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La théorie du Germain visible
Et si l'arrivée de Mario Balotelli à Marseille était la meilleure nouvelle de la saison pour Valère Germain ? Incapable de s'imposer à la pointe de l'OM malgré une concurrence loin d'être effrayante, Germain pourrait bien profiter de la mauvaise passe de son équipe pour recommencer à prendre du plaisir dans sa position préférée : derrière le buteur.
Celui-là, il l’attendait depuis longtemps. Il datait d’avant le 6 janvier et son dernier match joué de bout en bout avec l’OM, un soir de tristesse contre Andrézieux. D’avant le 26 septembre et son but à trois points dans les arrêts de jeu, face à Strasbourg. D’ailleurs, cette saison, il en avait carrément oublié le goût en championnat. Alors il l’a savouré, ce ballon intelligemment dévié pour le premier pion de Boubacar Kamara dans l’élite. 42e minute du rattrapage face à Bordeaux, Valère Germain ouvre son compteur de passes décisives dans la Ligue 1 2018-2019.
Une nouvelle potentiellement encore meilleure qu’une fin de disette désormais étirée à quatre mois et demi sans marquer. Car cette passe, et l’activité qui va avec en première période, sont les accompagnements parfaits du message envoyé en fin de match : si Germain « (s)‘imagine bien tourner autour de Balotelli » , c’est parce qu’il sait que son altruisme est une vraie carte à jouer pour exister en tant qu’attaquant à l’OM. Il n’a pas la carrure pour être le grand buteur attendu ? Alors il sera son porte-flingue.
Je t’aime, moi aussi
C’est du moins ce qu’attend le Marseillais de 28 ans, comme il le répète à nouveau en zone mixte : « J’ai eu une discussion avec le coach qui voulait que je reste aussi malgré l’arrivée de Mario, parce qu’il m’avait dit que nous étions complémentaires. C’est à moi de faire en sorte de le faire changer de système. » Et Rudi Garcia de confirmer mot pour mot les propos de son attaquant, deux jours plus tard en conférence de presse : « Quand Mario est arrivé, il fallait qu’il y ait un attaquant qui parte. J’ai dit à Valère que ça ne serait pas lui car lui, il est complémentaire de Mario. » Les mots sont prononcés, l’idée posée. Et elle est intéressante, à en croire les faits d’armes passés de deux lascars.
Deux fois, Germain a atteint la barre des dix pions en championnat. Une première fois en prêt à Nice (14 buts, 6 passes), où il était bien entouré par Ben Arfa et Pléa dans l’axe. Une seconde à Monaco (10 buts, 3 passes), où il a adoré accompagner Falcao avant de subir l’éclosion de Mbappé. Et si sa meilleure saison statistique reste bien la dernière en date (18 buts et 5 passes toutes compétitions confondues), son contenu ne fait qu’appuyer l’idée selon laquelle Germain n’est pas un buteur solitaire. Et Super Mario dans tout ça ? Trois saisons avec un total à plus de 20 buts : la première à City en partageant avec Agüero et Džeko une attaque à deux pointes (2011-2012, 21 buts), la seconde au Milan en compagnie d’El Shaarawy (2013-2014, 21 buts) et la troisième à Nice, en partie associé à Pléa devant (2017-2018, 27 buts). « Mario a besoin de soutien » affirmait Garcia jeudi. Avec raison.
Sortez les calculettes
Alors, si l’association Pléa-Balotelli a pu faire douter Lucien Favre de son système fétiche à une pointe, qu’est-ce qui pourrait empêcher Garcia de croire au duo Valère-Mario et d’abandonner ses 4-3-3 ou 4-2-3-1 ? Sûrement pas les résultats actuels. Davantage les victimes collatérales. Car à moins d’un improbable milieu en losange, l’installation de Germain pourrait signifier un jeu à l’image des Bleus version épopée russe. À savoir une équipe asymétrique, dans laquelle Thauvin prendrait le rôle de Mbappé à droite et Ocampos celui de Matuidi à gauche. Ou Payet, au risque d’un déséquilibre dangereux pour une équipe en manque de confiance. Et puis cela laisserait un homme sur le carreau, en plus d’un des deux précédemment cités, à choisir entre Strootman, Sanson et Lopez. Voire deux, si Garcia retrouvait le mode d’emploi de Luiz Gustavo sur lequel est inscrit « milieu de terrain » en lettres capitales.
Finalement, rien de bien compliqué d’un point de vue arithmétique : un Germain en plus égale un coéquipier en moins. Contre Dijon, Rudi Garcia devrait être libéré d’un choix, avec Payet et Luiz Gustavo très incertains. Or Valère Germain sait bien compter : son dernier but contre Strasbourg a donné trois points à son équipe. Sa première passe décisive face à Bordeaux aussi. Qu’il en rajoute trois de plus à Gaston-Gérard, et il s’offrira du temps pour peaufiner son italien.
Par Eric Carpentier