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Klopp l’insubmersible
Théoriquement candidat au titre, le Borussia Dortmund se retrouve bon dernier de Bundesliga. Une situation incompréhensible qui aurait coûté sa tête à n'importe quel entraîneur. Pourtant, Jürgen Klopp est toujours là, à braver les éléments.
Les chiffres sont terribles. Après 13 journées de Bundesliga, le BVB présente un bilan famélique : 3 victoires, deux nuls et huit défaites pour 11 ridicules points, 14 buts inscrits, 21 encaissés. Très très loin, à des années-lumière même, du Bayern, de ses 10 victoires et trois nuls, et de son +29. Un Bayern que le BVB a battu en Supercoupe d’Allemagne à la mi-août. Un 2-0 propre, net et sans bavure. À l’époque, le titre paraissait jouable. Du moins, le duel s’annonçait passionnant. Si Lewandowski, comme Götze avant lui, avait changé de bord, le BVB avait mis le paquet pour le remplacer et se construire un banc. Mais finalement, rien. Même en Ligue des champions, longtemps échappatoire au morne quotidien, les Schwarzgelben sont apparus complètement vidés d’énergie, d’envie, de substance contre Arsenal, avec une logique défaite 2-0 à la clef. Thomas Müller lui-même est sous le choc : « Personne ne s’attendait à cela. Si vous regardez la situation de l’extérieur, vous êtes sans voix. Au début, on les voyait se débattre, mais ils s’en sortaient quand même, mais maintenant, on espère pour eux qu’ils prennent chaque point. C’est important pour le football allemand » , a-t-il commenté au micro de Sky Sport. Mais comment donc cette équipe si belle, si forte dans l’absolu, finaliste de la C1 il n’y a pas si longtemps de cela, a pu tomber aussi bas ? Lundi soir, Jürgen Klopp participait à une conférence à Francfort sur le thème Motivation et gestion – Titre, thèses, buts. Et a répondu à cette question : « Je n’aurais jamais imaginé que ce soit aussi difficile un jour. Mais depuis deux-trois semaines, ça ne m’étonne plus. Les raisons sont simples : beaucoup de blessures et tellement de buts encaissés, c’est d’un ridicule sans égal » .
Avec le temps, va, tout s’en va
Généralement, dans ce genre de situation, c’est l’entraîneur-fusible qui saute. Cela pourrait paraître d’autant plus logique à Dortmund, équipe électrique s’il en est. Mais Klopp n’est pas un fusible, c’est une centrale nucléaire. Il suffit pour le comprendre de le voir courir comme un fou sur le bord du terrain, bondir au moment des buts, hurler sa rage sur les malheureux arbitres. Et une centrale, à moins d’un tsunami, ça ne bouge pas : « Je ne suis pas quelqu’un qui démissionne. Avec moi, c’est tout ou rien. Tant que Dortmund veut que je reste, je ferai tout ce qui est en mon possible. Je suis un battant. Je suis un meilleur entraîneur qu’en 2012, malheureusement, ça ne se voit pas au classement. » Il s’avère que Dortmund veut justement qu’il reste. Hans-Joachim Watzke, le directeur général, lui a de multiples fois témoigné son soutien. Pour lui, « le poison qui nous fait penser que tout va s’arranger tout seul doit finir par sortir de nos têtes, de toutes nos têtes » . Et pour la marche à suivre, il recommande « du sang, de la sueur et des larmes » . Klopp ne servira pas d’excuse. Parce qu’à Dortmund, on n’a pas la mémoire courte. Parce que Jürgen est là depuis trop longtemps – six ans déjà. À l’époque, sous Thomas Doll, le BVB venait de finir 13e. Klopp a, lui, fait 6e, 5e, puis deux titres, puis second.
Et maintenant, que vais-je faire ?
Klopp n’est pas devenu un mauvais entraîneur du jour au lendemain, tout comme ses joueurs ne sont pas devenus des chèvres incapables de mettre un pied devant l’autre. Il s’est longtemps battu contre la relégation à Mayence et comme il le dit lui-même, il sait « comment penser lorsqu’on se bat pour le maintien » . Alors ce vendredi, c’est Hoffenheim qui se présente au Westfalenstadion. Un « point culminant » pour Klopp, prêt à tout donner : « Je veux changer cette situation avec tout ce que j’ai à ma disposition. Je suis toujours convaincu du fait que notre travail est bon. Il semble juste qu’il ait porté ses fruits plus rapidement par le passé. Nous ne sommes pas devenus un peu idiots en une nuit, soudainement incapables de savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas » . Pour les supporters, il faut seulement attendre et faire confiance. Boire de la bière. Chanter très fort. Et comme l’a dit Klopp, « celui qui n’aime que le succès devrait devenir fan du Bayern. Avec ça, il devrait être content » . Dortmund, club de hype s’il en est, est un club qui souffre. Et il n’y a rien de plus beau que la souffrance.
Par Charles Alf Lafon