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- 34e journée
- FC Barcelone/Bétis Séville
La Liga sans saveur du Barça
Vraisemblablement sacré champion d'Espagne ce dimanche soir, le Barça n'a bien que cette breloque pour lui rendre le sourire. Pourtant, après une saison en demi-teinte sur le plan du jeu, cette Liga ne lui offre que des points d'interrogation. Et un arrière goût amer.
Dans quelques heures, le FC Barcelone sera vraisemblablement champion d’Espagne. Une simple victoire sur le Betis Séville lui suffit. Pour la 22e fois de son histoire, le public culé encensera ses champions et trônera donc sur l’Espagne du football. Fièrement. Une fierté à l’encontre de son rival madrilène, relégué à une dizaine de points depuis des lustres, mais qui ne saura faire oublier une fin de saison désordonnée. Sur le plan domestique, les statistiques blaugrana font pourtant rougir. La barre des cent buts est déjà franchie et, centaine toujours, le Barça peut s’imaginer avec un total à trois chiffres au soir de la trente-huitième journée. Mais, à l’instar d’un Xavi auteur de 100 % de passes réussies face au Bayern ou d’une possession de balle toujours autant stalinienne, les chiffres sont trompeurs. Lorsque Gerard Piqué pointe du doigt les faiblesses du FCB version Tito Vilanova, sa direction doit l’écouter et mettre l’introspection à l’ordre du jour de la prochaine réunion du board. Car ce championnat d’Espagne laisse un goût amer au fond des gorges catalanes. Il manque de saveur.
L’absence des grands rendez-vous
Après trentre-trois épisodes domestiques et une demi-finale en Ligue des champions – la sixième de rang – le Barça de Tito n’a que trop peu répondu présent lors des grands rendez-vous. Ce sont bien des victoires sur les terrains de Valladolid, Getafe ou encore Saragosse qui lui ont offert ce 22e titre. Jusqu’à preuve du contraire, elles valent le même nombre de points. Mais, dans l’imaginaire général, ce sont les Clásicos qui marquent une saison et les esprits. Or, durant l’exercice 2012-2013, le Barça ne s’est imposé qu’une fois face au Real Madrid – et encore, c’était lors du premier rendez-vous annuel en Supercopa. Depuis, deux matchs nuls et deux défaites, dont une cuisante en retour de Copa del Rey. Même topo sur la scène européenne où le Camp Nou n’a connu qu’une seule nuit blanche : celle du 4-0 face à un Milan AC en pleine reconstruction. Avant sa déroute bavaroise, Barcelone s’était hissé en demie sans la moindre victoire face au PSG. « Le Barça a achevé son dernier match face au Bayern sans les quatre footballeurs qui le définissent et qui lui sont vitaux pour la Liga : Xavi, Messi, Busquets et Iniesta » , souligne Ramon Besa du País. Un arrêt sur image qui a tout de symbolique et qui pointe du doigt un sujet tabou : ce Barça n’est pas mort les armes aux pieds. Là où le dernier trophée de Pep Guardiola était une œuvre collective, le premier de Tito Vilanova n’est qu’une accumulation de performances individuelles et de méformes madrilènes. Tout sauf l’âme du Camp Nou. Tout sauf l’identité du toque.
Le Barça ne peut s’en satisfaire
De l’extérieur, la communication du Barça ne laisse rien transparaître de cette possible remise en cause. En conférence de presse pré-sévillane, Tito Vilanova, de retour face aux journalistes, a repoussé avec insistance les souhaits de Piqué : « Il n’y aura pas de révolution. » « Les choses, de temps en temps, doivent être pensées de manière optimiste. Nous devons penser que nous avons un grand effectif, une base très importante et de très jeunes joueurs » , a poursuivi le technicien catalan. Un sourire de façade, car de l’intérieur, la réalité est tout autre. Le socio barcelonais ne peut se satisfaire d’un simple résultat trop rationnel, le board ne le sait que trop bien. À l’art doivent se juxtaposer la manière, la saveur. Mais Tito ne doute pas, il « ne doute pas de ces joueurs qui nous ont tant donné. Mon idée n’a pas changé après le Bayern. Ce qui est difficile, c’est de trouver des joueurs du niveau du Barça et qui peuvent s’intégrer ici, si nous souhaitons jouer de cette manière. » Certes, Xavi reste le Barça, mais quel Barça ? Un gagnant sans panache – on exagère hein. « Aujourd’hui, il y a des facteurs du jeu qui sont préoccupants. L’équipe a perdu de la passion, de la créativité, les attaquants ne pressent plus, les milieux n’élaborent plus et la défense n’assure plus la transition, poursuit Ramon Besa. Il y a moins de contrôle, ce qui entraîne une prévisibilité et une routine. Parfois, il n’a pas manqué que l’intensité et l’agressivité, mais le résultat a provoqué de l’inertie. » De révolution, personne ne la souhaite sur les Ramblas. Seulement un retour aux sources sans colorant ni conservateur.
Par Robin Delorme, à Madrid