- Italie
- Serie A
- AS Roma
La Roma peut-elle vraiment aller chercher la Juve ?
5 points d'avance à la fin de la phase aller et statistiquement 67% de chances de remporter le championnat, la Juventus est bien partie pour se succéder à elle-même et gagner son quatrième Scudetto consécutif. Conséquence logique, la Roma n'a que très peu de chances de remonter la Vieille Dame malgré toutes les déclarations de Rudi Garcia. Prédiction d'un échec prévisible ?
« Il y a trois mois, j’ai dit qu’on gagnerait le Scudetto, et je n’ai pas changé d’avis depuis. Le classement dit une chose, la réalité en dit une autre. » Avant le match nul de la Roma contre Palerme (1-1), samedi soir, Rudi Garcia se montrait toujours aussi confiant en conférence de presse. Une confiance d’ailleurs pas entamée ensuite par la nouvelle contre-performance des siens : « Contre Palerme, mais pas seulement, on a manqué de continuité. On ne peut pas faire des cadeaux comme on a fait après même pas deux minutes de jeu. On doit retrouver notre concentration et dépasser cette mauvaise période. Cependant, on n’abandonnera rien. On est seulement à mi-championnat, et la route est encore longue pour décrocher le Scudetto. J’ai totalement confiance en mon groupe. » L’espoir fait vivre. Avec désormais cinq points de retard sur la Juve après le giro di boa (le tour de la bouée) comme on dit dans la Botte, la Roma n’est pas totalement hors course, mais c’est tout comme. Les journaux romains ne s’y trompent d’ailleurs pas. « L’équipe (en course) pour le Scudetto n’est plus là » pour Il Tempo, « la Roma a disparu » pour Il Messaggero. Même sans boule de cristal, la Roma a tout du concurrent battu d’avance. Un Poulidor accrocheur et vaillant, mais seulement destiné à finir deuxième…
La Louve sort ses griffes, mais perd ses crocs
41 points contre 44, 32 buts marqués contre 39, 14 encaissés contre 10. Les chiffres ne mentent pas : la Roma réalise un moins bon championnat que la saison passée. Certes avec la Champions League à disputer en plus, mais c’est le lot de toute équipe avec des ambitions de titre national. Une compétition qui a d’ailleurs affiché au grand jour l’incapacité des Romains à se sublimer dans les grands matchs : une rouste contre le Bayern (1-7) et une « finale » perdue contre Manchester City (0-2) et c’en était déjà fini des premiers espoirs giallorossi. Une inaptitude à faire la différence quand le niveau s’élève qui se confirme en championnat. Face aux quatre autres équipes de tête, avec elle, la Roma n’a ainsi pris que 2 points sur 12 possibles. Soit deux nuls, contre la Lazio – merci Totti – et la Sampdoria, et deux défaites contre le Napoli et… la Juve évidemment. Alors d’accord, on voit venir les tifosi de la Maggica sur celle-là : « match volé, arbitrage maison, blablabla » . Légitimement, les Romains peuvent estimer qu’ils méritaient mieux. Mais à trop garder cette rencontre en tête, la Roma en a oublié de jouer et de gagner des matchs plus abordables qui lui auraient permis de combler l’écart depuis longtemps. À domicile contre Sassuolo (2-2) ou Milan (0-0), qui n’a plus rien d’un cador, par exemple. Pendant ce temps-là, la Juve continuait, presque tranquillement, sa marche en avant sans trop attiser les polémiques.
Si la crise des résultats romains est toutefois relative – on l’accorde – le niveau de jeu en baisse est lui bien plus criant. D’autant plus en l’absence de Gervinho parti disputé la Coupe d’Afrique des nations avec la Côte d’Ivoire. Sans les différences créées par son Ivoirien, la Louve peine à trouver d’autres solutions et tombe dans les travers de son jeu stéréotypé. Un constat aggravé par des recrues estivales pas à la hauteur des attentes, Iturbe en tête. Acheté 22 millions d’euros (hors bonus) l’ancien pourvoyeur de Toni au Hellas ne trouve pas sa place dans le système de Garcia. On attendra avant de le classer définitivement parmi les bidoni de mercato, mais on ne peut nier qu’il n’apporte rien ou presque pour l’instant. Et ce n’est pas beaucoup mieux pour les autres arrivants. Cole et Emanuelson sont aux abonnés absents, Astori alterne blessures et boulettes, Yanga-Mbiwa n’a pas vraiment la carrure pour s’imposer. Seuls Manolas, qui a la lourde tâche de remplacer Benatia, et dans une moindre mesure Keita et Holebas limitent la casse. Quant à Garcia, il trouve le temps d’aboyer à tout va, mais n’a toujours pas trouvé de solution pour faire cohabiter Destro et Totti. « Le système n’est pas le Saint Graal pour moi, ce qui m’importe est le comportement des joueurs » , a déclaré le Français. On commence sérieusement à en douter.
Malédiction romaine vs bénédiction Garcia
Contrainte supplémentaire : l’historique de la Roma. Depuis son dernier Scudetto en 2001, la Louve s’est déjà retrouvée par trois fois – sans compter cette saison – en deuxième place à la fin des matchs allers. Elle n’est jamais parvenue à combler son retard. 2006/07 : la Roma pointe à 9 points de l’Inter, elle finira à 22. Saison suivante, toujours derrière l’Inter à mi-saison, à 7 points cette fois, pour échouer à 3 petits points au final. Quant à l’année dernière, derrière la Juve déjà, la Roma accuse 8 points de retard avant de finir à 17. Pis en 2001/02 et 2003/04, la Roma est championne d’hiver – ou d’automne -, mais sera respectivement devancée par la Juve et le Milan au bout du championnat. Difficile, donc, d’être enthousiaste pour cette nouvelle course en chasse-patate, d’autant plus avec une compétition comme la Ligue Europa très compliquée à gérer en même temps qu’une lutte pour le titre.
Paradoxalement, la Roma n’a « que » 5 points de retard cette saison contre 8 l’année dernière au même moment. Autre raison d’espérer, parce que « l’espoir est le dernier à mourir » , Rudi Garcia réalise toujours une deuxième saison meilleure que la première. Déjà à ses débuts à Corbeil-Essonnes, en 1995, où après avoir pérennisé le club en division d’honneur, il ne rate la montée en CFA2 qu’aux barrages. Puis à Dijon où il obtient la montée en Ligue 1, en 2004, lors de sa deuxième saison. Et enfin à Lille où il termine d’abord cinquième, puis quatrième, avant d’accrocher le titre, en 2012, lors de sa troisième saison. Dernier alibi, la Roma a, depuis le début de saison, dû faire face à 18 blessures musculaires. Un mal récurent qui, s’il vient à disparaître, pourrait bien changer quelque peu la donne. La Roma l’espère pour continuer à croire au retour du fanion tricolore dans la ville éternelle. Après tout, « rien n’est plus têtu, rien n’est plus tenace que l’espoir, surtout s’il est infondé » .
Par Eric Marinelli