La défaite de Didier Deschamps

« Je garderai quelques bons souvenirs de cette soirée, même si je suis un peu dégoûté. » Venu réagir au micro de TF1 au coup de sifflet final, Axel Disasi peinait à trouver le sourire après le revers de l’équipe de France face à la Tunisie, en clôture de la phase de poules. Comme à chaque grand tournoi depuis qu’il est assis sur le banc des Bleus (à l’exception de l’Euro 2020), Didier Deschamps arrivait dans la peau d’un homme qualifié pour la suite et prêt à faire tourner. Il y a eu l’Équateur, la Suisse et bien sûr l’horrible match face au Danemark, voilà quatre ans. Une rencontre lors de laquelle Thomas Lemar, Presnel Kimpembe ou Djibril Sidibé avaient joué dans une position qu’ils maîtrisent, au moins. Rien de plus logique alors à voir les Bleus largement moins flamboyants que face à l’Australie et le Danemark, la faute notamment à neuf changements dans le XI de départ (contre six lors de chacun des trois précédents).

Jeunesse perdue

Une différence majeure toutefois pour cet opus 2022 : la France a perdu, tout d’abord. Mais surtout, le boss des Bleus, s’il a pu reposer ses cadres, a perdu son pari sur ce coup-là. À vouloir absolument aligner tous ses seconds couteaux, il s’est retrouvé à faire jouer de trop nombreux joueurs à des postes inconnus. Qui sait si Eduardo Camavinga ou Axel Disasi, loin d’être inoubliables dans les couloirs, pourront retrouver une certaine confiance s’ils doivent à nouveau prêter main forte, plus loin sur la route qui mène à la troisième étoile ? Comme avec Igor Tudor à l’OM, Matteo Guendouzi a évolué bien haut, sans aucun succès, pendant que Randal Kolo Muani se démenait comme il pouvait sur le front de l’attaque. Clairement pas la meilleure manière de mettre dans le bain sept joueurs à six sélections ou moins, dont aucune dans un Mondial.

La plus grosse inquiétude concerne probablement le poste des latéraux. D’un côté, Theo Hernandez qui doit tenir le couloir gauche alors que l’alternative Camavinga a pris du plomb dans l’aile. De l’autre, des centraux qui se succèdent sans convaincre. Qui pour le huitième de finale ? Pendant ce temps-là, Ferland Mendy, Lucas Digne, Jonathan Clauss et même Layvin Kurzawa observent tout ça depuis leur canapé. « Il y a des défenseurs centraux que je considère comme des latéraux », martelait Deschamps dès l’annonce de sa liste. Mais la formule gagnante de 2018 semble avoir pris un énième coup de vieux avec la blessure d’entrée de tournoi de Lucas Hernandez.

Couper l’élan

Sans compromettre les chances des champions du monde pour la suite, une défaite en Coupe du monde – la première en poules depuis 2010 pour les Bleus – n’est jamais complètement anodine. Axel Disasi – premier joueur à fêter sa première cape dans le tournoi depuis plus de 50 ans (Gabriel De Michèle en 1966) – et consorts devront se défaire de cette contre-performance pour relever la tête et s’installer en sélection. « Je ne dirais pas que la dynamique est coupée, parce que le coach a fait tourner et gratter quelques minutes à tout le monde, pour que l’on reste éveillés et qu’on puisse aider nos copains à n’importe quel moment. C’était une bonne expérience, on sait à quoi s’attendre, il faut juste être concentré et prêt, récitait un autre bizut, Randal Kolo Muani, en zone mixte. C’était un peu compliqué pour tout le monde, c’était une première. »

« On a eu des difficultés de par les choix que j’ai faits. Ça devra nous servir dans quatre jours, ne pouvait que reconnaître DD auprès de la Une. Ça permet aux entrants de voir la différence qu’il y a, c’est un match de Coupe du monde. L’objectif est atteint, on va récupérer, une deuxième compétition va démarrer. » Avec ce que les titulaires ont démontré sur les deux premiers matchs, il y a de quoi aborder la suite avec sérénité. Mais sans savoir vraiment de quoi sont capables des remplaçants placés dans les meilleures dispositions. Et c’est bien dommage.