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- Coupe du Monde 1982
La commedia dell’arte
Avec la Coupe du Monde 82, l'Espagne assure définitivement sa transition démocratique un an après que le Roi Juan Carlos eut évité un putsch au Parlement. En France, E.T et son "téléphone maison" font un carton dans les salles et au même moment, Lady Di et Charles se marient. Cerise sur le gâteau, les députés votent tour à tour la cinquième semaine de congés payés et la semaine de 39 heures. Une belle année, gâchée par cet enfoiré d'Harald Schumacher...
Une Coupe du Monde graphique
Pour le premier évènement mondial organisé depuis la fin du franquisme, l’Espagne tient à mettre les petits plats dans les grands. L’affiche du Mondial, considérée comme l’une des plus réussies, toutes épreuves confondues, est ainsi confiée au maître catalan Antoni Tapies. De l’art et du cochon, puisque l’organisation décide de se parer également d’une mascotte prenant la forme d’une orange. “Naranjito” est né et deviendra l’icône de toute une génération d’Ibères au contraire de l’immonde Footix. Pour la première fois également, la cérémonie est diffusée en direct sur cinq continents. Pour l’occasion, une immense colombe de la paix formée par un bataillon d’intermittents du spectacle se déploie sur la pelouse du Camp Nou. Le ton est donné. Ce “Mundial 82” sera romantique… ou pas.
L’Espagne, pire hôte de l’histoire
Jamais un pays hôte n’aura eu une sélection aussi faible. Après un match nul calamiteux contre le Honduras (1-1), l’Espagne fait illusion contre la Yougoslavie (2-1) avant de sombrer contre l’Irlande du Nord ( 0-1). La Roja accède néanmoins à la deuxième phase de groupes et traîne sa médiocrité contre la RFA avant de se finir lourdement en faisant un match nul tout moisi contre les Anglais. Finalement, “Naranjito” aura été la seule véritable satisfaction espagnole du tournoi… Avec Manuel Amoros, énorme pendant toute la compétition.
Le Mondial à 24 équipes, un petit arrangement entre amis…
Pour la première fois, le Mondial accueille 24 équipes contre seulement 16 lors des précédentes éditions. Un élargissement qui donne une nouvelle dimension à la compétition, mais qui cache en vérité un petit arrangement entre Joao Havelange et Juan Antonio Samaranch, respectivement présidents de la FIFA et du COI. En 1980, Samaranch est élu à la tête du Comité Olympique grâce au lobbying intensif que son ami brésilien avait réalisé auprès des votants sud-américains, asiatiques et africains. En contrepartie, le Catalan promet et obtient un élargissement du nombre de sélections auprès du Comité d’organisation du Mondial 82 dont il est également à l’époque le président. Le hasard fait décidément bien les choses…
Un Cheikh en bois
Faid Al-Ahmad Al Jaber est furieux et il y a de quoi. La sélection koweïtienne se fait démonter par les Bleus. Énervé, le frère de l’Émir fait ce qu’il peut pour éviter le massacre… c’est-à-dire n’importe quoi. En plein milieu du match, le cheikh débarque sur la pelouse et prend à partie l’arbitre russe pour contester un but marqué par les Français. A la surprise générale et au grand désespoir de Michel Hidalgo, Al Jaber obtient gain de cause. Le ridicule ne tue pas, ou alors à retardement : Al Jaber mourra en 1991 lors de l’invasion du Koweït par les Irakiens.
L’Algérie, victime du “match de la honte”
En battant la RFA grâce à deux buts de Madjer et Belloumi, l’Algérie devient le deuxième pays africain de l’histoire à remporter un match de coupe du monde (après la Tunisie, victorieuse du Mexique, le 2 juin 1978, à Rosario). Après une défaite contre l’Autriche (0-2), les Fennecs croient avoir fait le plus dur en l’emportant face au Chili (3-2). Seulement voilà, Teutons et Autrichiens connaissent déjà le résultat de l’Algérie avant d’entrer sur la pelouse du Molinon et renouent pour l’occasion de vieilles amitiés en signant un pacte de non-agression. Hrubesch, à la 10ème minute, assure un succès honteux à la RFA et permet ainsi aux deux nations précitées de se qualifier tranquillement pour le second tour. Pour éviter de telles situations scandaleuses, la FIFA décidera à partir de là de faire jouer les derniers matchs de poules en même temps.
La haine, l’ennemie de l’Argentine
Cesar Luis Menotti a un grand groupe mais un sérieux problème : la guerre des Malouines. Le philosophe argentin passera son temps à gérer les états d’âme de ses stars belliqueuses et l’arrogance de Maradona. « On a cru qu’on était champions du monde avant de jouer nos matchs. Ça nous a tués » . El Pibe de oro, qui vient de signer au Barça, fait la rencontre du football européen en croisant les crampons de Gentile. Ardiles, l’attaquant de Totthenham, tombe quant à lui en pleine dépression lorsqu’il apprend que son militaire de cousin est mort aux Malouines. Battue par le catenaccio italien et le Brésil de Zico, l’Albiceleste sort par la petite porte. Pour mieux renaître de ses cendres en 86…
Le Brésil le plus sexy de l’histoire…
Petit short bleu moulé façon Sheila, maillot jaune étincelant près du corps, bouclettes de rockers, barbes de Latinos… Et de la magie dans les pieds. Zico, Socrates, Falcao, Toninho, Oscar étaient les véritables artistes du Mundial 82. L’une des plus belles Seleçao de l’histoire. A l’instar des Français, les Auriverde auront laissé une trace indélébile, malgré la défaite. Putain de romantisme.
Le match du siècle : France-Allemagne
Le 8 juillet 1982, la France est passée du rire au larmes. Un voyage de près de deux heures du Paradis vers l’Enfer ; une avalanche d’émotions pour ce qui est sans doute le plus beau match de football que la Coupe du Monde ait jamais connu. Ce jour-là, à Séville, les Bleus ont joué comme jamais pour perdre comme toujours face aux Allemands. Schumacher, cet enculé, Battiston, ce martyr, le pénalty de Platini, cet artiste, la joie de Giresse, ce sauveur, la praline de Trésor, ce héros, le retournement de situation teuton, ces miraculés ; les quatre pénaltys foirés, cette lose… Saloperie de football. Oui, ce jour-là, la France a chialé des larmes de plomb, avant de pester contre la terre entière face à la plus grosse injustice de l’histoire du football. Oui, ce jour-là, la France était plus forte et ça, tout le monde le sait. Et pourtant…
Paolo Rossi, sauveur des Azzurri
Avant le Mondial, les Italiens sont au bord de la crise de nerfs. La Squadra joue mal et ne fait peur à personne. Enzo Bearzot est alors le Raymond Domenech transalpin. Tout le monde demande sa tête, à commencer par la Gazzetta dello Sport qui titre : « Bearzot dehors ! Tu es trop vieux ! » . Comme d’habitude, les Italiens sont à deux doigts de se faire éliminer de la compétition lors d’une phase de poule au bilan désastreux : trois matchs nuls et seulement deux petits buts. Comme toujours, les tricolores montent en puissance et peaufinent leur réalisme grâce, entre autres, aux buts salvateurs de Paolo Rossi. Le meilleur buteur du tournoi réalise un triplé contre le Brésil, puis un doublé en demi-finale contre la Pologne avant d’ouvrir la voie en finale contre l’Allemagne. Ses prestations lui vaudront le Ballon d’Or et une réinsertion sociale. Avant d’être considéré comme le héros de tout un pays, Rossi s’était fait suspendre deux ans pour une histoire de paris clandestins sur des matchs du Calcio. Suspendu au départ pour trois ans, Rossi a pu miraculeusement bénéficier d’une réduction de peine d’un an qui lui aura finalement permis d’offrir sur un plateau une troisième étoile de champions du monde aux Transalpins, 44 ans après leur dernier sacre. Les Français peuvent lui dire merci. Grâce à lui, la Mannschaft n’a pas remporté cette Coupe du Monde. C’est toujours ça que les Allemands n’auront pas eu…
Chiffres clés
Norman Whiteside (Irlande du Nord), joueur le plus jeune du tournoi avec 17 ans et 41 jours. Un record de précocité à l’époque. Dino Zoff, joueur le plus âgé du tournoi avec 40 ans et 133 jours au compteur. C’est à ce jour le capitaine le plus âgé à avoir soulevé le trophée. La Hongrie et ses cinq attaquants (!) détient également le record de buts marqués dans un match de coupe du monde : 10, contre le Salvador.
Autres chiffres clés
2.108.953 spectateurs au total et 40.552 spectateurs de moyenne par match, 66 millions de dollars de bénéfices, 146 buts inscrits pour une moyenne de 2,8 buts par match, 396 participants.
L’équipe-type du Mundial 82
Zoff (Italie) – Amoros (France) – Oscar (Brésil) – Briegel (RFA) – Scirea (Italie) – Falcao (Brésil) – Platini (France) – Boniek (Pologne) – Rummenigge (RFA) – Zico (Brésil) – Rossi (Italie)
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