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La Ligue 1 en clair : quelle merveilleuse idée !
Sur quelle chaîne suivre la journée de Ligue 1 ? Cette question pourrait bientôt se poser, alors que le football français est embourbé dans une crise des droits TV sans précédent. Téléfoot est sur le point de disparaître, Canal + est le nouveau maître du jeu, et la menace de l'écran noir plane sur les championnats de France. La semaine dernière, TF1, M6 et France Télévisions ont proposé à la LFP de diffuser la L1 (contre peanuts) en attendant un nouveau diffuseur. Quelle merveilleuse idée !
Fermez les yeux et imaginez le temps d’un instant des matchs de Ligue 1 diffusés en clair. Dans l’esprit des grands rêveurs, cette chimère est devenue une réalité accessible ces derniers jours. Explications : jusqu’au 31 janvier prochain (et même début février), le championnat de France doit être diffusé sur Téléfoot et Canal +, puis c’est le flou le plus total. Le grand bazar autour du nouvel appel d’offres, volontairement provoqué par une chaîne cryptée revancharde, fait désormais planer la menace de l’écran noir, le cauchemar des clubs, des instances et des supporters. Dans ce marasme, plusieurs groupes de télévision se sont donc positionnés pour « dépanner » la LFP en cas de besoin.
Parmi eux, des cadors comme TF1, France Télévisions ou encore M6. Un courrier à la Ligue signé Nicolas de Tavernost, le président du directoire de M6, et révélé par Le Figaro en fin de semaine dernière, va dans ce sens : « Sans vouloir s’immiscer dans les discussions actuelles autour des droits de la Ligue 1, nos chaînes n’ayant pas vocation à se porter acquéreurs de lots, nous souhaitons toutefois vous indiquer que nous pouvions mettre à votre disposition nos antennes pour la diffusion de tel ou tel match afin d’offrir de la visibilité à votre compétition et ses sponsors, éviter toute rupture de diffusion et assurer ainsi le lien social nécessaire autour de la diffusion de la Ligue 1. » Le son de cloche est le même chez la première chaîne, qui n’envisage pas non plus de se mêler aux négociations lors du prochain appel d’offres. Pas de gros sous, pas de foot en clair ? Rien n’est gratuit dans le monde impitoyable du football, et les grands décideurs sont probablement loin de faire évoluer leur réflexion. À moins qu’une parenthèse enchantée, même très courte, ne vienne rappeler que ce sport n’est pas seulement une histoire d’argent.
Nostalgie et reconquête
Attention, il n’est pas question d’enterrer les nombreux clubs professionnels en difficulté. Dans la période actuelle, marquée par l’absence de recettes de billetterie et des pertes colossales, les pensionnaires des deux premières divisions hexagonales comptent plus que jamais sur les droits TV — un modèle fragile et dangereux comme le prouvent les derniers mois — pour faire gonfler leur porte-monnaie. Reste qu’en attendant une clarification de la situation, pourquoi s’interdire de redonner de la lumière au championnat de France en proposant quelques affiches en clair en février ? Maxime Saada, le patron de Canal +, expliquait la semaine dernière dans sa bombe lâchée au Figaro que la Ligue 1 avait « perdu beaucoup de valeur », la faute surtout au milliard fictif et à l’arnaque Mediapro. Mais le football français a aussi perdu une partie de son public et de la visibilité sur cette dernière décennie. La Ligue 1 dans sa globalité est devenue une compétition de niche. Rappel : Téléfoot n’aura même pas réussi à dépasser la barre des 500 000 abonnés.
Dans l’attente d’un appel d’offres qui ne devrait cette fois pas durer de six à huit semaines, une opération reconquête via du foot en clair sur des chaînes accessibles à tous aurait du sens. Plus de streaming aux commentaires russes, plus de boitier IPTV à activer, plus de codes Canal à partager… Mais juste le confort oublié de pouvoir s’engloutir des matchs sans avoir à payer une paire d’abonnements onéreux ou à jouer au pirate en herbe sur internet. Après le 7 février, date d’un OM-PSG annoncé sur Téléfoot par la LFP, personne ne sait encore où il faudra se rendre pour suivre la Ligue 1.
Dans un contexte de crise sanitaire où les Français ne peuvent plus aller au cinéma, au restaurant, au bar, au musée, à la piscine, au stade, ou même sortir de chez eux après 18 heures, une petite fenêtre de foot en clair serait peut-être la plus belle des distractions. Des affiches comme Bordeaux-Marseille, Lyon-Montpellier, Rennes-Saint-Étienne, Lille-Brest, Nantes-OM, Brest-Lyon, PSG-Monaco, OM-OL et même Reims-Lens, toutes programmées en février, trouveraient sans doute leur public sur TF1, France Télévisions, M6 ou une autre chaîne de la TNT. Un doux rêve, une touchante nostalgie et un dernier kiff avant de retrouver notre feuilleton préféré entre les mains de ces très chers Canal + ou beIN Sports au bout d’un appel d’offres à plusieurs centaines de millions d’euros (oui, il faut dire adieu au milliard). L’heure est venue de rouvrir les yeux, un voyage en utopie n’est jamais désagréable.
Par Clément Gavard, en clair