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Ligue 1 McDonald’s : vendez comme vous êtes
Le foot a les crocs. La LFP, face aux effets pervers de son baiser du diable avec CVC, doit augmenter ses revenus sur tous les fronts, à commencer par le naming. La Ligue 1 Uber Eats pourrait donc devenir la Ligue 1 McDonald’s la saison prochaine. Le ridicule ne tue pas, mais il peut rapporter gros.
La journée semblait devoir être monopolisée par le choc entre le PSG et la Real Sociedad ou le suspense concernant la titularisation de Kylian Mbappé (finalement évidente et payante). Pendant ce temps-là, une autre nouvelle, peut-être tout aussi importante que le départ annoncé du génie français de notre championnat, a pointé le bout de son nez et fait causer : la Ligue 1 Uber Eats pourrait devenir la Ligue 1 McDonald’s. Une information dévoilée par RMC, avant que L’Équipe ne confirme ce mardi soir l’avancée des négociations entre la LFP et la chaîne américaine de fast-food, dont le logo serait plus connu dans le monde que la croix.
Ronald, qui n’est clairement pas abonné à Prime Video, serait prêt à débourser 20 millions d’euros par an (contre 16 millions actuellement de la part d’Uber Eats, qui n’a pas les moyens ou l’envie de surenchérir). Pour l’instant, la Ligue cultive le mystère, mais ne dément pas : « Nous sommes actuellement en discussion active sur le naming de la Ligue 1 pour les saisons futures. Nous ne ferons aucun commentaire sur d’éventuelles rumeurs et nous communiquerons une fois que les décisions sont finalisées et validées par nos instances. »
Il n’y a pas de bon naming
Naturellement, ce choix, avant tout économique, va faire le bonheur des amateurs de gazouillis et de vannes faciles sur André-Pierre Gignac, voire inspirer quelques tifos dans les tribunes de France et de Navarre. Il n’y a pas forcément matière à s’indigner. Une fois le Rubicon du naming franchit, que ce soit pour une enceinte ou un championnat, il n’existe pas de juste milieu ou de sortie par le haut. Vu les sommes concernées, il y a peu de chance d’échapper à une grosse boîte, voire une multinationale (on imagine mal des labels de musique tel que Born Bad en France ou Warp Record en Angleterre nous offrir ce petit bonheur d’esthète).
La L1 reste en tout cas dans le secteur de la restauration, avec une certaine cohérence, pas franchement classe, dans sa ligne de conduite commerciale. Les esprits critiques pourront s’amuser à souligner le paradoxe de voir l’étendard de la malbouffe venir apposer son nom au fronton d’un sport censé rimer avec santé. Pour être honnête, il ne s’agit que d’une prolongation logique de la stratégie marketing des bolcheviks du hamburger. Depuis un bout de temps, la firme n’hésite pas à se présenter, notamment dans ses pubs, en doudou culinaire du supporter (ce qui n’est pas totalement faux, et les McDo ont fleuri depuis longtemps à proximité des stades). Cela dit, les dégâts occasionnés au droit du travail en France par Uber n’ont rien à envier au déficit de la sécu que creusent les frites tièdes et les nuggets mous.
La Ligue 1 veut grossir avec McDo
La LFP s’en moque. Vincent Labrune est une calculatrice ambulante, un rôle pour lequel il a été choisi et qu’il remplit du mieux qu’il peut. Les clubs vont même peut-être imaginer que ce naming prouve la valeur de la Ligue 1, y compris à l’étranger. Il a presque finalement la vertu d’éclairer le véritable visage de leur projet, fort éloigné de la nostalgie de la Jupiler League belge. Le foot français continue de manquer d’élégance quand il vend son âme (disons que la Barclays Women’s Super League possède, d’un point de vue capitaliste, une autre stature).
Il faudra surtout s’habituer à ce foot qui se transforme en gigantesque Disneyland pour tenter à tout moment et à n’importe quel prix de rentabiliser son business plan. Et hormis une quelconque restriction législative, comme la loi Évin, pour encadrer un tant soit peu cette évolution (ou pour les taxer comme avec les paris sportifs), nous n’en sommes qu’au début. Les marchands du temple n’ont pas encore sorti toutes leurs échoppes.
Par Nicolas Kssis-Martov