- Serie A
- 32è journée
- Juventus/Lazio
La Juve ne veut plus rien lâcher
Après sa victoire ce week-end contre Palerme, la Juventus a repris la tête de la Serie A, profitant de la défaite du Milan AC. Alors que les Milanais se sont ressaisis hier soir contre le Chievo, les Turinois ont désormais sept matches pour aller au bout. Première finale, ce soir, contre la Lazio.
L’histoire est belle. Presque trop belle. Chassé, banni par les dirigeants de la Juventus au mercato dernier, Amauri inscrit le but qui permet à la Vieille Dame de repasser en tête du classement. Un Amauri qui se serait bien passé de faire une telle faveur à ses anciens supporters qui l’avaient tant décrié. Mais le destin a voulu que ce soit lui, maillot violet sur les épaules, qui plante un couteau dans le dos du Milan AC. Avec un genou à terre, le Diavolo a assisté, impuissant, au « sorpasso » de la Juve, qui récupère ainsi une première place abandonnée le 3 mars dernier, après son match nul à domicile contre le Chievo. Depuis, la Juve n’a plus encaissé le moindre but, et a enchaîné un nul et quatre victoires contre la Fiorentina (5-0), l’Inter (2-0), le Napoli (3-0) et Palerme (2-0).
Et boum, voilà les bianconeri à nouveau en tête, avec un Milan qui se demande encore comment il a fait pour se faire rattraper cinq points en deux journées. Ouais mais voilà. Maintenant que la Juve est devant (même si, depuis hier soir, Milan a repris deux points d’avance avec sa victoire à Vérone), elle ne va plus pouvoir adopter le discours du « nous sommes le poursuivant, donc nous n’avons rien à perdre » . De poursuivante, elle est passée en quelques jours à poursuivie. Inversion des rôles et donc, forcément, une pression qui passe d’un camp à un autre. Même si Conte continue de rappeler qu’il n’a « jamais prononcé le mot Scudetto » (il devait être super fort au jeu du « ni oui ni non » alors), il ne peut plus se cacher. La Juve court vers son 28ème Scudetto et désormais, tout le monde y croit. La vraie question étant : les bianconeri ont-ils le mental pour gagner ce soir, et conserver jusqu’au bout ce tout petit point d’avance sur la formation d’Allegri ?
« Gagner, et basta »
La donne est très simple. La Juve demeure la seule équipe invaincue en Europe cette saison. 35 matches sans la moindre défaite toutes compétitions confondues. Il en reste huit, sept en championnat et la finale de Coupe d’Italie contre le Napoli. Avec huit victoires, donc, l’équipe d’Antonio Conte réaliserait un incroyable doublé (son dernier doublé Coupe-championnat remonte à 1995) et grimperait sur le toit de l’Italie. Un scénario impensable si l’on se projette quelques mois en arrière, lorsque l’équipe turinoise terminait piteusement l’exercice 2010-11 à la septième position. Depuis, l’effet Conte a opéré, et la Juve se retrouve à lutter pour le titre. La méthode du coach est élémentaire : transmettre sa passion et ses convictions à ses joueurs. « Nous devons gagner, et basta. Mon discours ne changera pas jusqu’à la fin de la saison » a-t-il martelé tel un mort de faim après la victoire contre Palerme, ce week-end.
Puis, à froid, à quelques heures du match contre une Lazio qui vient de battre le Napoli et de consolider sa troisième place au classement, Conte la joue plus réservée. Comme pour dédramatiser la confrontation décisive face aux biancocelesti. « Nous voulons jouer toutes nos cartes sans avoir aucun regret. Le Milan AC est une superpuissance, un escadron né pour réaliser le grand chelem. Nous le prenons comme exemple. L’important, c’est de sortir du terrain avec le maillot mouillé, comme nous avons fait depuis la première journée. Il est clair que nous essaierons jusqu’à la fin, mais le résultat final ne changera rien au fait que notre saison a été extraordinaire » a-t-il assuré. Pas faux, même si, du côté du Juventus Stadium, forteresse invincible depuis son inauguration, on n’est pas franchement du même avis. Les récentes polémiques avec le club rossonero n’ont fait qu’amplifier l’envie de s’imposer, et le cadeau de Pâques d’Amari semble tombé à point nommé. Comme un signe du destin.
Etape de montagne et maillot rose
La force de cette folle équipe emmenée par Antonio Conte, c’est aussi la remarquable condition athlétique des joueurs. Très peu de blessés, contrairement aux autres équipes du haut de tableau (Milan et Lazio en tête). Logique : avec un effectif complet et au top, le coach peut aligner toujours les onze meilleurs et a rapidement trouvé son ossature idéale. S’est ainsi rapidement dessiné un 3-5-2 qui permet aujourd’hui à la Juve de vanter la meilleure défense d’Italie, mais aussi d’Europe. 17 buts subis en 31 matches, pour une moyenne de 0,54 buts encaissés par match. Seul le FC Porto fait aussi bien, mais avec cinq matches en moins (17 buts pris en 26 journées, soit 0,65). Une défense de fer, qui contraste quelque peu avec une attaque parfois poussive. Si les chiffres disent que seuls le Milan (62) et le Napoli (55) ont marqué plus que la Juve (51), la réalité montre une équipe qui n’a pas encore trouvé son vrai avant-centre. La preuve : le meilleur buteur turinois, Alessandro Matri, n’a planté que 10 buts en championnat.
Certains verront ça comme la force du collectif (pas besoin d’avoir un buteur quand l’équipe tourne à plein régime), d’autres comme une faiblesse qui pourrait avoir son importance lors du sprint final. De fait, lors de ses trois dernières victoires (Inter, Napoli et Palerme), la Juve a dominé son sujet, mais n’est parvenue à débloquer la situation qu’en seconde période, toujours des suites d’un coup de pied arrêté de Pirlo. L’ironie veut qu’à chaque fois, c’est un défenseur (Caceres puis Bonucci deux fois) qui a ouvert le score. Ce soir, donc, mêmes consignes. Dans un stade qui s’annonce archi-comble, la Juve va tenter d’engranger un cinquième succès de rang, contre l’adversaire le plus coriace qui demeure dans son calendrier. Après quoi, la route vers le titre l’opposera à Cesena, la Roma, Novara, Lecce, Cagliari et l’Atalanta. Autant dire que ce Juventus-Lazio ressemble fortement à un dernier col avant le sprint qui mène à la ligne d’arrivée. Aux bianconeri de prouver qu’ils sont dignes de leur maillot rose.
Eric Maggiori