- Mondial 2014
- Barrage retour
- France/Ukraine (3-0)
« La révolution française » vue de l’étranger
Angleterre, Italie, Espagne, Allemagne, comment la presse des autres grands nations européennes du foot a vécu la soirée dyonisienne ? Du coin de l’œil surtout.
En Angleterre, Cristiano masque la belle soirée des Bleus
Outre-Manche, la France n’a pas vraiment encombré les pages « sports » . D’une part, les Three Lions se sont mangés à Wembley contre les Allemands (0-1). D’autre part, Cristiano Ronaldo, un être cher au Royaume, y est allé de son triplé décisif pour embarquer le Portugal vers le Brésil. « Tout ce que tu fais, je peux le faire encore mieux. Ronaldo refuse de se faire voler la vedette par le doublé d’Ibrahimović » , claironne le Daily Mail. Le Mirror y va d’ailleurs de son petit encadré précisant que la date de clôture des votes pour le Ballon d’or a finalement été repoussée par la FIFA au 29 novembre prochain. Beau timing malgré lui pour CR7. Un peu moins pour Ribéry. L’Independent et le Mirror font plutôt dans le light en noyant le match dyonisien dans un résumé de tous les barrages européens.
Pour le plus intello des deux canards, « la France a remonté avec furie un déficit de 2 buts » alors qu’elle faisait « face à une montagne à Paris après la défaite en Ukraine » . Mamad’ Sakho est fait par le Mirror « héros de Paris » , lui qui a « sorti la France du trou qu’elle avait creusé toute seule » . Les médias britanniques s’accordent sur deux points en particulier. Le premier est la performance des Bleus. « Palpitant » , « plein d’unité » et un coup de chapeau au « pari gagnant » de la Dèche, pour le Guardian. Le Daily Mail a pointé les manques ukrainiens – « indiscipline, deux fautes, deux coups francs, deux buts, et un carton rouge ensuite » – avant d’évoquer des Bleus « déchaînés (…), nourris par l’aigreur des critiques, justifiées, à leur encontre » , « la nuisance physique » de Benzema (??), son « karma » aussi face aux buts et à l’arbitre. « Pourquoi on en a fait tant d’histoires ? » ose-t-il. Mais au-delà du terrain, les Britons ont, semble-t-il, été étonnés par l’atmosphère du Stade de France, habituellement si coincée et sans passion. « Une foule en délire » , « une fièvre » décrit le Mirror. Le Daily Mail a apprécié « l’absence de huées » dans les travées françaises, alors que le Guardian s’est délecté du beau Giroud, prompt à « piquer le micro du speaker pour entonner une Marseillaise avec une foule ravie » . Peut-être bien la plus grande des surprises de cette fraîche soirée du 19 novembre 2013. RB.
L’Italie heureuse de retrouver son meilleur ennemi au Brésil
En Italie, on accueille avec satisfaction cette qualification des Bleus. Car, finalement, une Coupe du monde sans son meilleur ennemi aurait forcément perdu un peu de saveur. La victoire française ne fait, en tout cas, pas les gros titres. La Gazzetta dello Sport consacre sa Une au nouveau président de l’Inter, Erick Thohir, ne dédiant qu’une petite phrase aux Bleus en première page : « Retournement de situation de la France, 3-0 à l’Ukraine » . Le quotidien rose est certainement le plus enthousiaste quant à la victoire des Français : « Il fallait une immense prestations des Français, et ils l’ont fait. Enfin, les joueurs de Deschamps ont affiché leur vrai potentiel et, quand tout le monde joue à l’unisson, ça marche » . Le Corriere dello Sport, pour sa part, dédie sa Une à Cristiano Ronaldo, mais affiche un gros « Francia : OUI » , en français, s’il vous plaît. Sur son site internet, le Corriere parle d’un « exploit historique » . Avant d’ajouter : « Finalement, l’équipe de France a joué comme une équipe, et a gagné 3-0 contre l’Ukraine dans un stade de France bouillant. Les hommes de Deschamps ont sorti une énorme prestation, faite de technique et d’orgueil » a écrit le journal romain. De son côté, la plus sérieuse Repubblica assure que « Mamadou Sakho est le héros de la soirée » . Puis développe, en affirmant que « la France est rentrée dans ce match tête baissée » et que « l’expulsion de Khacheridi a largement influencé le résultat final » .
L’Allemagne estime que les Bleus ont juste réparé une anomalie
« Mon Dieu, Ribéry (en français dans le texte) – La France réussit le miracle » , titre ainsi Kicker, qui parle d’ « équipe tricolore joueuse et déchaînée » . « Oubliées, les informations catastrophiques concernant la crise, oubliée la tristesse, la France fête le miracle de Paris » , ose le Spiegel. Même les Allemands nous félicitent pour ce retournement de situation. Toutefois, outre-Rhin, on estime qu’il est normal que les Bleus fassent partie du voyage brésilien. D’où les titres « La France évite l’humiliation » de la FAZ et de la Sueddeutsche Zeitung, tandis que la TAZ parle de « réveil tardif » . Quand à Bild… Le tabloid ne trouve rien de mieux que de poser la question « À quel point Ribéry est-il blessé? » , en vue du match de samedi, le choc entre le Borussia Dortmund et le Bayern Munich. AF.
L’Espagne parle de révolution française
Et les doutes se sont évaporés… Après avoir rappelé à foison que les Bleus étaient le thermomètre d’une société mal en point, la presse espagnole n’a pas tardé à nommer cette remontada « La révolution française » , dixit Marca. Exit le « traumatisme de 1993 » grâce à « l’électricité de Ribéry, le calme de Benzema et le tumulte de Valbuena » , selon le toujours très mesuré El País qui n’hésite pas à parler de « bénédiction pour un pays qui arrivait à ce rendez-vous entre scepticisme et colère » . Même topo chez le concurrent du Mundo pour qui « la France rencontre la passion (…) dans un pays acquis à la cause mondialiste, des Unes des journaux jusqu’à la loge de François Hollande dans un Stade de France impressionnant » . Dans un jargon plus sportif, le Mundo Deportivo évoque « l’amour propre des Français » et leur « courage pour pouvoir remonter le 2-0 de l’aller encaissé à Kiev » . Le concurrent madrilène As insiste, lui, sur la qualification « de manière méritée » des Bleus, et le but de Karim Benzema : « Pas comme lors du barrage de 2010 où Martin Hansson avait accordé le but décisif de Gallas après une main de Henry » . Loin du hat-trick de Cristiano Ronaldo et de la propagande pour son Balon de Oro, le Confidential titre, lui, sur un « Ribéry qui ne perd pas de vue le Ballon d’or et écrit l’histoire avec la France » . Une France qui, après cet exploit historique, a conquis la rédaction de Marca : « Au Brésil, tout sera différent, et cela ne fait guère de doute qu’elle sera parmi les favoris » .
Par Ronan Boscher, Eric Maggiori, Ali Farhat et Robin Delorme
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