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- 36e journée
- Inter Milan/Juventus Turin
La jeunesse bianconera de Mancini
Mancini et la Juve, c'est une histoire d'amour à sens unique. Le beau gosse a souvent clamé haut et fort son attraction pour la Vieille Dame, mais jamais elle ne lui a rendu quoi que ce soit.
Dans le monde du foot, l’honnêteté n’est pas vraiment une qualité. C’est plutôt une faiblesse. Pour preuve, à chaque fois que Mancini croise la route de la Juve, on remet ses sentiments passés sur la table. On lui demande si ça va. Si ce n’est pas trop dur de jouer contre son amour de jeunesse. S’il s’en est remis depuis. S’il croit toujours que ça peut coller entre eux. Car Roberto ne s’en est jamais caché : petit, son cœur s’emballait pour la Juventus. Il en parle aujourd’hui comme s’il avait digéré cet échec, car il a connu de nombreuses autres histoires depuis. Mais on sent toujours une pointe d’amertume, de regret dans ses mots. Car tant joueur qu’entraîneur, il ne s’est jamais rien passé entre eux. Tout juste des espoirs.
À un jour près
En fait, le petit Roby, natif de Jesi, une petite ville du Centre–Est de l’Italie, n’a pas eu le choix d’aimer qui il voulait. Comme beaucoup d’enfants, c’est son père, Aldo qui l’a poussé dans les bras de son équipe. La Vieille Dame en l’occurrence : « La première fois, il devait avoir 6 ans. Et par la suite, je l’emmenais dès que je le pouvais au stade. Il est même venu voir des « Derby della Mole » » , se rappelle Aldo dans le Corriere Adriatico. Des souvenirs que son fils raconte lui aussi, dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport, avec beaucoup de passion : « On se rendait souvent au stade le dimanche, avec le bus du Juventus Club Jesi. Nous partions à 6 heures du matin avec un pique-nique préparé par ma mère. Sept heures de voyage, mais ça ne nous embêtait pas, on était des supporters passionnés. »
Le temps passe et le petit Roby devient grand. Il fait ses débuts en pro à Bologne à 17 ans. Et puis il est transféré à la Samp, à l’été 1982. Les vacances durant lesquelles il a raté le coche. La seule et unique opportunité qu’il a vraiment eue et loupée. « Et si Boniperti (le dirigeant de la Juve de l’époque) avait passé un certain coup de fil une journée plus tôt ? Il a appelé Bologne le lendemain de mon transfert à la Samp, regrette le Mancio dans la Gazzetta. Si j’avais reçu les deux coups de fil en même temps, j’aurais choisi la Juve. C’était la première saison de Platini, j’aurais commencé sur le banc de touche. Mais j’aurais trouvé rapidement un moyen de m’intégrer avec Michel et vous auriez assisté à beaucoup de belles parties ! » Trop tard, les yeux de Robert s’éloignent. Son cœur aussi.
Éternel rival
Sampdoria. Lazio. Leicester. Fiorentina. Encore Lazio. Inter. City. Galatasaray. Et enfin encore Inter. Aujourd’hui, Roberto n’y croit plus, mais il cultive sa nostalgie. Comme on romance une vieille histoire pour la rendre plus belle qu’elle ne l’était vraiment : « Vous connaissez les fées avec leurs baguettes magiques, qui vous demandent d’exprimer un vœu ? Si j’en croisais une et que je pouvais en réaliser un, je choisirais de redevenir jeune pour une journée – aujourd’hui – et de jouer un match à Turin » , a déjà confessé Roberto, en conférence de presse. Il a souvent fait du pied à la Juve de la sorte. Des flatteries peut-être dans l’objectif d’obtenir une seconde chance. Mais il n’a jamais eu de réponses claires. Ni positives, ni négatives. Au lieu de ça, Mancini est devenu une sorte d’ex gênant pour la Juve. La Supercoupe de 2005 avec l’Inter. L’élimination en poule de C1 en 2013 avec Galatasaray. Pas spécialement une bête noire, mais surtout une source de mauvais souvenirs pour la Vieille Dame.
Avant le match de ce samedi soir, on a encore eu la preuve que Mancini garde une place spéciale dans son cœur pour la Juve. Encore une fois, les journalistes en sont venus à parler de cet amour « imaginé » . Et encore une fois, il a répondu volontiers : « La Juve a fait une année extraordinaire. Scudetto, finale de Coupe, finale de Ligue des champions. Elle doit être super heureuse de ce qu’elle a accompli. Et puis qui sait ce qu’il peut se passer contre le Barça ? {…} À Berlin, il peut tout arriver parce que la Juve a un entraîneur qui connaît son affaire. » Typiquement le genre de réactions que l’on a quand on a des « bonnes » nouvelles de son ex. Le bon côté des choses pour Mancini, c’est que ce samedi soir, la Juve est déjà championne et qu’elle sera en plus remaniée pour cause de repos forcé. Il peut donc gagner sans trop s’en vouloir.
Par Ugo Bocchi