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La Roma, fashion victime ?
Les saisons passent, les collections aussi. Après un début d'histoire tonitruant, détonnant et rafraîchissant, la Roma de Rudi Garcia bloque. Pour les tifosi, il est temps de se réinventer et de se stabiliser. Enfin.
Huitième de finale retour de Ligue Europa contre la Fiorentina. Dans les tribunes de l’Olimpico, un tifo paradoxal : « Ne touchez pas à Rudi Garcia » . La Roma ne gagne plus. La Roma ne perd pas (trop) non plus. Mais la Roma se traîne. La collection « Rudi Garcia été 2013 » s’essouffle. Et pourtant, les tifosi défendent leur directeur artistique. Le match se passe. Mal. Et puis l’arbitre siffle trois fois : 3-0 pour la Fiorentina. La Roma est éliminée. Des sifflets descendent des tribunes. Cette défaite n’est pas pour rassurer les tifosi. Ils ont peur, mais pourtant ils ne remettent pas tout en cause. Ils continuent de soutenir Rudi Garcia. En revanche, ils pointent du doigt la Società (la direction) et les joueurs.
#CurvaSud #ASRoma #Totti
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— pagineromaniste.com (@PagineRomaniste) 19 Mars 2015
Quelque chose ne va pas. Ne va plus. Entre le créateur et les modèles, le courant ne passe plus. Mais difficile de dire quoi. Quelqu’un va devoir payer, et les tifosi craignent que ce soit Rudi Garcia.
Les yeux plus gros que le ventre
Retour à l’été 2013 : la Roma est mal. Encore plus mal qu’aujourd’hui. Outre la 6e place au classement (qualificative pour… rien du tout), la défaite en finale de Coupe d’Italie face à la Lazio est toujours aussi douloureuse. La maison romaine décide de recruter un couturier inconnu en Italie. Pas grand-chose dans le CV, mais des idées plein la tête. Rudi Garcia dessine une équipe rapide, joueuse et efficace. Avec lui, la Roma s’envole et arrive presque à imprimer le même rythme que la Juve. Les tifosi l’adoptent en moins d’une saison.
@OfficialASRoma #Garcia : abbiamo i tifosi migliori del mondo! Grazie mister, noi abbiamo trovato l’allenatore migliore del mondo!
— Giallorossa23 (@Giallorossa23) 21 Janvier 2014
Pas de doute possible, cette fraîcheur, c’est Rudi Garcia. Pour le féliciter, la direction le prolonge l’été dernier. D’un bail de trois années supplémentaires. Le Français se retrouve alors sans pression. Sans concurrence. Libre de ses mouvements. Et c’est à ce moment-là qu’il commet sa première erreur. Exalté après une bonne première saison, il offre une montagne d’espoirs à ses supporters : le Scudetto.
Garcia: »juve-#Roma mi ha detto che vinceremo lo scudetto »
Garcia: »juve-#ASRoma told me this year we’ll win scudetto » pic.twitter.com/hdGKlUiV50
— Tifo AS Roma (@tifoasroma) 17 Octobre 2014
Or, dans une ville qui hurle « triomphe » après seulement deux victoires et « cataclysme » après seulement deux défaites, ce pari est inconscient. Rudi Garcia avait les armes pour concurrencer la Juve, mais a laissé en chemin son plus bel atout : l’effet de surprise. Et puis aujourd’hui, les supporters romains tombent de haut alors qu’ils sont pourtant deuxièmes du classement. À leur place finalement. Et c’est de là que viennent les premières critiques. Les tifosi râleraient moins si on leur avait promis moins. CQFD.
Le cycle de la mode
Bref, peut-on en vouloir pour autant à Rudi Garcia d’être un peu trop ambitieux ? Pas pour les tifosi romains en tout cas. Massimiliano Palombella est journaliste pour la radio ReteSport : « C’est une personne très sérieuse, très intelligente. C’est un moment très difficile, car c’est le genre de situation où il faut vraiment faire quelque chose et ça, c’est surtout le rôle de la Società. » Donc non, le problème de la Roma aujourd’hui, c’est surtout que le club ne suit pas les aspirations de la tête pensante. À commencer par les joueurs. La force de cette équipe l’année dernière, c’était son enthousiasme. Sa propension à se dépenser sans compter. Sa fraîcheur. Et sa foi.
Mais ce n’est plus le cas cette saison. Pour Massimiliano Palombella, il y a un court-circuit entre le coach et ses joueurs : « Ils ne voient plus en Rudi Garcia le chef, comme c’était le cas la saison passée. » Comme si, au premier vrai doute, les joueurs ne croyaient déjà plus en l’inspiration et les possibilités de réussite de leur maître à jouer. Comme si la mode Rudi Garcia était déjà passée.
FOTO Contestazione #Roma, striscioni a Trigoria contro i giocatori http://t.co/J5ad5KKnn1 pic.twitter.com/uJqmdyZcRq
— Corriere dello Sport (@CorSport) 20 Mars 2015
Pour Massimiliano, là encore, c’est aux dirigeants d’intervenir : « Le club doit s’imposer et faire en sorte que le coach soit respecté, notamment par les joueurs. Si les dirigeants sont faibles, c’est là que naît ce genre de problèmes » . Malgré la série de résultats pas forcément positifs, Rudi Garcia est donc acquitté par ses supporters.
Nouvelle collection
Quelle(s) solution(s) alors pour relancer la machine ? Pour les tifosi romains, c’est à leur entraîneur de se débrouiller. Il a su les conquérir, leur redonner la foi. Il saura trouver son second souffle. Ce n’est pas une tâche aisée, mais en même temps combien de fois a-t-on reproché aux dirigeants de club de virer un entraîneur au premier coup de mou ? Rudi Garcia va donc devoir se réinventer avec ce qu’il a déjà sous la main. Pour commencer, il va devoir conserver sa deuxième place au classement. Et puis surtout préparer la saison à venir. Lancer une nouvelle collection vraiment innovante, fédératrice et efficace. Surprendre à nouveau pour monter encore d’un cran. Parce que c’est peut-être ce qui agace le plus les tifosi giallorossi : que chaque nouvelle saison soit encore une saison de transition. D’être des victimes de la mode finalement. Ils aimeraient monter d’un cran. Oui. Mais ils aimeraient surtout y rester. D’être ce que le 501 est au monde du jean. Indémodable, inusable et toujours au top.
Par Ugo Bocchi