- CDM 1998
- Finale
- Brésil-France (0-3)
La France est championne du monde, oui messieurs dames !
L’équipe de France a remporté sa première Coupe du monde, ce soir à Saint-Denis, en dérouillant le Brésil (3-0). Le doublé de Zidane (de la tête !) et le but de Petit donnent déjà envie d’être à l’Euro 2000, conjointement organisé par les Pays-Bas et nos humbles voisins belges.
Brésil 0-3 France
Buts : Zidane (27e, 45e+1), Petit (90e+3)
L’équipe de France est championne du monde. Vous le croyez ça ? L’équipe de France est championne du monde en battant le Brésil 3-0. Deux buts de Zidane, un but de Petit. Après avoir vu ça, Thierry Roland peut mourir tranquille. Enfin le plus tard possible (mettons une pièce sur 2012), mais il peut. Ah c’est superbe ! Quel pied ! Quel pied ! Oh putain, oh lalalalalala. Oh c’est pas vrai… Si, c’est vrai, et ça s’est passé ce soir au Stade de France, devant 80 000 personnes qui se souviendront jusqu’à leur dernier souffle le moment qu’ils ont vécu.
Zidane, au bon endroit au bon moment
La France a décroché sa première étoile et on a envie de tout oublier, de ne retenir que ça et ces 90 minutes de maîtrise jouissive face au Brésil. Le reste ? On aura bien le temps de le raconter à nos gamins plus tard. On les obligera à poser deux secondes leur discman pour regarder la VHS avec nous. On se rappellera alors qu’avant que le jour de gloire n’arrive, ce groupe s’est construit dans la douleur. De son huitième de finale contre le Paraguay (1-0 ap) jusqu’à la demi-finale face à la Croatie (2-1), seuls des défenseurs ont marqué pour la France. C’est dire le niveau offensif de cette sélection. Ce soir, Zinédine Zidane a toutefois réussi à tirer son épingle du jeu. La lumière est venue de son crâne, qui a bénéficié de deux corners parfum caviar d’Emmanuel Petit (0-1, 27e) et de Youri Djorkaeff (0-2, 45e+2). On pourrait aussi retenir de ce match que Zinédine Zidane s’est enfin comporté comme un vrai meneur de jeu, un homme par qui tout passe et qui fait rayonner les copains. Mais on saluera plutôt son attitude irréprochable. Depuis son stupide pétage de plombs contre l’Arabie saoudite en poule qui lui avait valu d’être suspendu contre le Danemark puis le Paraguay, on ne savait plus sur quel pied danser avec le joueur de 26 ans. Face au Brésil, il a prouvé qu’il n’était pas du genre à perdre ses nerfs en finale d’un Mondial et c’est toujours bon à savoir pour l’avenir.
Il faut dire que pendant 90 minutes, Zizou ne s’est jamais retrouvé dans un contexte propice à la baston. La Seleção a été bien trop tendre pour cela, dépassée dans tous les compartiments du jeu. Ou alors elle n’était pas tendre, mais les Bleus étaient bien trop durs, à l’image de son capitaine Didier Deschamps, irréprochable à la récupération et dans la relance. Son tacle d’animal dans les pieds de Rivaldo (13e) puis la récupération une minute plus tard dans les pieds de Ronaldo (le vrai, pas ce Portugais de 13 ans bourré de talent qui brille avec le CD Nacional !) ont donné le ton. Mais Deschamps n’a pas été le seul à montrer le chemin de l’agressivité. Marcel Desailly a encore été magnifique et illustré le fait que si la France est championne du monde, elle le doit avant tout à sa défense. Desailly a aussi prouvé que l’on pouvait être à la fois magnifique et un peu bête. Comment ? En profitant d’une action où il s’est retrouvé en position d’avant-centre pour découper Cafu (68e). Le genre de truc pas très malin quand on a été averti en début de deuxième mi-temps. Carton rouge, vestiaire, stress.
Lebœuf a avalé Ronaldo
En infériorité numérique, les Français auraient pu craquer face au quadruple champion du monde brésilien. Mais les vainqueurs de la dernière édition aux USA n’ont jamais vraiment réussi à inquiéter Barthez. Ronaldo, qui avait disparu de la feuille de match une heure avant le coup d’envoi et dont on dit qu’il aurait passé la nuit dernière dans une clinique, a finalement tenu sa place. Il aurait mieux fait de rester chez lui, tant il a été transparent, son match se résumant à un gros choc avec Barthez.
Le prometteur avant-centre brésilien (21 ans), auteur de 4 buts dans le tournoi, n’a été que l’ombre de lui-même, avalé par un Frank Lebœuf qui a complètement fait oublier Laurent Blanc qui, rappelons-le, était suspendu à cause du geste nauséabond adressé à l’encontre de Slaven Bilić en demi-finale. L’avenir auriverde pourrait bien appartenir à Ronaldo, mais aussi au virevoltant Denilson (20 ans), entré à la mi-temps à la place de Leonardo (quelle erreur de marquage sur l’ouverture du score !) et auteur de plusieurs gestes de grande classe. Son dernier ballon touché est un délicieux corner qu’aucun coéquipier n’a été capable d’exploiter. Au lieu de ça, Christophe Dugarry a amorcé une ultime contre-attaque et servi Patrick Vieira qui a lui-même mis sur orbite Manu Petit en une touche de balle. Parti dans le dos de Cafu, Petit a croisé sa frappe du gauche, hors de portée de Claudio Taffarel (0-3, 90e+3).
Guivarc’h ovationné
Vous n’avez pas rêvé, Dugarry a bien joué ce soir. Il a remplacé le valeureux Stéphane Guivarc’h (65e), applaudi comme il se doit par un public de connaisseurs du Stade de France qui s’est souvenu que le deuxième but de Zidane était le fruit d’un corner glané par le goleador de l’AJ Auxerre. Reste que l’ancien joueur de Guingamp boucle son Mondial sans le moindre but. On imagine mal la France redevenir un jour championne du monde sans que son numéro 9 ne plante le moindre but.
Le Brésil pleure, la France aussi, mais pour d’autres raisons. Tout est beau à voir, notamment le bisou de Laurent Blanc sur le crâne de Barthez. Espérons qu’une chaîne de fast-food américaine ait la bonne idée d’en faire un spot publicitaire ! Blanc n’est pas le seul « président » à embrasser des têtes. Plus loin, Jacques Chirac, président de la République, étreint tout ce qui bouge, de Michel Platini à Marie-George Buffet en passant par son Premier ministre Lionel Jospin.
Il y a de l’amour et il y a aussi de la violence. Juste avant le coup de sifflet final, Roger Lemerre, adjoint de Jacquet, n’a pas réussi à décoller sa main de Thierry Henry. « Roger, tu me broies l’épaule ! » , lâche le moustachu attaquant monégasque de 19 ans. Réponse de Lemerre : « Viens là, m’abandonne pas ! » On se doute que Thierry Henry n’abandonnera jamais l’équipe de France. Et on se dit aussi qu’un homme qui a la poigne de Roger Lemerre a tout ce qu’il faut pour succéder à Aimé Jacquet.
Brésil (4-4-2) : Taffarel – Cafu, Aldair, Junior Baiano, Roberto Carlos – Cesar Sampaio (75e Edmundo), Dunga, Rivaldo, Leonardo (46e Denilson) – Ronaldo, Bebeto. Sélectionneur : Mario ZagalloFrance (4-3-2-1) : Barthez – Thuram, Lebœuf, Desailly, Lizarazu – Deschamps, Karembeu (56e Boghossian), Petit – Zidane, Djorkaeff (74e Vieira) – Guivarc’h (65e Dugarry). Sélectionneur : Aimé Jacquet
Par Matthieu Pécot, dans un camping à Fouras (Charente-Maritime)