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« L’OM était traumatisé par les tirs au but depuis Bari »
L’homme derrière Kid Francescoli s’appelle Mathieu et il rentre d’une belle tournée aux États-Unis. Dans la foulée de son retour en France, il était avec des potes au stade Vélodrome jeudi soir pour assister à un match qui restera dans les mémoires phocéennes : OM-Benfica.
Quand on s’appelle « Kid Francescoli », on a toujours le festival d’Enzo Francescoli mal payé lors de la demi-finale de Ligue des champions entre l’OM et Benfica en 1990 dans un coin de la tête. Alors, vengé ? On l’a dans un gros coin de la tête effectivement. L’affront n’est pas lavé, il ne le sera jamais vraiment. OM-Benfica de 1990, c’est un double traumatisme avec le récital de Francescoli à l’aller qui ne mène à rien, et le retour avec la main de Vata. Mais celui de jeudi remet un peu les choses en ordre. C’est déjà la plus belle journée de la saison. J’étais virage nord, donc penalty raté et larmes de Di María sous mes yeux, c’est un peu une soirée rêvée. Il nous avait moins fait de mal que Vata, mais quand même.
Comment te retrouves-tu au stade alors que tu boucles tout juste une tournée aux États-Unis ? Je suis abonné aux Fanatics avec des potes, mais depuis le début de la saison, je n’ai pas eu le temps d’aller voir beaucoup de matchs. La première partie de la saison, j’étais en tournée en Europe, mais c’était sous Gattuso, donc il y avait moins de regrets. Là, je vais repartir au Mexique, donc je raterai OM-Atalanta. Mais au moins, j’ai vécu ce Vélodrome en fusion.
Cette ambiance, c’est top 3 ou top 5 des ambiances au Vélodrome ? C’est une bonne question. En rentrant du stade, tu te repasses les grandes ambiances que tu as vécues. Jeudi, c’était déjà très émouvant. Déjà, on fait une saison de merde, donc voir le stade heureux comme ça, c’est beau, et il y a cette fin complètement barrée avec les jeunes qui rentrent, plus aucune tactique, l’histoire s’écrit sous tes yeux. Puis quand tu rentres chez toi et que tu te refais la séance de tirs au but et que tu vois le bruit sur le but de Luis Henrique, c’est incroyable. J’ai raté Leipzig, mais pour répondre à la question, l’ambiance indétrônable, c’est le but de Boli contre Paris quelques jours après avoir gagné la Ligue des champions, avec un but de l’espace en plus. Le deuxième but de Drogba contre Newcastle, c’était quelque chose aussi. Et le Paris en Coupe de France l’an dernier, c’était aussi quelque chose. Allez, c’est déjà top 5 facile.
Est-ce que ça vient aussi du fait que la grande majorité des supporters présents avaient vécu le traumatisme d’Annecy, puis du Panathinaïkos aux tirs au but ? Le traumatisme, à Marseille, on l’a depuis Bari. Je n’avais pas le souvenir d’une séance de tirs au but importante gagnée par l’OM. C’est que des Sochaux en finale de Coupe de France… Alors quand on a gagné, j’avais l’impression qu’on avait gagné un championnat ! On a sauté comme des fous, car il y a aussi toute la frustration de cette saison.
Pendant des années, tu as travaillé à l’OM en tant qu’ingénieur du son pour OMtv. Et maintenant tu retournes au stade avec un simple abonnement en virage… J’aime toutes mes périodes de supporters de l’OM. Quand j’avais 10 ans et quand ma mère m’amenait en Ganay dans l’ancien stade, et qu’à cet âge-là dans ton équipe, il y a Francescoli, Papin, Waddle, Mozer, Sauzée, Boli, Di Meco, tu es marqué au fer rouge. C’était la meilleure période, on gagnait tout. J’ai commencé avec ça, donc pour moi, c’était normal de gagner 4-0 à l’extérieur, c’était normal que ton numéro 9 passe des triplés tous les dimanches. Quand j’ai bossé pour OMtv, j’ai beaucoup aimé aussi, car j’étais dans le truc. Je me retrouvais à parler avec Amoros et Pardo, à mettre des micros à Ben Arfa ou Gaby Heinze, à rencontrer Di Meco… Le seul truc frustrant, c’est que je travaillais pendant les matchs. Maintenant, je vais au stade avec mes potes, pour sauter comme un fou pendant une heure et demie et parler du match après. Le fait d’être passé par le club n’a pas enlevé la passion ou la folie qui fait que quand tu gagnes deux matchs d’affilée, tu as l’impression que l’année suivante, tu vas gagner la Ligue des champions.
Depuis ton passage au club, où tu donnais d’ailleurs déjà des concerts sur ton temps libre, ta carrière a décollé. Tu en es où aujourd’hui ? Quand je vais jouer à l’étranger, il y a toujours cette étiquette « french touch ». Je suis ravi qu’on me mette dans ce panier-là, mais Phoenix, Air, Daft Punk, c’est dans une autre galaxie. Ils ont fait ce qu’ils ont fait, et grâce à ça, on a ce truc français pop un peu electro, un tampon auprès du public étranger qui fait label qualité. C’est le bon goût, les mélodies, le sens des synthés, la façon d’utiliser les rythmes. Je sais que je ne suis pas à leur niveau, mais c’est vrai aussi qu’on n’est pas beaucoup d’artistes à tourner autant à l’étranger. Quand on fait des salles à New York, San Francisco, Toronto ou Montréal qui font 1000 personnes, que tout le monde chante… Il y a un statut que je commence à toucher du doigt. Après, ce n’est pas Justice qui fait sold out en une heure à Brooklyn après sept ans d’absence, mais je suis ravi de l’évolution des choses.
Toi, tu as connu un boom sur TikTok grâce à Jennifer Lopez. Pas eux… Le truc, c’est qu’elle a surtout bien utilisé ma musique. Son TikTok, c’est « Quand j’étais plus jeune dans le Bronx… and it went like… » et bam c’est la J-Lo de maintenant. Ce morceau, « Moon », au moment où on le fait, on ne sait même pas que TikTok existe. Cette viralité et le fait que cette phrase dans le morceau allait devenir un prétexte pour les gens pour raconter toutes sortes de situations étaient impossibles à prévoir. Je me suis retrouvé dans des salons sur la viralité dans la musique et je sentais que j’avais en face de moi des mecs qui me demandaient : qu’est-ce qu’il fallait faire pour percer sur TikTok ? Mais je n’en sais rien, moi ! Avant sa vidéo, on faisait déjà le Trianon complet à Paris. Le décollage avait déjà été fait, mais on est passé d’avion à fusée.
Tu parlais de Phoenix, tu vas jouer avec eux cet été à Montpellier au Palmarosa festival. Avant, j’étais un peu intimidé par ça. Maintenant, avec le live, le set, le son, la scéno, on n’a pas trop à rougir. Je ne me compare pas, attention. Tu as vu la scénographie de Justice à Coachella ? Ou la dernière tournée de Phoenix ? Les mecs, ils doivent avoir 4 ou 5 semi-remorques sur chaque date. Mais je défends notre projet sans rougir. En plus, c’est cool ce festival à Montpellier, ça peut faire un peu Coachella avec le beau temps, le bonheur de faire des nuits entières de concert comme à Benicassim en Espagne. Montpellier, c’est un peu la maison, ce n’est pas loin de Marseille, il y a le soleil… Festif, c’est le mot. J’ai hâte d’y être, il y a une espèce de folie, les gens lâchent tout, tout le monde est en maillot, en lunettes de soleil face à toi, l’été, ça change tout.
Et c’est à 200 mètres du centre d’entraînement de Montpellier. Toi qui es chez les Fanatics, tu vas sticker discrètement des écussons de l’OM aux alentours ? Avec Montpellier, la rivalité n’est pas non plus… peut-être que si ça avait été Nice… (Rires.) Je vais me concentrer sur les concerts, les balances et profiter du lieu. De la fin du mercato aussi, puisque c’est fin août. Même si avant, les intersaisons, je trouvais ça super excitant, mais depuis quelques années, il y a tellement de mouvements qu’en fait, je mets presque l’actualité de côté et j’attends que la saison commence vraiment. Parce qu’il y a trop de données en fait.
Pendant le mercato de 2017, tu avais signé les musiques de présentation des recrues. Pourquoi ne pas aller plus loin et mettre ta musique sur des actions de foot ? Ça peut totalement coller ! Je me suis fait la réflexion quand je me tape des compilations des skills sur Youtube ou sur Twitter. Tu coupes rapidement le son généralement. J’ai vu ma musique utilisée sur des sujets foot pour Canal ou beIN et j’ai toujours trouvé que ça passait bien. Moi, je sors mes sons et, après, utilise qui veut. C’est toujours un plaisir de les voir sur un montage de foot. Après, je t’avoue que si c’est sur les meilleurs moments de Kylian Mbappé en finale de la Ligue des champions parce qu’ils ont gagné 3-0 contre le Real Madrid, pas sûr que ça me fasse très plaisir !
Propos recueillis par Romain Canuti