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La TVA pour tous !
Le prix des places va-t-il augmenter en L1, voire même en L2 ? Avant de pointer immédiatement le vilain « foot business », la mauvaise blague nous vient d'abord de Bruxelles. Pour faire vite, les matchs de foot vont désormais tous devoir payer la même TVA sur le prix des billets, sur ordre des « bureaucrates » européens. Avec le risque que les clubs répercutent en bons commerçants la « méchante fiscalité » sur la billetterie. Monaco ne serait pas concerné, toujours ça de gagné pour les supporters du Rocher !
Pendant que le PSG se lamente sur le fair-play financier avec lequel l’UEFA muselle son pouvoir de nuisance en Champions League, l’ensemble du foot pro tricolore vient lui aussi de recevoir un sale coup pécunier venu d’en haut, c’est-à-dire de l’UE. Cette fois, la commission européenne lui a asséné le coup de massue. À partir du 1er janvier prochain, l’État imposera une TVA de 5,5% sur tous les billets des matchs de foot et des autres manifestations sportives. Auparavant, dans l’Hexagone, ne s’appliquait qu’une taxe sur les spectacles que chaque commune s’avérait libre ou non d’utiliser, en en choisissant d’ailleurs les taux, généralement autour de 10%. Le PSG en 2012 avait ainsi – en vain – essayé d’y échapper en réclamant une exonération. La ville de Paris n’avait pas souhaité se priver de cette recette non négligeable. « Ce qui est certain, précise Christophe Lepetit du Centre de droit et d’économie du sport de Limoges, c’est que la suppression de la taxe sur les spectacles et son remplacement par la TVA à taux réduit va venir réparer une certaine « anomalie », puisqu’elle affectait les clubs de façon différente. Dès lors, cela va rétablir une certaine équité entre les clubs. » Fini ainsi la bonne fortune par exemple de Bordeaux ou Lens qui n’avaient pas à s’y soumettre.
250 000 euros de recettes en moins
Mais globalement quelle conséquence ? Pour résumer, disons que chacun verra midi à sa porte et que les supporters risqueront à chaque fois de régler le différentiel. Et cela, malgré le petit geste du gouvernement qui a opté pour un petit 5,5% – au lieu des 20% longtemps évoqués du côté de Bercy et qui inquiétaient pour le coup véritablement l’ensemble du monde sportif, jusqu’au CNOSF pour une fois sur la même ligne que la LFP – plutôt favorable aux « entrepreneurs » de l’UCPF. « Le prix des places va inéluctablement augmenter, prédit l’économiste Bastien Drut, car les clubs français ne sont pas dans une santé financière suffisamment bonne pour abandonner une partie, même faible, de leurs recettes de billetterie. Cela étant dit, il faut rappeler que les places de Ligue 1 sont peu chères par rapport aux grands championnats européens. » De fait, si quelques pensionnaires de L1 ont de bonnes raisons de râler, pris dans son ensemble, le bilan risque plutôt au final de se révéler positif, voire une opportunité pour faire passer la pilule d’une possible hausse du ticket auprès du public. « Il existe deux cas de figures, détaille Christophe Lepetit. Pour les clubs non exonérés de taxe sur les spectacles : l’application d’un taux de TVA à 5,5% devrait générer globalement une certaine économie, puisque le taux de taxe sur les spectacles pouvait s’avérer supérieur à ce niveau. En revanche pour ceux exonérés de taxe sur les spectacles, cela va engendrer un surcoût. Avec la situation économique précaire de certains, même limité – cela ne représente jamais « que » 250 000 euros pour des recettes de 5 millions d’euros -, cela va être mal vécu par certains dirigeants. »
L’État abandonne le taux à 20%
Car la grosse différence entre la France et le reste de l’Europe tient surtout au taux de remplissage des enceintes et surtout au pourcentage bien moindre de la billetterie dans leur budget. Une réalité très particulière, liée à la très forte dépendance aux droits télés, dont on a pu observer l’importance avec les débats sur les horaires des rencontres de L2 (et le combat de SOS Ligue 2). « La répercussion de cette nouvelle taxe sur le prix des billets serait à mon avis une mauvaise chose alors que le contexte économique et social est délicat pour les fans des clubs, nuance toujours Christophe Lepetit.Elle serait peut-être à réaliser sur les publics plus bankable que les ultras ou les groupes de supporters. Les clubs concernés par une rénovation ou une construction de nouveau stade pourraient également envisager d’intégrer cette répercussion sur leurs tarifs de vente d’espaces commerciaux ou de sponsoring. » En tout cas, au regard de l’argent englouti dans les infrastructures de l’Euro 2016 par les collectivités – qui, faute du régime mixte provisoire envisagé jusqu’en 2017, devront renoncer aux rentrées de la taxe sur les spectacles – et par l’État, qui va de son côté devoir oublier les 30 millions découlant d’un taux à 20%, il serait peut-être nécessaire et justifié de penser à une loi concernant un encadrement du tarif des abonnements et des sièges, tout comme les loyers dans les grandes villes. Certes, le temps n’est pas aux mesures sociales.
Par Nicolas Kssis-Martov