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La triste fin de carrière de Batigol
Gabriel Batistuta a marqué plus de 200 buts pour la Fio et été le héros du Scudetto romain en 2001. Transféré à 31 ans pour 30 millions d'euros à la Roma, l'Argentin va pourtant rapidement faire connaissance avec le vieillissement, et ça va faire mal.
23 février 2003, 63e minute de jeu à San Siro, 0-0. Enzo Maresca (Piacenza) est au sol, peut-être victime d’un tacle trop appuyé de Domenico Morfeo. Mais le milieu intériste s’en fout : il récupère le cuir et, face au but, sert ce bon vieux Stéphane Dalmat, titularisé pour la quatrième fois de la saison. Quelque peu décalé sur la droite, le Français profite de la glissade de son opposant pour tenter sa chance au but. Sa frappe n’est ni puissante ni dangereuse, le gardien Orlandoni s’apprête donc à s’emparer du ballon pour relancer ses couleurs. En véritable renard des surfaces, Gabriel Batistuta l’a sûrement compris et dévie donc la trajectoire de la balle d’un petit extérieur du gauche. Ça suffit pour rentrer. L’Inter prend l’avantage, et surtout, le vétéran argentin ouvre son compteur but après quatre titularisations faites de mutisme. Batigol est heureux, et ça se voit. Il court vers son banc, prend tout le monde dans ses bras, harangue la foule et dégage le ballon de soulagement. Il faut dire que depuis près d’un an, l’ex-goleador de la Fiorentina culmine à seulement quatre réalisations en Serie A.
Un déclin amorcé après le Scudetto
À ce moment, il est déjà bien loin le temps où Batistuta enquillait les buts avec la Fiorentina neuf saisons durant, terminant même meilleur buteur de Serie A en 1995. Peut-être qu’en dégageant ce ballon dans les tribunes, il repense à ce printemps 2000, celui durant lequel il a annoncé, le cœur déchiré, qu’il allait quitter la Viola pour espérer attraper au moins un titre de champion en Europe. Flairant le bon coup, l’Inter et la Lazio se jettent alors sur le buteur à la longue chevelure, mais c’est finalement l’AS Rome de Fabio Capello qui va attirer l’Argentin. Quand il est transféré pour 30 millions d’euros à la capitale, Batistuta a déjà 31 ans, et devient ainsi le trentenaire le plus cher de l’histoire du football. La suite est de l’ordre du rêve de gamin : Batigoal termine meilleur buteur de son équipe, est la star au milieu de Totti, Montella et Cafu, mais surtout, surtout, il décroche enfin le Scudetto, le premier de sa carrière et le premier du club depuis près de 20 ans.
Peut-être qu’après autant d’années à attendre ce titre, le vétéran accuse le coup. Reste que la saison suivante, il commence à décliner : ses courses sont (logiquement) moins rapides, il est moins efficace et termine péniblement l’exercice avec 6 buts à son compteur. Malgré son imperturbable sens du but, Batigol n’est plus si « Gol » que ça, et le Mondial asiatique va définitivement achever son moral. Alors que l’Argentine fait clairement partie des favoris avec Veron, Crespo, Aimar et cie, elle va échouer dans une poule constituée de l’Angleterre, la Suède et le Nigeria contre qui il offre pourtant la victoire, inscrivant au passage son dernier but pour l’Albiceleste. C’en est trop pour le meilleur buteur de l’histoire de l’Argentine (56 en 78 sélections), qui annonce sa retraite internationale à l’issue du match nul éliminant les siens contre la Suède.
Fausse relance, amputation et polo
De retour à Rome, il effectue un début de campagne 2002-2003 intéressant (quatre buts en sept matchs) avant le mutisme total. Gabriel n’avance plus, ne plante plus, ne pèse plus, et l’AS Roma vit quant à elle une saison difficile. La presse évoque alors un intérêt du FC Barcelone, et Batistuta contacte lui-même le club catalan. Mais Louis van Gaal, alors coach des Blaugrana, va freiner les négociations, jugeant l’Argentin trop vieux et inutile vu qu’il ne peut pas évoluer en Champions League après y avoir évolué en début de saison avec l’AS Roma. Vient alors ce coup du sort : l’Intériste Hernán Crespo se blesse, il lui faut un remplaçant. Avec deux ans et demi de retard, Batistuta rejoint donc les rangs de l’Internazionale pour six mois et, s’il ne marque plus autant qu’avant, garde la même fixette : remporter le titre.
Hélas pour lui, pour l’Inter et pour tous les amateurs de football, la nature a définitivement emporté son combat face à l’envie, Batistuta ne retrouve pas ses jambes de 30 ans, et n’inscrit que deux buts inutiles. En fin de saison, il disparaît même de l’équipe qui échoue finalement à la deuxième place. Ne tenant presque plus sur ses jambes, l’ancien gardien de but (si si) décide alors d’ajouter un ou deux zéros à sa pension en signant à Al-Arabi pour un salaire avoisinant les 4,5 millions d’euros l’année. Avant même Lebœuf, Benarbia, De Boer, etc, Batistuta est alors le premier à initier le mouvement qatari. Après une saison à 25 goals en 18 matchs (vu l’état physique du buteur argentin, c’est dire le niveau de l’époque…), Batigol s’écroule littéralement. Si une rumeur folle le place une dernière fois au Barça, c’est surtout au repos qu’Al-Arabi va l’envoyer en résiliant son contrat en mars 2005. Les chevilles totalement foutues, l’Argentin déclarera plus tard à la télévision Tyc Sports : « J’urinais dans mon lit, alors que les toilettes étaient à trois mètres, parce que je ne voulais pas me lever. Il était quatre heures du matin et je me disais que ma cheville allait me faire tellement mal… » Un temps proche de l’amputation, Batigol recommencera finalement à claquer des buts dès 2009 en se lançant dans… le polo.
Par Émilien Hofman