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Koscielny, la voie de la sagesse
Laurent Koscielny a lancé la semaine des Bleus avec l'annonce presque officielle de sa retraite internationale après le Mondial. L'occasion de saluer un joueur arrivé sur le tard, mais qui, par sa sobriété, a su se rendre indispensable. Et dont le choix souligne, encore une fois, une lucidité peu commune dans la gestion de sa carrière.
« Il me reste six mois, je pense, pour m’épanouir avec l’équipe de France. Après, j’aurai 32 ans, 32 ans et demi, presque 33, je pense qu’il sera temps de laisser la place aux jeunes qui sont derrière. Ils ont de la qualité, ils sont capables de s’imposer en équipe de France. » Laurent Koscielny a balancé la petite bombe du début de semaine en équipe de France. Une retraite internationale après le Mondial – quasiment officielle – annoncée avec la même indifférence qu’un topo langue de bois sur l’importance des matchs amicaux de novembre. Pour le défenseur d’Arsenal, forcément, il s’agit là du résultat d’une réflexion de longue date, arrivée à maturation si l’on en croit son visage rayonnant. L’ancien de Lorient a pris une décision importante, pas forcément facile, mais on sent qu’il savoure désormais d’avoir tranché. Maintenant, il est question de profiter à plein du peu de temps qu’il a devant lui, « pour s’épanouir et prendre le maximum de souvenirs » . Du côté des observateurs de l’équipe de France, forcément, cela engendre un petit pincement au cœur à l’égard d’un joueur qui fait partie des meubles, mais a longtemps ressemblé à une anomalie.
Koscielny, international tardif
Car si Laurent Koscielny facture aujourd’hui 49 sélections et dépassera nettement la cinquantaine au moment de tirer sa révérence, il n’est présent en Bleus que depuis six ans. Quand Raphaël Varane revendique déjà le capitanat à 24 ans, que Samuel Umtiti a claqué une finale d’Euro à 22, et que Presnel Kimpembe a déjà l’étoffe d’un titulaire bis au même âge, le natif de Tulle a attendu d’avoir 26 ans pour recevoir une première convocation, en février 2011, et 27 pour honorer sa première sélection, en novembre de la même année contre les États-Unis. Depuis, il a le plus souvent eu le statut du numéro 3, mais a survécu à tous ses supérieurs hiérarchiques, qu’ils s’appellent Adil Rami, Philippe Mexès, Mapou Yanga-M’Biwa ou, pour faire dans le plus récent, Mamadou Sakho. L’actuel stoppeur de Crystal Palace avait pourtant l’aura d’un taulier long terme, comme Varane, mais n’a pas eu la même resistance à l’épreuve du temps que l’ancien Merlu. Pas de problème avec un brûleur de graisse, style Sakho, pas de blessure juste avant une grande compétition, style Varane, pas de transfert clinquant à Manchester City suivi d’une mise sur la touche, style Mangala. Laurent Koscielny a percé sur le tard – Ligue 1 à 24 ans –, mais a su choper le train en marche quand il s’est présenté sous la forme d’un transfert à Arsenal, à 25 ans.
Le tremplin Arsenal, la blessure Eder
Tenir la route en Premier League a, de facto, fait du Corrézien un sélectionnable. Une fois qu’il l’a été, il a quasiment toujours répondu présent. Ses deux plus gros fiascos étant une expulsion en barrage aller pour le Mondial face à l’Ukraine, et une intervention manquée sur Eder en finale de l’Euro 2016. Deux erreurs dans des moments cruciaux – l’une effacée, l’autre toujours douloureuse – qui n’ont pas même écorché l’image de mec sûr de Didier Deschamps que le central dégage, et qui s’explique par ses 45 capes sous le règne de la Dèche, record pour un défenseur. La récompense d’une sobriété le plus souvent efficace sur les terrains –- à l’image de sa demi-finale contre l’Allemagne – d’une grande discrétion en dehors, et d’une carrière parfaitement gérée. Car Koscielny a toujours su où était sa force, et où étaient également ses limites. Fidèle à Arsenal, écurie au prestige suffisant pour le rendre international et le faire évoluer face aux plus grands et, surtout, un onze type à sa mesure pour lui assurer une position pérenne sur la pelouse.
La Coupe du monde en pot de départ
Son choix de tirer sa révérence après le Mondial russe entre dans la même logique. « J’ai fait ce que j’avais à faire en équipe de France » a-t-il affirmé, défendant un bilan déjà plus que positif. Partir après la Coupe du monde, alors qu’il pourrait raisonnablement viser deux ans de plus, c’est le choix de laisser l’image de son meilleur niveau, de se donner la chance de partir dans la peau d’un titulaire. Comme n’ont pas su le faire Marcel Desailly (Euro 2004) ou Thierry Henry (2010), trop soucieux de faire durer le plaisir ou de faire tomber des records. Contrairement à ses très glorieux aînés, Laurent Koscielny a admis l’inévitable : le temps va commencer à jouer contre lui, et Varane, Umtiti, Kimpembe voire Laporte vont un jour ou l’autre le déloger. Autant partir de soi-même sans se mentir : Koscielny sera allé au bout de son chemin en Bleus. Et il sait que le dernier kilomètre peut transformer un bilan honorable en douche de champagne. Ce qui serait pas mal, pour un pot de départ.
Par Nicolas Jucha
Propos de Laurent Koscielny extraits de sa conférence de presse