- Coupe du monde 2014
- Groupe C
- Côte d'Ivoire/Japon (2-1)
La Côte d’Ivoire passe à l’orange
Menés à la mi-temps face au Japon, les Ivoiriens ont renversé la situation après la pause. Et l'entrée d'un certain Didier Drogba n'y est sans doute pas étrangère.
Sabri a fini par participer à une Coupe du monde. C’était ce soir à Recife. Pas avec la France qui l’avait honteusement écarté en 1998 de la liste des 23 et obligé à rentrer de Clairefontaine en taxi. Mais avec la Côte d’Ivoire. Pour affronter le Japon. Malgré ce souvenir douloureux, Sabri, le sélectionneur, n’a pas hésité à écarter Didier de la liste des titulaires de ce premier match des Éléphants. Malgré tout. Didier est pourtant un symbole. D’une génération qu’on dit dorée même si elle n’a pas gagnée beaucoup de titres. Un homme engagé, qui n’a pas hésité à user de sa notoriété, du pouvoir mystique du football, pour tenter de réconcilier son pays à une époque où la Côte d’Ivoire n’allait pas très bien. Plus qu’un footballeur, un leader.
Mais voilà, Didier n’est pas immortel. À force de le côtoyer, de l’admirer, les Ivoiriens avaient peut-être oublié son âge, 36 ans. Pas Sabri qui avait décidé, avec beaucoup de courage, de remplacer ce dieu vivant par Wilfried Bony. Un bon joueur, mais qui ne possède par l’aura de Didier. Pendant longtemps, les dieux du football ont négligé Wilfried, maladroit, mal placé, perdu, même s’il eut été malsain de le critiquer pour le premier but encaissé par les Ivoiriens, au bout de seulement 15 minutes de jeu. Toute la défense ivoirienne était à blâmer sur cette action anodine, une touche, une balle qui arrive aux 20 mètres et Keisuke Honda, vous savez, le blond de la sélection du Japon, envoie un tir puissant sous la barre du pauvre Barry Copa. Ensuite, Yaya Touré, le nouveau leader de la Côte d’Ivoire a bien essayé de transpercer la défense japonaise à plusieurs reprises, Arthur Boka, le petit arrière latéral, a bien essayé de décrocher des tirs lointains et puissants, rien n’y faisait. Les dieux du football avaient décidé que la Côte d’Ivoire rentrerait dans les vestiaires avec un but de retard.
Serge au centre
Et puis en deuxième mi-temps, ces mêmes dieux se sont remis l’esprit à l’endroit. Et Sabri, aux alentours de la 50e minute, a fait de même. En demandant à Didier de quitter son survêtement, en lui demandant de faire ce qu’il avait toujours su faire. Être un leader. Et Didier est entré. Et la foule a rugi parce que même ici, à Recife, si loin de la Côte d’Ivoire, les spectateurs avaient entendu parler des pouvoirs quasi mystiques de Didier. Qui a commencé par sonner la révolte. Et aussi exécuter des gestes comme les aiment les Brésiliens, une talonnade qui a bien failli se terminer en passe décisive. Deux minutes plus tard, Serge Aurier s’est appliqué pour centrer, et comme par miracle, la balle est arrivée sur le crâne de Wilfried, qui a marqué. Et puis, deux minutes plus tard, Serge, toujours, a reproduit le même centre, qui a atterri cette fois-ci sur le bandeau et les tresses de Gervinho qui a, lui-aussi, trouvé les filets.
Question statistiques, Didier n’était pas impliqué dans cet incroyable retournement de situation. Mais, pour tous les gens dans le stade et devant leur télévision, il était évident que Didier avait usé de toute sa force mentale pour transcender cette sélection pour laquelle il avait tant donné. Sur les deux buts, Sabri, au bord du terrain, n’a pas esquissé un sourire. Il savait qu’il s’était trompé. Il va désormais laisser Didier tranquille. Sur la pelouse. Le plus bel endroit pour mourir quand on s’appelle Didier.
Par « o grande » Joachim Barbier