire au sein du club. Rien de rédhibitoire pourtant, car l’héritier de Totti est tout désigné : il s’agit bien sûr de Daniele De Rossi. Romain pur jus, auteur de prestations qui, à l’image de celles de Totti, auraient pu lui permettre d’évoluer dans l’élite du football européen, il a préféré jurer fidélité aux Giallorossi, devenant l’éternel « Capitan Futuro » , censé prendre la succession d’Il Gladiatore. Le jour est donc enfin venu pour l’international italien, qui a eu le temps de s’accoutumer au brassard de capitaine ces dernières saisons, Totti intégrant de plus en plus rarement le onze type de la Louve. Maintenant que l’icône tire définitivement sa révérence, ne lui reste plus à prouver qu’il a définitivement les épaules pour assumer sa succession. Ça n’a pas toujours été le cas par le passé, comme lorsqu’il s’est pris un carton rouge absurde en barrages retour de C1 face à Porto en août dernier, ce qui condamnait à terme les siens à se contenter de la C3.
Les défis de Monchi
La retraite de Totti est aussi corrélée à l’émergence d’un homme, qui devrait modeler le destin de la Roma dans les années à venir : Ramón Rodríguez Verdejo, dit Monchi. Monchi, qui semble avoir définitivement tranché le cas Totti, moins d’un mois après son arrivée à Rome, en annonçant lui-même que le meneur de jeu jouait cette année « sa dernière saison avec la Roma » . Après avoir fait des miracles à Séville, le nouveau directeur sportif de la Louve semble convaincu d’avoir les pleins pouvoirs pour faire passer au niveau supérieur la politique de repérage et de valorisation des jeunes talents, mise en place depuis plusieurs saisons du côté de Rome : « Ici, j’ai trouvé un contexte idéal… Nous devons continuer à ne pas cibler des joueurs comme Pjanić ou Marquinhos alors qu’ils évoluent déjà à la Juve ou au PSG, mais à les repérer bien avant, en amont. C’est un modèle de recrutement qu’on avait aussi mis en place à Séville. La différence, c’est qu’à la Roma, j’ai une enveloppe qui est quasiment doublée pour travailler. » Monchi s’est aussi attaqué au dossier épineux que constitue Luciano Spalletti, usé par son retour à Rome et exaspéré par les polémiques incessantes qui entourent sa gestion de Totti, auquel il n’a donné aucun passe-droit : « Je veux le conquérir. Mon travail, c’est de convaincre Spalletti de rester. »
Nouvelles structures
En parallèle, la Roma devrait entamer dans un futur proche la construction de son nouveau stade, après s’être enfin mise d’accord avec la mairie de la capitale en février dernier. La future enceinte de 60 000 places doit théoriquement être prête dans trois ans et coûtera aux alentours d’1,3 milliard d’euros. En attendant, le club devra calmer le jeu avec ses ultras, qui ont pour la plupart délaissé la Curva Sud depuis que des barrières de protection ont été mises en place en 2015. Retirées fin mars dernier, elles ont été remplacées par des stadiers, qui sont déployés entre les différentes tribunes. Une décision saluée par certains, tandis que d’autres y voient une demi-mesure, la circulation des tifosi dans le stade restant restreinte. Reste que la Roma semble entamer progressivement ce qui ressemble à un nouveau cycle. Et va clore une bonne fois pour toutes le chapitre qu’a constitué son idylle, glorieuse, mais crépusculaire, avec Francesco Totti.
Par Adrien Candau