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Kaydop : « Pas besoin d’aimer le ballon rond ou les voitures pour apprécier Rocket League »
Alexandre Courant, ou plutôt Kaydop pour tous les suiveurs de la scène e-sport, fait partie des meilleurs joueurs de l’histoire de Rocket League. Un homme qui met des buts avec une voiture plus facilement que vous avec votre fameux « plat du pied sécurité ». Retour avec lui sur les liens entre RL et le foot.
Quel est ton lien avec le football ?J’adore le foot et je regarde beaucoup de matchs. Mais comme je supporte plutôt les grosses équipes comme le PSG, on m’a surnommé le footix dans le milieu de Rocket League. J’essaie aussi de jouer un peu, en faisant des fives ou des brésiliennes avec des potes. Mais on ne va pas se mentir, je suis meilleur spectateur que joueur.
Tu as commencé à jouer à Rocket League à cause du lien évident qu’a le jeu avec le foot ?
L’univers un peu foot et le fait de marquer des buts dans un univers fictif ont pu me plaire au début. Mais c’est surtout pour l’aspect compétitif que j’ai vraiment accroché. Pas besoin d’aimer le ballon rond ou les voitures pour apprécier Rocket League. Mon coéquipier Fairy Peak n’aime pas du tout ces deux univers, mais c’est ce mix si particulier qui lui a fait aimer le jeu.
On associe de plus en plus le sport et l’e-sport. Tu vois des similitudes entre ton quotidien de pro-gamer et celui de footballeur ?Je joue sur un ordinateur, donc me comparer à un footballeur, c’est un peu bizarre. Même si Team Vitality est résident du Stade de France et qu’on est entouré par une structure proche du foot (coach, manager, etc.), dans mon quotidien de joueur, je trouve ça très différent. L’effort que je peux faire est avant tout mental et non physique. Le seul lien que je peux voir, c’est la compétition. Je trouve d’ailleurs malheureux que l’e-sport essaie de copier le sport. Il y a évidemment des bonnes choses dont il faut s’inspirer, mais on doit garder notre ADN.
Tu as quand même joué dans des salles remplies à bloc. Ça fait quoi ?Gagner un titre mondial ou européen devant des milliers de personnes, c’est le rêve de tellement de joueurs. C’est un sentiment tellement agréable, surtout que tu ne t’attends pas à ça quand tu commences un jeu. Le tournoi où j’ai le plus ressenti d’émotions, c’était durant les championnats du monde qui ont eu lieu à Newark (USA) qu’on avait remportés avec Team Vitality. La salle était immense, avec plus de 10 000 spectateurs, ce qui est pas mal pour de l’e-sport sur Rocket League. L’ambiance était complètement folle dès notre entrée sur scène, avec des olas et un public qui supportait les deux équipes, ce qui est plutôt rare aux États-Unis. On se serait cru dans un stade de foot.
Tu te sens plus fort quand tu joues en public ?Durant ces tournois live comme à Newark, les matchs sont fermés, car personne ne veut faire de moves risqués et commettre une erreur. Ça ne me dérange pas trop, car tant qu’on gagne, je suis content. J’ai une longue expérience de ce genre de rencontre, ce qui m’aide à mieux gérer la pression. En général, je suis plutôt solide et meilleur lors d’une finale que durant les tours précédents.
Rocket League possède des mécaniques de jeu qui font penser au foot. On imagine ta réponse, mais est-ce que le ballon rond influence ton gameplay ? Et est-ce que le jeu devrait justement s’inspirer un peu plus du football ?
Pas vraiment. Sur Rocket League, tu changes de poste à tout moment : goal, attaquant, puis défenseur. C’est compliqué de comparer, même le ballon n’a pas d’effet avec une trajectoire assez droite, mais ça pourrait être sympa de varier ça. C’est plus au niveau de la compréhension visuelle du jeu qu’on pourrait faire des rapprochements avec le football au travers de stades, de voitures aux couleurs de ton équipe ou même du ballon qui changerait selon les compétitions. Pour nous, c’est toujours le même, contrairement au foot. On pourrait même imaginer un rapprochement entre nos deux univers durant une Coupe du monde ou un Euro. Ce serait génial d’avoir des voitures avec le logo des Bleus, les drapeaux français à chaque but ou des skins aux couleurs des pays pour nos voitures. Tout le monde bénéficierait de ce genre de partenariat.
Il existe des rivalités entre équipes sur Rocket League ?
On entretient toujours des rivalités avec nos adversaires. Pour moi, la plus forte, c’est clairement avec l’équipe américaine NRG que j’ai croisée pas mal de fois en finale. En Europe, c’est un peu plus bon enfant, notamment avec BDS qui sont nos concurrents directs. En général, je m’entends plutôt bien avec les autres joueurs avec qui je joue assez souvent à côté ou sur Twitch. Les rivalités, c’est très bien pour l’e-sport, mais avec Vitality, on est au top depuis longtemps, ce n’est pas forcément à nous de les installer. Si une nouvelle équipe émerge et est super motivée pour nous défoncer, tant mieux. Ce serait sympa d’avoir une structure comme la Karmine Corp* qui arrive à notre niveau pour créer plus de tension à 3 grosses équipes européennes.
*Peu de temps après l’interview, la Karmine Corp a annoncé la création de son équipe sur Rocket avec des joueurs reconnus comme Stake, itachi et Aztral.
Une rivalité qui aurait pu se créer avec le PSG, s’il n’avait pas arrêté son équipe en 2019. Pourquoi si peu d’acteurs du foot sont-ils présents sur le jeu selon toi ?Paris a eu son équipe, Monaco et le Barça aussi. Plus aucune n’existe encore aujourd’hui… J’ai l’impression qu’ils s’en foutaient, tout simplement. Ils ont mis en place une équipe avec des salaires moyens pour ne plus s’en occuper vraiment ensuite. On pensait vraiment que ça pouvait faire un truc de fou dans notre monde, mais finalement rien. C’est plutôt étonnant quand on voit les liens évidents entre le foot et Rocket League. Peut-être que les clubs attendent que le jeu atteigne un plus haut pic d’audience ?
Tu vas bientôt représenter la France dans un tournoi olympique* particulier dû à la Covid, en marge des JO de Tokyo. C’est une bonne chose, ce rapprochement entre e-sport et olympisme ?À la base, on devait aller à Tokyo disputer cette compétition. Même si c’était avant l’ouverture des JO, c’était quand même sympa sur le papier. Avec la Covid, tout a changé, et on doit jouer en ligne. Mais le pire, c’est que c’est assez mal organisé. Les qualifications étaient horribles avec aucune tête de série de prévue, tu pouvais donc voir les deux meilleures équipes s’affronter dès le premier tour. Entre ça et le format des matchs choisi (uniquement des BO3), peu de fans se sont donné rendez-vous. On verra pour les phases finales, mais je suis quand même perplexe. Je donnerai tout pour gagner comme à chaque fois, mais ce n’est clairement pas le tournoi de l’année. Si un jour, il y a une vraie compétition bien organisée pour les Jeux olympiques, je serais ravi d’y participer. Tant qu’on ne me pose pas la question que l’e-sport est un sport. (Rires.)
*La France de Kaydop a brillamment remporté le tournoi en marge des Jeux olympiques contre de vaillants Néerlandais.
Propos recueillis par Clément Bernard