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Kylian Mbappé a dit
Alors que le PSG s'apprêtait à célébrer son meilleur joueur Kylian Mbappé aux Trophées UNFP, le champion du monde a bousculé le cours de la soirée, mais aussi de l’intersaison en mettant la pression sur son club. Il veut que les choses changent.
Au PSG, il est impossible de passer un dimanche soir sans match au chaud devant sa télévision. Même quand un joueur vient braquer deux trophées individuels après une saison réussie, la crise n’est pas loin. Ainsi, quand Kylian Mbappé a pris la parole, en direct, tout a explosé en quelques phrases : « Je sens qu’il est temps pour moi d’avoir plus de responsabilités. Peut-être ici à Paris, j’en serais heureux, ou alors peut-être ailleurs pour un nouveau projet. » Il n’en fallait pas plus pour que la presse espagnole, qui adore l’odeur du sang, ne se déchaîne, envoyant encore et toujours le champion du monde de 20 ans au Real Madrid.
Un mois après sa prise de position après un PSG-Monaco qui l’avait vu planter un triplé, annonçant qu’il regarderait les matchs de l’escouade de Zidane sur son canapé, Mbappé a changé de ligne éditoriale. Pourquoi ? Dans quel but ? On va mettre la case financière de côté, un garçon intelligent comme lui – et déjà millionnaire – n’est pas motivé par gagner plus à l’heure actuelle. Non, Kylian Mbappé est un compétiteur, il l’a toujours été depuis son plus jeune âge. Il compte ses buts à l’entraînement, c’est dire le niveau d’exigence qu’il s’impose au quotidien. Mbappé est venu au PSG pour franchir un palier avant d’aspirer à plus haut, à savoir le Real Madrid, car c’est là qu’il ira. Un jour. C’est une évidence. Il est né pour ça. Mais avec trois ans de contrat au PSG et un sentiment d’échec cuisant en C1, le compétiteur ne peut pas partir maintenant. Pas comme ça. Cela ne lui ressemble pas. Il veut juste que les choses changent.
Sa voix doit compter
Aux Trophées UNFP, tout était préparé. Dès son arrivée à la cérémonie, il a distillé des indices, parlant très vite de son (re)positionnement tactique. Il a remis une couche lors de la remise du titre de meilleur espoir avant l’estocade finale. Positionnement, responsabilités. Deux mots qui en disent beaucoup. À 20 ans, Mbappé n’est plus un gamin, il veut être écouté dans le vestiaire, dans les choix du club, dans la marche à suivre. Autrement dit, sa voix doit compter dans les réflexions du Paris-SG, car il en est l’un des moteurs principaux.
À lui, comme à Neymar, on a vendu le projet d’un club ambitieux sur la scène européenne. Le club de demain en quelque sorte. Deux ans après des flyers annonçant des soirées avec caviar et champagne, le PSG organise tant bien que mal des booms avec du sirop Teisseire et des slows ringards en milieu d’après-midi. Mbappé n’est pas venu pour ça. Et il ne restera pas pour ça. C’est le sens de son message. Il souhaite que son club se donne les moyens de sa politique et qu’il soit parmi les têtes de gondole sportives de la prochaine saison.
En moins de deux mois, Daniel Alves, Thiago Motta, Neymar et Kylian Mbappé ont pris la parole publiquement – chacun à sa manière – pour dénoncer le manque de cadre strict autour du PSG. Certains aimeraient être plus écoutés, d’autres avoir plus de responsabilités. Tout ce petit monde avance malgré tout dans le même sens : ce projet ne marchera pas uniquement via des chèques. Il faut un chemin. Un projet. Une cohérence. Une idée directrice. Les joueurs du PSG ne sont pas aveugles, ils observent comment le club fonctionne, scoute, recrute, évolue. Marquinhos, Bernat et Daniel Alves dans l’entrejeu, à aucun moment cela ne représente l’image d’un club qui avance sereinement vers son objectif ultime : la Ligue des champions. On parle beaucoup d’institution, de respect, mais le PSG a créé lui-même ce monstre qui lui échappe. En choisissant le mutisme et la calinothérapie avec les stars et les muscles avec les autres (Rabiot, Ben Arfa, Aurier), le club a mis en place une république des joueurs où les plus gros salaires se sentent le droit de critiquer tout haut une politique sportive incohérente. La méthode choque ? Oui. Mais comment procéder autrement avec ce PSG-là ? Que faire de plus pour une prise de conscience collective ?
Punir Mbappé n’aurait aucun sens, au contraire. Il faut savoir reconnaître ses erreurs et la gestion de l’équipe du PSG est une erreur depuis plusieurs mercatos. Oui, Kylian Mbappé peut et doit être le numéro 9 de cette équipe, même s’il s’agit de sacrifier l’idole Edinson Cavani. Mbappé n’a rien manqué des festivités de PSG-Dijon. Il sait. Vivre dans l’ombre sportive de Neymar et l’aura populaire de Cavani, c’est beaucoup trop. Mais le football est un sport de haut niveau où les pages se tournent. Personne n’est immortel. Jamais. Il y a aussi une idée de transmission. Il est grand temps que l’ère Kylian Mbappé s’ouvre au PSG, car, sinon, elle s’ouvrira ailleurs, c’est inéluctable. La direction de QSI a les cartes en main dorénavant. À elle de faire enfin les bons choix.
Par Mathieu Faure