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La jeunesse romaine d’Ancelotti

Par Éric Maggiori
La jeunesse romaine d’Ancelotti

Ce samedi, Carlo Ancelotti sera suspendu pour la rencontre entre la Roma et le Napoli, au stadio Olimpico. Le coach a été sévèrement expulsé à la fin du match entre Naples et l'Atalanta. Il loupera donc les retrouvailles avec son amour de jeunesse, la Roma, où il a évolué pendant huit saisons.

Quand on pense à Carlo Ancelotti gambadant sur une pelouse de football, on l’imagine avec le maillot de l’AC Milan. Et pour cause, c’est avec les Rossoneri que Carletto a constitué la partie la plus clinquante de son palmarès, en remportant deux Scudetti (1988, 1992), deux Coupes des champions (1989, 1990), deux Supercoupe UEFA (1989, 1990), deux Coupes Intercontinentales (1989, 1990) et une Supercoupe d’Italie (1988). Pourtant, ce n’est pas à Milan que Carlo est devenu l’un des meilleurs milieux de terrain de la Botte. Ni même en Lombardie qu’il a remporté ses premiers trophées. Non, c’est bien à Rome, rive giallorossa, qu’il a plongé dans le grand bain. Et y repenser ne va pas rajeunir le Mister : c’était il y a 40 ans, déjà.

Un doublé pour la montée

L’histoire d’amour commence le 17 juin 1979. Carlo Ancelotti a alors 19 ans. Il joue à Parme, le club de sa région natale, en Serie C1. Parme vient de terminer deuxième de troisième division, et a donc le droit de disputer un barrage pour monter en Serie B. Ce match se joue sur le terrain neutre de Vicenza, contre la Triestina. Le coach parmesan est un certain Cesare Maldini – son fiston, Paolo, vient d’intégrer les jeunes de l’AC Milan. Comme tout au long de la saison, il aligne Ancelotti en milieu offensif derrière les deux attaquants, Bonci et Scarpa. Et Ancelotti ne va pas le décevoir. 1-1 au terme des 90 minutes. Prolongation. Parme est même en infériorité numérique à la suite du malaise d’Agretti, mais le jeune Carlo va sortir sa cape et se transformer en héros. En l’espace de quelques minutes, aux 95e et 103e minute, il plante deux buts qui permettent à Parme de mener 3-1, et de valider son billet pour la Serie B.

Ce jour-là, en tribunes, se trouve l’état major de la Roma : le président Dino Viola, le directeur sportif Luciano Moggi, et l’entraîneur Nils Liedholm. Ils étaient venus superviser Ancelotti, ils n’ont pas été déçus. Liedholm le veut absolument, mais les dirigeants romains doivent faire face à la concurrence de l’Inter. Les Nerazzurri sont sérieux : un an plus tôt, ils ont même invité Ancelotti à jouer un match amical à San Siro avec le maillot de l’Inter. Le président Dino Viola sent qu’il y a urgence, et donne donc carte blanche à Moggi. Le futur dirigeant de la Juventus ne tergiverse pas : il balance une offre de 1,5 milliard de lires (775 000 euros, énorme à l’époque). Le boss de Parme, de son propre aveu, aurait aimé conserver sa pépite au moins une année de plus, mais ne peut refuser une telle offre. Nous sommes à l’été 1979, et Carlo Ancelotti devient officiellement un joueur de l’AS Roma.

L’homme des finales

Comme un signe du destin, son aventure romaine (et donc sa carrière en Serie A) débute par un Roma-Milan, le 16 septembre 1979, terminé sur le score de 0-0. Les premières semaines sont difficiles, s’adapter à la vie dans une capitale, alors que le gamin a grandi à la campagne, n’est pas évident. Un peu plus d’un mois plus tard, histoire de la plonger encore un peu plus dans la réalité romaine, Ancelotti est présent sur la pelouse du stadio Olimpico lors du derby où Vincenzo Paparelli, un supporter de la Lazio, est tué par une fusée de détresse lancée par un tifoso de la Roma. Drôles de débuts.

Par la suite, Ancelotti s’impose rapidement comme une valeur sûre de la Serie A. Le mage Liedholm a dessiné une Roma magnifique, avec Falcao, Pruzzo, Conti, et il a décelé en Ancelotti un milieu de terrain récupérateur (le fameux « mediano » en italien), à l’inverse de Maldini qui le faisait jouer plus haut pour profiter de son sens du but. À la fin de la saison 1970-1980, la première pierre : Carlo remporte le premier trophée de sa carrière, une Coupe d’Italie. C’est d’ailleurs lui qui inscrit le tir au but vainqueur en finale, contre le Torino. Bis repetita la saison suivante : la Roma remporte à nouveau la Coupe d’Italie, encore contre le Torino, et Ancelotti marque lors de la finale aller (1-1), avant de transformer son tir au but lors de la finale retour (1-1, 4 tab 2). Comme quoi, malgré ses 22 ans, le bonhomme ne tremble jamais dans les grands rendez-vous.

Le fail de Roma-Lecce, puis le départ

L’idylle romana de Carlo Ancelotti va durer huit ans. Le point culminant ? Sans nul doute ce Scudetto remporté le 8 mai 1983, le deuxième de l’histoire de la Roma. Or, un Scudetto à Rome en vaut dix ailleurs… Mais cette idylle est également – et malheureusement – ternie par de nombreuses blessures. Aux genoux. D’abord les ligaments du genou droit, en octobre 1981, avec rechute début 1982. Une blessure qui lui fait manquer le Mondial 82 que l’Italie remporte… Carlo serre les dents et revient. Mais en décembre 1983, deuxième cauchemar : le genou gauche saute lors d’un Roma-Juventus. Certains pensent que sa carrière va s’arrêter là. Lui s’accroche, même s’il souffre : cette blessure l’empêche en effet de participer à l’épopée de la Roma en Coupe des champions. Les Giallorossi s’inclinent en finale, à domicile, face à Liverpool, aux tirs au but. Lors de cet exercice, ils ne réussissent que deux tentatives sur quatre. Qui sait comment tout cela se serait terminé si Ancelotti, spécialiste en la matière, s’était avancé au point de penalty…

Une fois revenu de blessure, et profitant du départ d’Agostino Di Bartolomei à l’AC Milan, Carlo Ancelotti devient capitaine de la Roma. En tant que Capitano, il remporte une nouvelle Coupe d’Italie (1986), mais perd aussi un invraisemblable Scudetto la même année. Leader à une journée de la fin, la Roma s’incline 3-2 à domicile face à Lecce, déjà relégué en Serie B, et laisse la Juve lui chiper la première place et empocher le titre une semaine plus tard.

Un an plus tard, en mai 1987, Ancelotti met un terme à sa love story avec la Roma, après huit saisons, 227 matchs joués et cinq trophées remportés. Dino Viola, le président de la Roma, pense que les meilleures années d’Ancelotti sont derrière lui. Mais à Milan, quelqu’un n’est pas du même avis. Un certain Arrigo Sacchi, nouveau coach de l’AC Milan, en a fait l’une de ses priorités pour faire du Milan la meilleure équipe du monde. Il convainc son président, Silvio Berlusconi. Un joli chèque de 5,8 milliards de lires plus tard, son souhait est exaucé : Ancelotti le rejoint à Milan. C’était il y a 32 ans et depuis, Carlo n’est jamais revenu à Rome en tant qu’autre chose qu’un respectable adversaire.

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