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La cote de l’Ivoire monte du RDC ?
Quand les concierges se retrouvent au RDC (rez-de-chaussée), elles papotent, elles papotent... Et elles disent quoi, les concierges ? Ben, que la Côte d'Ivoire est favorite contre la République démocratique du Congo, ce mercredi soir à Bata…
Un Éléphant, ça trompe énormément. Depuis 2006, en fait… Cette année-là a vu fleurir la fameuse « génération dorée » qui devait tout casser : Kolo et Yaya Touré, Zokora, Romaric, Tiéné, Eboué, Drogba, Dindane, Kouassi, Baky Koné, etc. Problème : sur le continent, la grande Égypte du seigneur Shehata était injouable. Les Ivoiriens valeureux ont perdu en finale de CAN 2006 face aux Pharaons aux tirs au but (0-0, puis 2 tab à 4). Rebelote en demies de CAN 2008 face aux mêmes, mais sur une tuerie (1-4), puis en CAN 2010 face à l’Algérie, mais en quarts (2-3 a.p). En 2012, la voie était enfin libre pour décrocher un deuxième trophée après l’unique triomphe continental de 1992. L’Égypte avait été emportée par sa « révolution » , et le Ghana s’était bêtement fait surprendre en demies par la Zambie. Laquelle Zambie se présentait en challenger contre des Ivoiriens favoris en finale. Et alors ? Que dalle ! Englués dans un 0-0 glauque façon L1, les Éléphants se sont crashés encore aux tirs au but (0-0, 7 tab à 8, Kolo Touré et Gervinho ayant foiré). À la tête des Chipolopolos, le bon Hervé Goupil avait joué un tour de Renard hyper défensif aux potes de Didier Drogba… Didier, on l’attendait pour un dernier tour de piste à la CAN 2013, mais les Éléphants se sont encore fait surprendre en demies par un Nigeria pas vraiment extra (1-2).
Yaya bas, et Bony & Clyde
Avec une nouvelle déception en Coupe du monde au Brésil (giclage au premier tour) et le retrait définitif de Drogba, on pensait que c’en était fini pour cette génération dorée. D’autant plus que lors des éliminatoires de cette CAN 2015, les « Orange » s’étaient fait taper au Cameroun (1-4) et à dom par la RDC (1-2). Deuxième de sa poule, la Côte d’Ivoire s’est qualifiée pour la Guinée équatoriale, mais n’a vraiment pas brillé au premier tour (1-1 face à la Guinée et le Mali, puis 1-0 face aux Domptés). Les Ivoiriens se sont bien repris en quarts face à l’Algérie où leur victoire en mode croco les a propulsés en demies (3-1). Le style, c’est du Hervé Goupil : pas folichon, très solide en 3-5-2 avec Bony & Clyde (Gervinho) devant. Maître Renard a bien compris au Mondial 2014 qu’un Yaya Touré systématiquement cramé quand il revient en sélection pour les grandes compètes était beaucoup plus utile dans un positionnement bas. Dans le rond central, il oriente et distribue, se projetant quand même parfois devant, mais pas avec son formidable volume de jeu tout terrain qu’on lui connaît à Man City. À la CAN 2013 et au Mondial 2014, Yaya placé trop haut et trop lent dans le replacement était devenu un poids mort pour l’équipe… Pour le reste, son frangin Kolo tient plutôt bien la défense, mais dans l’axe. Parce que Tiéné et Aurier n’ont pas bien verrouillé leur couloir face aux virevoltants Algériens. Alors, attention ce soir ! Heureusement, au milieu, le féroce et expérimenté Serey Dié (31 ans, arrivé à Stuttgart en janvier), très bon contre l’Algérie, équilibre l’équipe. Du coup, un très bon Gradel peut jouer le métronome, en alternance avec Yaya, et orienter vers la flèche Gervinho ou le finisseur Bony (cf. son premier but de la tête contre les Verts). Le puissant Wilfried Bony, devenu Africain le plus « expensive » en passant de Swansea à Man City (38,5 millions d’euros), est bien l’arme fatale des Orange. On verra bien s’il est le « nouveau Drogba » annoncé (cf. son déchet qu’on lui connaissait déjà au Vitesse Arnhem). Rendez-vous à 20 h, ce soir à Bata…
Super sapeurs ou fashion victims ?
L’histoire est déjà écrite et les paris déjà enregistrés : le Ghana tapera les Équato-Guinéens et retrouvera en finale la Côte d’Ivoire qui passera la RDC au coupé-décalé… La Côte d’Ivoire doit son statut de favorite sur le papier et sur la foi de son succès sur l’Algérie. Mais sur le papier, les Congolais ont battu les Éléphants chez eux (4-3), après une défaite 1-2 à dom, il est vrai. Alors, va pour la belle ! Pour ce qui est des quarts, la RDC a fait aussi forte impression que les Ivoiriens en laminant le Congo 4-2 après avoir été menés 0-2. Face aux hommes de Claude Le Roy, on a vu ce qu’on attendait de ces Léopards : tout schuss devant et un peu faiblards derrière ! Et pourquoi pas ? Cette prise de risques et cette volonté de mettre un but de plus que l’adversaire semble bien correspondre au profil offensif du club phare national, le Tout Puissant Mazembe, pourvoyeur d’internationaux. Et puis, c’est quand même la meilleure façon d’aborder un tournoi, décroché à l’arrache (meilleur troisième), et de ne pas avoir de regrets. Ceci dit, on ne va pas se mentir : la qualif acquise au premier tour a été un peu chanceuse, avec trois nuls et une différence d’un petit but d’écart par rapport au Cap-Vert, deuxième ex æquo avec trois points… La RDC pourra s’appuyer sur un 4-4-2 audacieux avec sa paire d’attaquants Mabwati et Mbokani (doublé contre le Congo), et servie par le virevoltant Yannick Bolasie. Il faudra un grand Bolasie face au bloc béton ivoirien qui tentera de contenir les dévoreurs d’espace adverses. Il faudra encore aussi tirer de loin comme les Léopards l’ont fait contre le Congo. Avec Makiadi, bon tireur de coups francs, et Bokila (une barre chacun face au Congo) ainsi que Bolasie, la RDC dispose de shooteurs. L’Algérie n’a pas assez tenté de loin face aux Éléphants, alors… En l’absence du milieu et capitaine Youssuf Mulumbu (incertain, en fait), c’est Mongongu qui tiendra la défense derrière.
Ghana/Côte d’Ivoire en finale rêvée ?
Comme à la belle époque du Zaïre de Mobutu (deux CAN 1968 et 1974, quand même !), le président Joseph Kabila s’est déplacé en Guinée équatoriale pour encourager et féliciter les Léopards. Et comme du temps de Mobutu, il leur a mis un gentil petit coup de pression : « L’objectif pour nous est de ramener la coupe à Kinshasa. Et je pense que c’est faisable. Vous avez certainement l’appui de nous tous ici, mais surtout l’appui de toute la nation congolaise » … Pour l’image, on attend de voir à nouveau la « danse de la puce sauteuse » du gardien Robert Kidabia à la fin du match, si victoire il y a. Parce que face au bloc ivoirien, plus croco qu’éléphant, ça va être dur. Et puis gare à l’arbitrage qui pourrait conduire à la finale « rêvée » : Ghana–Côte d’Ivoire ! Plus sérieusement, on peut d’ores et déjà rendre hommage au sélectionneur de la RDC, Florent Ibengé (43 ans), ancien international congolais. Le coach de l’autre grand club de la RD Congo, l’AS Vita Club, était le seul entraîneur africain des huit équipes engagées en quarts de finale. Une belle leçon pour un foot africain qui néglige trop souvent la richesse limitée, certes, mais bien vivante de ses techniciens qui n’ont parfois rien à envier aux « sorciers blancs » et aux mercenaires incompétents venus d’ailleurs.
Par Chérif Ghemmour